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Après les inondations, l’enjeu wallon de la réforme et de la clarification

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

L’urgence wallonne se fait plus vive encore après la catastrophe de juillet. Au-delà de la réorientation de la relance, des changements plus structurels seront nécessaires en vue de la septième réforme de l’Etat.

La catastrophe naturelle vécue en juillet par la Wallonie laissera des traces. Et nécessitera des moyens considérables pour rencontruire ce que les inondations ont détruit. Dans plusieurs interviews accordées ce week-end, le ministre-président Elio Di Rupo (PS) confirmait qu’un partie des moyens du plan de relance post-Covid, d’un montant de 7,5 milliards, sera réorientée. Le fédéral pourrait faciliter certains investissements et des démarches ont été entreprises, notamment, auprès de la Banque européenne d’investissements (BEI).

Cela pourrait ne pas suffire. Le plan « Get up Wallonia! » visant à mobiliser toutes les forces vives de la Région au service du redressement – un plan dont le nom a été abandonné au profit de la relance pure et simple – se justifie plus que jamais. Et le débat va s’inviter en vue d’une probable septième réforme de l’Etat. « On ne va pas nous donner des sous, il faut que tout le monde fasse un effort », disait Elio Di Rupo à L’Echo ce samedi.

« Nous avons le sentiment et la conviction qu’il faut accélérer tout, dont notre redressement, c’est indispensable, ajoutait le ministre-président au Soir. Au sein de l’espace francophone, il faut plus que jamais réfléchir pour savoir de quoi la Wallonie a besoin pour voler de ses propres ailes. En matière de formation par exemple, il faut accélérer. » « Il y a 125 métiers en pénurie en Wallonie, pestait au même moment Georges-Louis Bouchez, président du MR. Cela me devient insupportable qu’un demandeur d’emploi puisse refuser une fonction dans un métier en pénurie. Il faut des règles plus strictes.

Réforme la loi de financement? « Inconcevable »

Le mal reste profond. Dans une carte blanche, l’économiste Stijn Baert (UGent) souligne: « Lundi dernier, Le Soir écrivait que la province de Flandre-Orientale avait franchi la barrière magique des 80 % d’emploi en 2020. Malgré la crise du covid-19. Contraste saisissant : le taux d’emploi atteint à peine 64 % dans le Hainaut. Dans cette province, 31 % des 25-64 ans sont inactifs. En d’autres termes, plus de 3 personnes sur 10 ne travaillent pas et ne cherchent pas d’emploi. Et si nous examinons de plus près les courbes du chômage, nous verrons que chaque province flamande fait mieux que chaque province wallonne. Et pourtant, le niveau d’éducation n’est nulle part aussi élevé qu’en Brabant wallon. »

« Comment cela est-il possible?, demande-t-il. A cause du syndrome hollandais. Si la Wallonie était un pays à part entière, elle verrait sa prospérité rétrograder avec de tels niveaux de chômage, et elle devrait revoir à la baisse le soutien social qu’elle procure aux sans-emploi. Aujourd’hui, si elle peut vivre de la sorte, c’est grâce à l’économie flamande. En d’autres termes, la prospérité de la Flandre fait obstacle aux réformes dont l’économie et le marché du travail wallons (et bruxellois) ont besoin. »

L’économiste poursuit: « Ces dernières semaines, les médias flamands se sont fait l’écho de la demande de ‘refinancement’ de la Wallonie. Les trous dans le budget sont si profonds que sans argent fédéral supplémentaire, il sera impossible de les combler. Une réforme de la loi de financement, qui régit les flux d’argent entre les régions et le gouvernement fédéral, est donc nécessaire et urgente, a déclaré Frédéric Daerden, ministre du Budget de la Communauté française. »

Son avis est tranché: « Je trouve cela inconcevable. La loi de financement a été réformée il y a 10 ans, dans le cadre de la précédente réforme de l’État. Son objectif était de récompenser financièrement les régions les plus performantes. De cette façon, il y avait enfin une certaine logique dans les transferts entre les Régions. Aujourd’hui, au lieu de ‘réformer la Wallonie’ pour la rendre plus forte, des hommes politiques wallons de premier plan disent vouloir ‘réformer la loi’. »

Evidemment d’accord, mais…

La majorité arc-en-ciel (PS- Ecolo – MR) au pouvoir à Namur a mis l’accent sur une relance orientée à trois niveaux qui répondent aux priorités des trois partis qui la composent en un subtil équilibre politique. Par contre, l’éternel débat entre communautaristes et régionalistes, qui prévaut au sein de tous les partis, n’a pas été tranché. La formation, notamment, reste assise entre deux chaises.

« Evidemment d’accord avec Stijn Baert sur la loi de financement, mais « la Belgique francophone » cela n’existe pas, commente d’ailleurs ce lundi matin Philippe Destatte, économiste et directeur de l’Institut Destrée. La Wallonie se transforme. Clarifions le paysage institutionnel Wallonie-Bruxelles.« 

Voilà un autre chantier de reconstruction urgent.

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