Johan Lanotte

« Ce sont les centrales nucléaires qui échouent, pas la politique du gouvernement Di Rupo »

Johan Lanotte Johan Vande Lanotte (sp.a) est Vice-Premier Ministre sortant et Ministre de l'Economie, des Consommateurs et de la Mer du Nord sortant.

Ces derniers jours, nous sommes envahis de prédictions à propos de blackouts et autres scénarios catastrophes. Pourtant, couper l’électricité dans les communes n’est pas la meilleure solution. Il y a des solutions plus durables pour éviter de nous retrouver sans électricité. En très bref : nous devons investir d’urgence en câbles, et pas en centrales nucléaires.

Pour commencer, ce sont les centrales nucléaires qui échouent, et pas la politique de Di Rupo. En 2003, nous avons décidé avec le gouvernement violet de sortir de l’énergie nucléaire en plusieurs phases. En 2007, le gouvernement Van Rompuy (sans le s.pa) a conclu un protocole pour faire fonctionner les centrales nucléaires pendant dix ans de plus. C’était une erreur et en 2012, quand le sp.a était à nouveau dans le gouvernement, la sortie nucléaire a été confirmée par une loi. Cependant, entre-temps, nous avons perdu cinq précieuses années et le signal à l’égard d’éventuels investisseurs est brouillé.

Mais même là, les éventuels problèmes de l’hiver à venir n’ont rien à voir avec un échec de la politique, mais avec les centrales nucléaires déclinantes. Pourtant, on peut encore éviter de se retrouver dans le noir cet hiver.

La dernière fois que nous avons noté une consommation très élevée d’énergie, c’était le 17 janvier de l’année passée: c’était une journée froide. Doel 3 et Tihange 2 étaient fermées à cause des fissures, trois centrales de gaz s’étaient éteintes et deux autres avaient été démantelées. Cet hiver, Doel 3 et Tihange 2 seront toujours fermées et Doel 4 aussi, au moins jusqu’à début 2015. Ensemble, leur capacité s’élevait à 3.000 MW. D’autres centrales ont été démantelées ou sont transformées de sorte qu’au total il y a une capacité de 4.600 MW qui n’est pas disponible. C’est donc 1.000 MW de moins que la capacité de production du 17 janvier 2013.

Il faut trois solutions pour répondre à ces défaillances: mieux brancher les générateurs d’urgence équipés d’une capacité considérable, mieux adapter la demande des entreprises à l’offre (ce qui a lieu systématiquement en Allemagne) et augmenter les importations. Si nous prenons en compte l’énergie de pays voisins en plus de la nôtre, nous avons toujours un excédent d’énergie.

Aujourd’hui, ces importations sont déjà possibles et aux moments de pointe, c’est toujours une partie importante de la solution. En janvier 2013, nous avons importé 3500 MW depuis les Pays-Bas et la France, même si l’importation de 4500 MW est certainement possible. Ce chiffre correspond au 1000 MW que nous cherchons.

Cependant, à terme il existe beaucoup plus de possibilités. Nous ne sommes toujours pas reliés convenablement entre nous. C’est comme si un fermier vendait uniquement ses pommes de terre au supermarché de son village. L’électricité a été libéralisée, mais on a omis de construire des autoroutes capables de transporter cette électricité. Ce système ne peut pas fonctionner. À Maasbrecht aux Pays-Bas, à trois kilomètres de la frontière belge, il y a une centrale d’une capacité de 1.300 mégawatt, ce qui suffit à pallier le manque de courant. Comme cette centrale ne fonctionne pas, nous pourrions parfaitement l’utiliser aux moments de pointe.

Tout ce dont nous avons besoin, c’est d’un câble de 15 kilomètres qui connecte la centrale à notre réseau. Et c’est là que réside le problème. Un tel câble ne coûte pas des milliards, techniquement ce n’est pas non plus insurmontable, seules les réglementations empêchent une réalisation rapide. Là la politique peut intervenir, au besoin par un décret d’urgence.

Le manque de transport nuit également à l’énergie renouvelable. L’énergie solaire ou éolienne pourrait facilement se transporter vers les régions les jours où il n’y a pas de vent ou de soleil. Sans transport, ce n’est pas possible.

Nos centrales nucléaires échouent, en Finlande on n’arrive pas à construire la nouvelle centrale, au Royaume-Uni la construction d’une nouvelle centrale nécessite des subsides plus élevés que pour les éoliennes en mer. Retarder la sortie ou, pire, construire une nouvelle centrale n’est pas envisageable. Il faut investir en énergie renouvelable, en production de pointe et surtout en câbles pour le transport.

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