Michaël Nicolaï, de Spray Can Arts : "Il y a toujours eu une création underground." © DR

À Liège, la traque à l’art de rue

Le Vif

Les graffitis plaisent aux uns autant qu’ils déplaisent aux autres. Art véritable ou vandalisme qualifié, Liège n’échappe pas à la tendance, qu’elle tente bon gré mal gré de canaliser. Entre répression et mise à disposition de moyens d’expression.

Sisyphe des temps modernes, la brigade antigraffitis parcourt Liège où elle chasse les graffitis et traque les tagueurs. Une mission quotidienne et répétitive, et un problème insoluble. Arrêts de bus, entrepôts désaffectés ou devantures de commerces, les cibles sont inépuisables et les auteurs, infatigables. C’est que, pour un même tagueur, on compte parfois de nombreux graffitis, à l’instar du Liégeois BTC (pour Brûle tes cahiers) interpellé en flagrant délit en 2015 et poursuivi comme étant l’auteur de pas moins de 296 tags à travers la ville. Une arrestation qui pourrait s’accompagner d’une peine de quatre mois de prison et près de 25 000 euros d’amende. Pour Michaël Nicolaï, ancien tagueur professionnel aujourd’hui coordinateur de l’asbl Spray Can Arts, il ne faut pourtant pas tout mélanger. S’il se désolidarise des  » gribouillis  » qu’il attribue à des problèmes en lien avec l’encadrement de la jeunesse, il fait aussi la part des choses :  » Il y a toujours eu une création underground, par exemple dans des terrains vagues. Mais celle-ci s’accompagne aussi d’un certain code d’honneur. Ce n’est pas la même chose d’aller mettre de la couleur sur un mur abandonné que d’aller taguer le domicile d’un particulier.  »

Encourager la créativité

Pour Michaël Nicolaï, la lutte contre les graffitis illégaux passe par l’aménagement d’espaces d’expression alternatifs, comme on en retrouve au skate park de Cointe, sur la place Vivegnis ou à la darse de Coronmeuse. Dans certains cas, le street art peut même se présenter comme un service à la communauté. Association active dans les cultures urbaines et reconnue par la Fédération Wallonie-Bruxelles, Spray Can Arts rassemble un collectif d’artistes pluridisciplinaire. En partenariat avec la Ville, elle est à l’initiative de nombreux projets d’embellissement, comme par exemple l’action Paliss’Art qui visait à décorer les palissades de chantiers à travers Liège en vue de l’égayer. Dernier projet en date : la finalisation de la fresque monumentale de 1 200 mètres carrés intitulée L’Homme de la Meuse, réalisée par l’artiste Sozyone sur le quai de la Boverie. Un projet qui fait écho à la consultation des citoyens d’Amercoeur, qui avaient exprimé leur souhait de voir se réaliser plus de street art dans leur quartier.

Pour Michaël Nicolaï, il s’agit là d’un parfait exemple de ce que le street art peut apporter à une ville.  » Il y a à Liège énormément de pignons aveugles, qui sont autant de lieux pris d’assaut par les graffeurs sauvages et les dépôts clandestins. Avec des moyens assez légers, on peut réaliser quelque chose de joyeux et de coloré. Ces endroits deviennent alors des lieux de référence, qui sont respectés et qui deviennent même un vecteur de fierté.  »

Par Kathleen Wuyard et Clément Jadot.

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