Ettore Rizza

Edward Snowden, histoire extraordinaire d’un héros ordinaire

Ettore Rizza Journaliste au Vif/L'Express

L’ancien agent de la CIA a révélé à la presse comment l’agence de sécurité américaine espionnait des millions d’internautes. Il a tout perdu dans l’aventure. Mais il ne regrette rien.

L’histoire d’Edward Snowden ressemble au scénario de La Firme, l’un des premiers thrillers à succès de John Grisham, que Sidney Pollack avait adapté au cinéma en 1993. Souvenez-vous : Mitch McDeere (Tom Cruise), un jeune avocat idéaliste, découvre que le cabinet pour lequel il travaille depuis peu couvre en réalité des activités mafieuses. Avec l’aide du FBI, il parvient à faire démanteler le réseau, perdant du coup son emploi et le confort qu’il lui procurait. Une nouvelle vie s’ouvrait à lui.

L’histoire d’Edward Snowden ressemble au scénario de  » La Firme « , multiplié au carré. Le méchant, ici, n’est pas un petit cabinet d’avocats, mais la National Security Agency, l’une des plus puissantes et des plus secrètes agences gouvernementales américaines. Les malversations qui lui sont reprochées ne se limitent pas à du vulgaire blanchiment, mais à l’espionnage de millions d’internautes au travers de géants du net et des télécoms tels Facebook, Google, Apple ou Verizon : le très secret projet  » Prism « .

Comme Mitch McDeere, Edward Snowden a tout perdu dans l’aventure. A 29 ans, cet ancien employé de la NSA, qui a révélé la machination documents à l’appui au Washington Post et au Guardian britannique, a fait une croix sur un salaire d’environ 200 000 dollars par an (quelque 150 000 euros), ainsi que sur la vie paisible qu’il menait avec sa petite amie dans sa maison d’Hawaï. Depuis des semaines, il vit reclus dans un hôtel de Hong Kong, hanté par l’idée d’être espionné. Snowden connaît les méthodes de son ancien employeur. Il ne regrette pourtant rien :  » Je suis prêt à sacrifier tout cela parce que je ne peux pas, en bonne conscience, laisser le gouvernement américain détruire la vie privée, la liberté d’Internet et les libertés fondamentales des citoyens dans le monde « , a-t-il déclaré au Guardian . Loin d’adopter la posture du héros, Snowden se décrit comme un égoïste souhaitant vivre dans un monde où le mot  » vie privée  » signifie encore quelque chose.

Pour lui, et contrairement au personnage de Grisham, le gouvernement américain est un ennemi et non un allié. Ses seuls soutiens possibles sont la presse, l’opinion publique mondiale, voire les autorités chinoises, qui pourraient vouloir s’attacher cette source potentielle d’informations stratégiques.

On ne sait comment l’histoire finira, ni si la belle fable qui nous a été présentée jusqu’ici reflète la réalité. Mais on a vraiment, vraiment, envie d’y croire. Et de souhaiter un monde rempli d’Edward Snowden.

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