Thierry Denoël

Annemie Turtelboom est déjà en campagne électorale

Thierry Denoël Journaliste au Vif

Le bateau Justice perce de toutes parts. Gardiens de prison, avocats, experts judiciaires et désormais assistants de justice et services psycho-sociaux des prisons se croisent les bras. Face à eux, la ministre de la Justice reste sourde aux cris d’alarme qui sont lancés.

Annemie Turtelboom se contente d’envoyer quelques lieutenants au front, d’avancer de vagues promesses, voire des propositions inconsistantes (comme les détecteurs de métaux en prison). On n’écope pas une embarcation qui coule avec une cuillère à pot… Quelle image chaotique pour l’un des derniers bastions régaliens de l’Etat ! Sans parler des magistrats du siège qui ne sont pas nommés et que des avocats remplacent parfois au cours de procès où ils assurent eux-mêmes la défense d’une des parties. Ce fut le cas récemment à Charleroi.

Bon, AnnemieTurtelboom (Open-VLD) n’a pas hérité d’une situation rose et les restrictions budgétaires imposées à tous les départements du gouvernement sont inexorables. On a tout de même du mal à comprendre la stratégie de « femme invisible » de la ministre qui ne se montre que forcée et contrainte, lorsque les syndicats de gardiens menacent de tout faire péter dans les prisons. Refuser de rencontrer les acteurs du monde judiciaire, c’est s’assurer leur méfiance pour un long terme. L’emballement des grèves en est un signe. Si « la Justice, c’est comme les Galeries Lafayette » (dixit la ministre à La Libre Belgique), il serait temps que le gérant du grand magasin motive son personnel, car ce sont les clients qui in fine en pâtissent : ainsi les femmes battues, otages de la grève des avocats pro deo (lire Le Vif/L’Express de ce jeudi).

Réapparue dans les médias, Annemie Turtelboom dit travailler à ses priorités. Le modèle de justice qu’elle semble vouloir dessiner s’annonce très sécuritaire. A la veille des élections communales, son discours l’est tout autant. Rappelons que la ministre mène la liste Open-VLD à Anvers face à Bart De Wever (NV.A) que les sondages créditent de 40 % des voix, contre 5 % pour les libéraux. Musculation de campagne ? Entre promesses sécuritaires (l’exécution des courtes peines, par exemple) et réalité budgétaire (ceinture pour tous !), le justiciable ne s’y retrouve plus. A défaut d’une improbable sécurité sans faille, celui-ci a au moins droit à une justice juste, et non pas improvisée comme c’est le cas aujourd’hui. On remarquera en passant l’attentisme du partenaire socialiste au sein du gouvernement, visiblement peu ému par ce tohu-bohu. Cela changera-t-il après le scrutin du 14 octobre ?

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