Pierre Havaux

Flandre : « En pleine forme financière pour subir le pire »

Pierre Havaux Journaliste au Vif

Tout va mal, tout empire, mais il y a aussi la Flandre qui respire. Et qui respire la grande forme financière. Proclamé en flamand dans le texte, c’est encore plus parlant : « Vlaanderen is financieel in topvorm », a pu se réjouir le grand argentier du gouvernement flamand, Matthias Diependaele (N-VA). Merci qui ? Merci Fitch. L’agence de notation financière vient de gratifier la Flandre de la note de solvabilité « AA ». Vraiment sympa. Et amplement mérité.

Le meilleur élève de la classe budgétaire belge se voit ainsi récompensé pour sa rigueur proverbiale et son sens inégalé de l’effort quand il s’agit de tenir ses finances publiques en ordre. Ce fort beau bulletin n’est que justice, triomphe le ministre régional du Budget :  » Le rating de Fitch montre que nous avons confectionné en Flandre un budget pluriannuel solide. Nous sommes un gouvernement qui investit sans laisser les dettes aux générations suivantes.  » Un gouvernement qui s’autorisait tout de même un  » modeste  » déficit, de 433 millions d’euros en 2020, année taxée de budgétairement compliquée pour cause de conjoncture économique morose. C’était avec la ferme intention de renouer avec l’équilibre budgétaire dès 2021. C’était avant qu’une crise sanitaire d’enfer ne fasse tout voler en éclats.

Rien qui puisse à ce stade entamer sérieusement le moral de Matthias Diependaele. Car qui dit mieux en Belgique ? Personne. Et cette prouesse dans la performance décuple le plaisir du ministre, qui a tenu à relever le fait par voie de communiqué :  » La Flandre obtient la note la plus haute de toutes les entités du pays. Cette situation est unique car, normalement, les entités fédérées obtiennent au mieux un rating équivalent à celui attribué au pouvoir fédéral.  » Lequel Etat fédéral, budgétairement peu à la fête, doit se satisfaire depuis quelque temps déjà d’un  » AA-  » qui le range aussi dans la catégorie de la solvabilité financière de haute qualité mais un palier en dessous de la composante flamande. La comparaison sera plus cruelle pour la Région wallonne qui doit se contenter d’un  » A2 avec perspective stable « , soit une solvabilité jugée de qualité moyenne supérieure par cet autre géant de la notation qu’est Moody’s. Tout à sa joie, Matthias Diependaele a oublié que la Région bruxelloise, elle, fait jeu égal avec la Flandre, puisque notée  » AA  » depuis septembre 2019 par Standard and Poor’s, troisième poids lourd de la notation financière.

Mais l’essentiel est que Fitch continue de parier sur l’avenir radieux de la Flandre. Et que son brevet de crédibilité risque de valoir bientôt de l’or. Matthias Diependaele fait un voeu :  » Cette note « AA » permettra à la Flandre de bénéficier de taux d’intérêt plus favorables, de mieux résister aux chocs économiques et financiers et facilitera les investissements étrangers.  » Entre ces lignes se glisse le méchant coronavirus et la facture astronomique qu’il va laisser derrière lui. Se faufile aussi ce sous-entendu : tout le monde ne pourra pas en dire autant à l’heure où il faudra tendre sa sébile et faire les yeux doux aux marchés financiers.  » Attention, emprunter de l’argent coûte aussi de l’argent « , dit le message obligatoire d’avertissement. Même pas peur, répond la Flandre.

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