Olivier Pintelon

Il est urgent de réduire la semaine de travail

Olivier Pintelon Rédacteur pour le think tank Poliargus

Que choisiriez-vous? Un emploi passionnant auquel vous consacrez de nombreuses heures ou un travail abrutissant de seulement 30 heures par semaine ? Le choix ne semble pas très difficile. Intuitivement, on sent que pour assurer un travail qualitatif, le contenu du job est primordial.

Et pourtant, il n’y a pas que le contenu. Il faut également que tous les aspects de la vie soient en équilibre : le travail, la famille, l’épanouissement personnel, la vie sociale, etc. Et ce n’est pas une évidence. Un ménage à double revenu consacre facilement 70 heures à un boulot payé. C’est pourquoi il est urgent d’imposer une réduction collective de la semaine de travail. Ce constat ne ressort pas d’une vision négative sur le travail, mais parce que pour être un bon employé, il vaut mieux avoir une vie ordonnée.

Le trèfle à quatre feuilles du travail qualitatif

Il existe beaucoup d’études sur le travail qualitatif. En gros, on distingue les quatre dimensions suivantes : le contenu du job, les circonstances de travail, les conditions de travail et les rapports de travail. Pensez respectivement à l’acquittement des tâches, à la charge physique, à l’indemnisation et au climat social dans l’entreprise. Une étude révèle que le contenu du travail est absolument décisif. L’idéal, c’est un emploi où l’on jouit d’une autonomie et d’une implication qui correspondent à ses compétences.

Pourtant, les conditions de travail – dont fait partie le temps de travail – jouent également un rôle. Il est en effet scientifiquement admis qu’il existe un lien entre le temps de travail et le bien-être des employés. Les longues journées de travail – mais aussi s’il n’y a pas de flexibilité- pèsent sur la qualité du travail et rendent souvent les gens littéralement malades. Cependant, les longues journées de travail provoquent surtout des conflits entre les différents aspects de la vie et c’est pourquoi il est urgent d’imposer un raccourcissement collectif de la semaine du travail.

Le manque de temps entraîne des conflits

Le principal conflit, c’est celui qui se joue entre le travail et la famille. Les pères et mères belges consacrent respectivement 23 et 32 heures par semaine au travail ménager et aux soins des enfants. Une étude récente de la VUB indique que le meilleur moyen de résoudre ces conflits, c’est d’instaurer un réel raccourcissement du temps de travail.

Le conflit entre la famille et le travail s’explique surtout par la participation accrue de la femme au travail. Dans les années 60, la plupart des femmes arrêtaient de travailler à partir de la naissance de leur premier enfant. À cette époque, les hommes travaillent souvent plus de 50 heures par semaine, alors que les femmes ne font pratiquement pas de travail payé. Cependant, il n’y a pas eu de raccourcissement spectaculaire du temps de travail depuis puisque les chiffres de la VUB démontrent que les hommes qui y consacrent 39 heures en moyenne alors que les femmes atteignent 31 heures. Les ménages à double revenu travaillent donc 70 heures par semaine.

En ce moment, le travail et la famille sont (partiellement) équilibrés via le travail à temps partiel volontaire ou les régimes de congé individuels. Cependant, ces systèmes ne sont pas accessibles à tous et se font aux dépens de l’un des deux parents puisque les interruptions pèsent sur les possibilités de carrière, ce qui entraîne la perte de nombreux talents. Seul un raccourcissement collectif de la semaine de travail peut structurellement équilibrer ces aspects.

La sociologue Suzana Koelet résume le problème de la façon suivante dans le magazine Samenleving en Politiek. « Que l’on soit riche ou pauvre, intelligent ou bête, puissant ou faible, homme ou femme, personne ne peut demander plus de temps. Dans ce sens, le temps est l’un des biens les plus précieux ». Bref, quand il s’agit de temps, choisir équivaut à perdre. Ce choix entraîne des conflits et pèse sur le bien-être des employés.

Un raccourcissement réel du temps de travail est un moyen efficace de résoudre ce problème. Pour l’instaurer de façon non sexiste, mais aussi pour le rendre accessible à chacun, il est urgent d’instaurer une mesure collective. Les données d’Eurofound révèlent que la majorité des employés sont favorables à une réduction de la semaine de travail. Qu’attendons-nous ?

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