Albert II doit se plier à un test ADN, sous peine d’une astreinte de 5000 euros par jour

Le Vif

La cour d’appel de Bruxelles a tranché. Elle va contraindre le roi Albert II de donner son ADN en vue de le comparer à celui de Delphine Boël, qui souhaite être reconnue comme sa fille. Il devra payer 5000 euros d’astreintes par jour s’il ne se soumet pas à un test génétique dans les délais décidés par la cour.

La cour d’appel de Bruxelles a donc rendu son arrêt dans l’affaire qui oppose Delphine Boël à Albert II. La cour a suivi les conseils de Delphine Boël qui soutenaient que le roi Albert II devait se soumettre sans attendre à un test ADN, comme le lui a signifié la cour en octobre dernier. Etant donné que le Roi ne s’est toujours pas soumis à ce test, les avocats de Delphine Boël souhaitaient que la cour l’oblige maintenant à procéder au test sous peine d’une astreinte de 5.000 euros par jour de retard par rapport au délai imparti. Pour les conseils d’Albert II, la décision de la cour d’appel ne pouvait être exécutée tant qu’un recours est pendant contre celle-ci. Ce qui est le cas puisqu’ils ont introduit un pourvoi en Cassation. Le 25 octobre dernier, la cour d’appel de Bruxelles avait rendu un arrêt déclarant que Jacques Boël n’était pas le père légal de Delphine Boël. Elle avait également chargé une experte de l’ULB-Hôpital Erasme de procéder dans les trois mois à une expertise génétique permettant d’établir ou non un lien de filiation entre Delphine et le roi Albert II..

Les résultats du test ADN du roi Albert II ne seront pas divulgués avant nouvelle audience

L’arrêt rendu par la cour d’appel de Bruxelles jeudi, concernant la recherche de paternité de Delphine Boël, précise un point important: les résultats de prélèvements ADN sur le roi Albert II, tout comme ceux sur Sybille de Selys Longchamps et sur Delphine Boël, ne seront pas communiqués avant qu’une éventuelle nouvelle audience soit fixée en appel. En d’autres termes, pas avant que la Cour de cassation n’ait tranché sur la conformité de l’arrêt de la cour d’appel du 25 octobre 2018 qui déclare que Jacques Boël n’est pas le père légal de Delphine Boël.

La cour d’appel a également déclaré « qu’après avoir procédé aux prélèvements d’empreintes génétiques sur les personnes de Madame Delphine Boël, de Madame Sybille de Selys Longchamps et du roi Albert II, l’expert procédera aux analyses comparatives utiles et nécessaires de ces prélèvements, dont elle ne communiquera pas, à ce stade, le résultat aux parties et à la cour, résultat qu’elle conservera jusqu’à nouvelle instruction de la présente cour ou d’une éventuelle juridiction de renvoi ».

Bientôt princesse ?

Il y a plus de cinq ans, Delphine Boël entamait un procès contre Jacques Boël, son père légal, et Albert II en vue d’obtenir une reconnaissance de paternité du sixième roi des Belges. Elle affirme en effet être la fille d’Albert II avec qui sa mère, Sybille de Selys Longchamps, a eu une liaison entre 1966 et 1984.L’arrêté de la Cour d’appel la rapproche de son but, même si Albert II, qui n’est plus couvert par son immunité depuis qu’il n’est plus sur le trône, n’obtempérera pas forcément. S’il s’avère qu’il est bien le père biologique de Delphine quelles seraient alors les conséquences pour la famille royale ? Les trois enfants d’Albert et Paola devront-ils partager leur héritage avec Delphine ? Et celle-ci aura-t-elle le droit de porter le titre de princesse et d’occuper une place dans l’ordre de succession au trône ?

Albert II doit se plier à un test ADN, sous peine d'une astreinte de 5000 euros par jour
© Belga Image

Interrogée par la VRT, l’avocate Ann Maelfait estime que Philippe, Laurent et Astrid seront bel et bien obligés de partager leur héritage, même si Delphine a toujours dit que son combat n’était pas une question d’argent. « Pour la Justice belge, un descendant biologique est égal à un descendant juridique. Légalement elle a alors autant de droits que les autres enfants. Cependant le roi Albert pourrait la déshériter un maximum, auquel cas elle n’aurait droit qu’à la réserve héréditaire (NLDR : la part de l’héritage dont on ne peut priver ses héritiers) », explique-t-elle. Cela reviendrait à maximum un huitième de l’héritage paternel. Selon Het Nieuwsblad, Albert et Paola ont réécrit leur testament il y a quelques années, d’après une « source bien informée », pour parer à une éventuelle défaite juridique.Delphine princesse ? La question du titre de princesse fait l’objet de débat, même si selon Alain De Jonge, l’un des avocats de Boël, Delphine souhaite être reconnue pour son identité et celle de ses enfants. « Elle ne veut pas de place sur les portraits officiels », déclare-t-il au Nieuwsblad.

