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Trisomie 21: bientôt une « thérapie » ?

Le Vif

Des chercheurs ont réussi à neutraliser en laboratoire le chromosome en excès responsable de la trisomie 21.

Un nouvel espoir. Des chercheurs ont réussi à neutraliser le chromosome en excès responsable de la trisomie 21 dans des cellules mises en culture. Cette percée devrait, selon eux, contribuer à mieux comprendre cette pathologie, voire à ouvrir, peut-être un jour, la voie à des traitements.

Un handicap incurable

Les être humains ont normalement 23 paires de chromosomes, inclus les deux chromosomes sexuels, soit au total 46 chromosomes, porteurs des gènes indispensables à la vie.
Les individus atteints de syndrome de Down sont nés avec trois, au lieu de deux, copies du chromosome 21.

Plus connu sous l’appellation de ‘Trisomie 21’, il s’agit d’une anomalie chromosomique congénitale provoquée par la présence d’un chromosome surnuméraire pour la 21e paire. « Lors d’une grossesse, c’est l’anomalie chromosomique la plus fréquente », explique le professeur Jacques Jani, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU Brugmann.

« Contrairement à certaines autres anomalies chromosomiques, le risque de trisomie 21 augmente avec l’âge de la maman, et devient même presque exponentiel passé les 35 ans », explique Jacques Jani. « En moyenne le risque est de 1 sur 700. A 20 ans, le risque est de 1 sur 2.000, mais à 35 ans il est de 1 sur 250 et ça augmente avec l’âge. »

Afin de dépister ce syndrome, « il y a quelques années, on effectuait une amniocentèse, mais le risque de fausse couche avec cette technique invasive est de 1% », précise le gynécologue. « Aujourd’hui, on fait de plus en plus de prises de sang et d’échographies pour évaluer les risques et le cas échéant faire une amniocentèse. » Cependant la technique reste risquée. Le professeur Jani utilise depuis 6 mois une nouvelle technique. « C’est une prise de sang qu’on envoie dans un laboratoire américain. Celui-ci dispose d’une technique qui permet de détecter l’ADN foetal dans le sang de la mère. » La technique est donc beaucoup moins risquée.

Jacques Jani estime qu’en moyenne, sur les 100.000 à 120.000 accouchements par an, « on dépiste 9 cas sur 10 ». Sur les cas dépistés, le professeur estime que plus de 99% des parents décident d’avorter lorsqu’ils apprennent que leur bébé sera atteint du syndrome.

Cause de déficiences mentales, la trisomie 21 comporte un risque accru de malformations cardiaques, de dysfonctionnements du système immunitaire et de survenue d’une démence d’Alzheimer précoce.

La « thérapie » du chromosome excédentaire

Jusque là la correction d’un chromosome entier était restée hors de portée, y compris in vitro, selon Jeanne Lawrence, auteur principal de l’article des chercheurs de l’école de médecine de l’Université du Massachusetts publié mercredi par la revue scientifique Nature.

Les chercheurs ont inséré un gène dans le chromosome excédentaire et l’ont utilisé comme interrupteur pour l’éteindre en quelque sorte. Pour aboutir à ce résultat, ils se sont servis d’un gène appelé « XIST », qui intervient au cours du développement embryonnaire, pour inactiver l’un des deux chromosomes X des femelles chez les mammifères.

L’expérience a été conduite à partir de cellules provenant de trisomiques et reprogrammées pour retourner à un état quasi embryonnaire, de cellules souches pluripotentes induites (iPS), afin d’obtenir différentes sortes de tissus de l’organisme.

Un verrou conceptuel saute

L’équipe teste à présent ce nouvel outil pour voir si la « thérapie du chromosome » peut corriger les pathologies chez des souris modifiées génétiquement afin d’être atteintes de trisomie 21. Les résultats devraient être connus « d’ici un an », indique la chercheuse.
Elle reconnaît volontiers qu’on ne peut pas forcément transposer aux humains ce qui se passe chez des souris, les tests sur les animaux de laboratoires faisant partie d’un long processus de recherche qui peut déboucher ou non sur des traitements efficaces pour les humains. Mais selon elle, c’est un verrou conceptuel sur la thérapie chromosomique qui vient de sauter.

Elle diffère de la thérapie génique qui consiste le plus souvent à remplacer un gène déficient par un gène sain. La thérapie génique a permis de traiter avec succès des « bébés bulles » frappés de déficits immunitaires sévères ou encore de traiter pour la première fois une maladie génétique grave du sang, la béta-thalassémie.

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