Moreau ? "C'est dehors!" © Belgaimage

« Chez Nethys, ils n’ont rien compris »

Face à l’inertie liégeoise, Dimitri Fourny, chef de groupe CDH, préconise de reprendre le contrôle de Publifin via le parlement wallon. Explications.

Près de dix mois après l’éclatement du scandale Publifin, sa filiale Nethys est toujours une société privée et Stéphane Moreau, son patron. Ce qui fait enrager Dimitri Fourny, chef de groupe CDH au parlement de Wallonie.

Qu’est-ce qui a véritablement changé à Nethys, depuis nos révélations de fin décembre 2016 ?

La ministre des Pouvoirs locaux (NDLR : Valérie De Bue, MR) a dit au parlement wallon qu’elle n’approuverait pas les comptes 2015 et 2016 de Publifin. Ce sont deux mesures conservatoires importantes : il n’y aura pas de décharge donnée aux administrateurs. Le conseil d’administration de Finanpart, la filiale financière de Nethys, a été repris par Publifin et il y a une volonté, semble-t-il, de reprendre le CA de Nethys. On verra ce qu’il en est, le 14 octobre, avec l’assemblée générale de Nethys. Donc, ça avance quand même. Et tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut appliquer les recommandations du rapport de la commission d’enquête parlementaire voté à l’unanimité au parlement le 12 juillet dernier. Dans l’intervalle, il y a eu le désistement d’instance, et pas d’action, de Nethys à l’égard des cinq commissaires accusés d’avoir nui à son image. Mais Nethys ne renonce pas à la possibilité de réintroduire une autre action contre les mêmes personnes. On est toujours dans la manipulation. Chez Nethys, ils n’ont rien compris. Ils paient avec de l’argent public le cabinet d’avocats Linklaters pour commenter en 130 pages le rapport de la commission. De nouveau, ils essaient de semer le trouble dans l’esprit des administrateurs. On le déplore.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Aujourd’hui, le contrôle public de Publifin est inopérant. C’est toujours la gouvernance parallèle exercée par les responsables politiques liégeois qui prédomine et ça, on ne peut pas accepter. On doit tirer un trait définitif sur cette époque-là.

Le CDH liégeois n’a-t-il pas un administrateur chez Publifin ?

Bien sûr, mais ça se passe au-dehors !

Rien ne bouge, Nethys continue à prendre des initiatives controversées et des pans de son économie, comme Voo ou Be TV, s’écroulent…

Je ne pense pas que les dirigeants de Nethys vont procéder eux-mêmes au démantèlement de la société. Nous allons devoir légiférer. Il n’est pas idiot d’envisager une structure publique d’intérêt régional pour recentrer la société sur son objet initial. On ne peut plus continuer avec une société où Stéphane Moreau travaille comme indépendant en s’affranchissant des règles définies pour les organismes d’intérêt public. Tous ces gens qui ont des statuts hybrides, d’indépendants ou de faux indépendants, et qui perçoivent des montants colossaux ne sont plus les bienvenus. Le délai, c’est maintenant. La ministre des Pouvoirs locaux s’est déclarée ouverte à la mise en place d’un groupe de travail au parlement, avec le concours de l’administration et de son cabinet, pour réfléchir à l’élaboration d’un décret. Il faut un texte légal clair, à défaut de quoi rien n’avancera. Il faut agir par la contrainte.

Le MR et le CDH étant au pouvoir, pourquoi n’est-ce pas le gouvernement qui s’implique dans la rédaction d’un tel décret ?

D’abord, parce que le travail avec le parlement permet de maintenir cette force unanime qui s’est dégagée des travaux de la commission d’enquête. Ensuite, parce que le processus législatif sera plus rapide. Le texte ne devra pas passer au Conseil d’Etat.

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Votre position par rapport à Stéphane Moreau ?

C’est dehors ! Lui et les siens ont été beaucoup trop loin dans les errements. Notre commission et l’audit commandé par le gouvernement wallon ont mis en avant le fait qu’il n’y a jamais eu, et c’est une faute lourde, de perspective claire pour le groupe. On a toujours agi au cas par cas, en fonction des opportunités, et au passage, on s’est servi.

L’administrateur CDH de Publifin partage-t-il votre analyse ?

Josly Piette sera sur la même ligne que nous. Il y a une unité de vue au niveau du CDH.

Comment interprétez-vous le soutien de Willy Demeyer, bourgmestre socialiste de Liège , à Stéphane Moreau ?

Je ne le comprends pas. Je pense qu’il y a derrière une gouvernance parallèle, des petits arrangements entre amis. C’est justement pour ça que nous avons tourné la page, le 19 juin dernier, et ils n’ont rien compris. C’est le principe de la rivière qui, après les inondations, reprend son lit gentiment. On en est là.

La pierre d’achoppement, n’est-ce pas le droit de propriété ? Allez-vous exproprier la Province de Liège et les communes associées ?

Cela fait partie des discussions. Je suis intimement convaincu qu’on doit reprendre le contrôle de Publifin à partir de la Wallonie. L’entreprise actuelle a été construite pour échapper à la tutelle publique. Mais dès l’instant où l’on retourne vers une structure publique, le contrôle redeviendra effectif. Le gouvernement devra envoyer – ce qu’il n’a pas encore fait – des délégués de contrôle au conseil d’administration de Publifin. Par rapport au remboursement des émoluments des membres des comités de secteur, nous entendons que le conseil d’administration leur fasse des propositions de transaction d’ici au mois de décembre. Tous n’étaient pas au même niveau d’absence ou d’absence de travail. C’était le travail du CA et ce n’est pas encore fait.

Que doit devenir Resa, le principal opérateur des réseaux de distribution d’électricité et de gaz en province de Liège et la vache à lait du groupe Nethys ?

Resa doit être totalement dissocié de Nethys, application immédiate du décret électricité ! Que Resa soit la filiale de Publifin, pas de souci, mais à condition que les dividendes remontent aux actionnaires publics. Pareil pour le pôle  » médias  » : la question se pose maintenant. Si l’acquisition de L’Avenir par Nethys a permis de maintenir une forme de diversité au niveau de la presse wallonne, il n’est pas sain qu’un groupe de presse dépende de quelques puissants ou de la structure actuelle. L’Avenir doit-il donc rester dans ce groupe ? Quid des opérations dans le sud de la France ? On doit avoir un vrai débat sur ce qui ressort de l’intérêt communal et provincial. Idem pour le pôle financier. Ne devrait-il pas y avoir un transfert de la compagnie d’assurances L’Integrale vers Ethias ou Ecetia ? Il est impensable de poursuivre le projet  » Congo  » (NDLR : minibarrage au Nord-Kivu) où Moreau enzovoort ont injecté de l’argent à titre personnel, avec un conflit d’intérêts patent entre l’utilisation de l’argent public et le soutien à des intérêts privés. ça ne va pas !

L’intercommunale Publifin a-t-elle eu son mot à dire à propos de l’engagement par Nethys, comme consultant, de Michel Marteau, rédacteur en chef de Sudpresse ?

Je n’en sais strictement rien…

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