Pour savoir si Delphine a droit au titre de princesse de Belgique, il faut selon Ann Maelfait se baser sur un Arrêté royal de 2015. Celui-ci précise que seuls les descendants directs du roi actuel (Philippe) peuvent porter le titre de prince ou de princesse, mais que les descendants d’Albert peuvent garder leurs titres. Pour l’avocate, tout dépend donc de l’interprétation de l’arrêté royal, mais on pourrait argumenter qu’en tant que descendante directe, Delphine aurait le droit de revendiquer le titre de princesse, à condition évidemment que le lien de paternité soit établi. « Mais il est très probable qu’on ne lui octroiera pas le titre », conclut Maelfait. Succession au trône Elle applique le même raisonnement à la succession au trône. « Si Delphine est une enfant d’Albert, elle a en principe les mêmes droits qu’Astrid et Laurent et elle entre en ligne de compte pour le trône. Mais c’est là un scénario très improbable. La princesse Élisabeth a presque 18 ans, donc la succession semble établie ».Le professeur Frederik Swennen, professeur en droit familial à l’Université d’Anvers, est plus affirmatif. « Si Delphine Boël s’avère être la fille d’Albert, elle pourra prendre son nom, porter le titre de princesse, et être son héritière. Ce qu’elle n’aura pas, c’est une dotation », déclare-t-il à la VRT.

Trois quarts des Belges soutiennent Delphine Boël dans son combat contre le roi Albert II

Trois Belges sur quatre soutiennent l’action entreprise par Delphine Boël en justice pour se faire reconnaître comme la fille légale du roi Albert II, selon les résultats d’un sondage à paraître mercredi dans le Soir Mag. Et pour 79% des sondés, l’ancien souverain devrait se soumettre au test ADN demandé par l’artiste.

La plupart de la population sondée est au courant de la démarche de Delphine Boël: 93% en ont ainsi entendu parler, dont 43% suivent l’affaire via les médias. Les Flamands sont 82% à soutenir l’artiste, contre 66% des Wallons et 64% des Bruxellois. Et les habitants du nord du pays souhaitent davantage (84%) qu’Albert II se soumette à un test ADN que ceux du sud (73%) ou de la capitale (68%). Près de sept Belges sur dix (67%) pensent que Delphine est bien la fille biologique de l’ancien Roi, ressort-il encore de ce sondage, réalisé par Dedicated du 12 au 14 mars, sur un échantillon représentatif de 1.012 Belges âgés de 18 ans à 75 ans et dont la marge d’erreur maximale est de ±3,1%.

« C’est une solution sereine qui a été trouvée aujourd’hui »

L’un des conseils de Delphine Boël, Me Marc Uyttendaele, s’est dit satisfait de la décision rendue jeudi par la cour d’appel de Bruxelles.

« Je me réjouis. C’est une solution sereine qui a été trouvée par la cour aujourd’hui, je pense », a déclaré à l’agence Belga Me Marc Uyttendaele, l’un des avocats de Delphine Boël. « La cour a entendu notre message selon lequel il est nécessaire de ne pas attendre plus longtemps pour récolter les données ADN » compte tenu de l’âge d’Albert II, a-t-il précisé.

L’avocat a également affirmé que « la question de l’astreinte est hors de propos » dès lors que les éventuelles astreintes qui pourraient être infligées par la cour seraient versées par sa cliente à titre de donation à une association. « La cour a également suivi la proposition modérée, que nous avions nous-mêmes formulée, de ne pas divulguer immédiatement les résultats de l’analyse comparative des prélèvements ADN, vu l’effet suspensif du pourvoi en cassation de la partie adverse contre l’arrêt du 25 octobre 2018 », a encore commenté Me Uyttendaele.

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