Olivier Rogeau

Delphine contre Albert II : la reconnaissance et l’héritage

Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Un père qui n’est pas son père biologique et un autre qui ne veut pas être considéré comme tel. Que doit penser Delphine Boël quand elle entend « Papaoutai« , la plainte chantée par Stromae ?

La fille présumée d’Albert II est au milieu du gué, alors qu’ont débuté, à huis clos, les plaidoiries dans la double action judiciaire qu’elle a introduite devant le tribunal de 1e instance de Bruxelles : en contestation de paternité à l’égard de Jacques Boël, et en recherche de paternité à l’encontre du roi retraité.

Les parties ont remis leurs conclusions cet été, mais une nouvelle pièce a été versée tout récemment au dossier : Jacques Boël a fait réaliser un test ADN qui confirme qu’il n’est pas le père de la plaignante. Il ne contestera donc pas l’action de Delphine, ce qui va faciliter la procédure. Cela ne signifie pas pour autant que la 12e chambre du tribunal civil de Bruxelles (trois juges), présidée par Bernadette Van Schepdael, va décider automatiquement que Jacques Boël n’est plus le père légal de l’artiste plasticienne.

Que doit penser Delphine Boël quand elle entend u0022Papaoutaiu0022, la plainte chantée par Stromae ?

L’annonce du résultat de ce test ADN est néanmoins une première victoire pour Delphine, qui clame depuis des années qu’Albert II est son vrai père. Mais le combat judiciaire pour faire établir sa filiation, commencé l’an dernier, est loin d’être terminé : l’audience d’aujourd’hui est le début d’une longue procédure et le premier volet de l’affaire – la requête en désaveu de paternité – ne concerne pas directement le père du roi Philippe.

Celle qui serait née de la longue liaison de sa mère, Sybille de Sélys Longchamps, et d’Albert, alors prince héritier, est toutefois bien décidée à obtenir en justice la reconnaissance que le mari de la reine Paola a toujours refusée de lui accorder. L’abdication d’Albert au profit de son fils Philippe, en juillet 2013, a mis fin à l’immunité totale qui protégeait le vieux roi. « Albert n’a pas demandé à être mêlé à tout cela, mais il attend sereinement la suite des choses », estime son avocat, Alain Berenboom.

Sereinement ? L’affaire empoisonne sa vie depuis des années et elle a perturbé sa fin de règne. Albert s’énerve quand le nom de sa fille présumée est évoqué, aurait confié le cardinal Danneels à Delphine. Toutes les démarches personnelles de celle-ci ont abouti à un échec et Delphine dit avoir perdu tout espoir de réconciliation. Son avocat, lui, assure que l’enjeu financier n’est pas la motivation de sa cliente. La loi prévoit qu’un enfant naturel a les mêmes droits qu’un enfant né dans le mariage. Si Delphine est reconnue fille d’Albert II, elle ne deviendra pas « princesse de Belgique », mais elle aura droit, comme Philippe, Astrid et Laurent, à une part de l’héritage du roi Albert.

Reste à voir si Albert se soumettra, lui aussi, au test ADN, seconde étape de la reconnaissance. S’il refuse l’expertise scientifique, mode de preuve par excellence pour l’établissement d’une filiation, la paternité peut être établie par d’autres voies de droit : témoignages, photos… Et si ce refus du test ADN semble abusif au juge, celui-ci peut en déduire une présomption de paternité. Mais on n’en est pas là.

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