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Un spray nasal pimenté ?

Un spray à base d’extraits de piment pour soulager les symptômes nasaux : étonnant et pourtant, ce traitement a prouvé son efficacité.

Trois Belges sur dix sont confrontés au moins 12 semaines par an à des problèmes de nez bouché, qui coule ou qui démange ou à des crises d’éternuements intempestifs. Chez un tiers d’entre eux, il sera possible d’exclure une cause allergique ou infectieuse ; on parlera alors de rhinite idiopathique. Elle pourra être influencée par des facteurs hormonaux mais aussi par certains aliments, par des substances présentes dans l’environnement professionnel et par une foule d’autres facteurs. Dans un cas sur deux, aucune cause objective ne pourra toutefois être identifiée et les sprays nasaux classiques à base de corticostéroïdes ne seront pas en mesure de soulager les symptômes. « Un spray à la capsaïcine pourra quelquefois donner des résultats là où d’autres remèdes ont échoué « , affirme Laura Van Gerven, ORL en formation à l’UZ Leuven, où ce traitement est utilisé depuis quatre ans déjà.

Haute dose

 » La capsaïcine est un extrait de piment rouge, que nous utilisons à des concentrations relativement élevées, clarifie le Dr Van Gerven. C’est aussi pour cela que nous anesthésions la muqueuse nasale pour les 2 premières des 5 doses administrées à une heure d’intervalle. Des symptômes tels que larmoiement, sensation de brûlure dans le nez et quintes de toux pourront se manifester après chaque dose, mais ils ne durent jamais plus d’une minute. Chez 8 patients sur 10, ce traitement suffira à faire disparaître complètement les symptômes en un à trois mois, et ce pour une durée de 6, 9, parfois même 12 mois. Dès que les plaintes réapparaissent, il suffira de répéter le traitement, car il ne comporte aucun risque et ne provoque pas d’effets secondaires.  »

Cette approche a été décrite pour la première fois en 1991 par l’équipe suisse du Pr J.S. Lacroix. Elle a ensuite fait l’objet de plusieurs études sérieuses. Il ne fait aujourd’hui plus aucun doute que le traitement est efficace… même si les mécanismes qui sous-tendent son action sont toujours à l’étude. Laura Van Gerven a par exemple analysé dans le cadre de sa thèse de doctorat des échantillons de la muqueuse et des sécrétions nasales de patients et de volontaires sains. Elle a également réalisé dans les deux groupes des tests d’hypersensibilité à un air froid et sec et à une série de substances irritantes pour le nez telles que la moutarde, la cannelle et la capsaïcine.

Excès de capteurs

 » Chez les personnes affligées de symptômes nasaux de cause inconnue, certaines fibres nerveuses de la muqueuse nasale semblent contenir une quantité anormale de canaux TRP. Ces structures recueillent des informations concernant la qualité de l’air et les aérosols qui pénètrent dans les fosses nasales. Lorsqu’elles sont trop nombreuses, la muqueuse risque de réagir trop violemment, ce qui peut provoquer des symptômes nasaux. Les canaux TRPV1 sensibles à la chaleur, en particulier, semblent présents en quantités excessives chez les patients concernés. Ils sont activés notamment par la capsaïcine, ce qui explique aussi pourquoi on a parfois le nez qui pique après un repas très épicé. À des concentrations élevées, la capsaïcine a toutefois un effet plus intéressant encore : elle est alors en mesure de détruire purement et simplement les fibres nerveuses contenant une quantité anormale de canaux TRPV1… mais épargne celles qui en possèdent un nombre normal. C’est cette particularité qui permet au spray à la capsaïcine de combattre l’hypersensibilité nasale sans affecter les sensations normales. Mais les plaintes sont néanmoins susceptibles de resurgir avec la formation de nouvelles fibres nerveuses. »

Par An Swerts

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