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Tous allergiques au gluten ?

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Adieu pain, pâtes, pizzas, pâtisseries, bière, plats préparés ? Intolérants au gluten ou consommateurs en quête de mieux- être, les Belges sont de plus en plus nombreux à éliminer de leur assiette les produits qui contiennent cette protéine. Enjeux santé et marketing d’un phénomène qui suscite bien des controverses.

Haro sur le gluten ! Une dizaine d’années après les Etats-Unis, la Belgique connaît un engouement pour une alimentation qui exclut cette protéine présente dans le blé, l’orge, le seigle… Pourquoi ? Effet de mode ? Enjeu marketing ? Nouvelle phobie alimentaire, dans la foulée des croisades contre la malbouffe, les colorants, l’huile de palme ? Des gastro-entérologues déplorent surtout un amalgame entre trois types de troubles physiologiques liés au gluten : la maladie coeliaque ou « coeliaquie », entéropathie auto-immune ; l’allergie au gluten, pathologie assez rare qui se manifeste par des problèmes respiratoires ou digestifs, voire par des oedèmes ; et l' »hypersensibilité au gluten », affection encore mal définie en médecine. Il en résulte une grande confusion dans le public et des débats dans le milieu médical.

Le gluten est une protéine présente naturellement dans certaines céréales parmi les plus consommées. Elle donne du volume et de l’élasticité aux pains et aux gâteaux. Elle est également utilisée dans l’industrie agroalimentaire pour épaissir et donner du liant. Un régime strict sans gluten est le seul traitement existant à ce jour pour les personnes atteintes de la maladie coeliaque. Ce régime doit être suivi à vie pour éviter la destruction progressive de la paroi de l’intestin grêle. Cette atrophie des villosités de la muqueuse intestinale peut toucher l’adulte ou l’enfant. Signes cliniques ? Diarrhée ou constipation, vomissement, douleurs abdominales… D’autres symptômes sont dus à la malabsorption : anémie, retard de croissance, ostéoporose…

La maladie atteint environ une personne sur 200 en Belgique – 1/500 en Allemagne, 1/110 aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, 1/70 dans les pays sahariens -, alors que les Chinois, les Japonais et les Africains dont la culture repose sur d’autres céréales que le blé sont très peu touchés. En Occident, un cinquième des cas repérés ont plus de 65 ans au moment du diagnostic. Les femmes sont plus frappées que les hommes : elles constituent près de 70 % des malades.

Peu d’études scientifiques se sont intéressées à l’hypersensibilité au gluten et de nombreux spécialistes dénoncent la diversité des troubles recouverts par cette notion. Mais pour d’autres, formés à la médecine nutritionnelle, près de 10 % de la population belge serait affectée, à des degrés divers, par la Gluten Sensitivity (GS), soit environ la moitié des personnes aux prises avec un côlon irritable. La plupart des cas ne sont pas diagnostiqués.

Suivre un régime contraignant peut constituer un handicap social, en particulier pour des enfants en âge scolaire : pas de sandwich, pas de gâteau d’anniversaire préparé avec de la farine contenant du gluten… En revanche, l’idée répandue selon laquelle une diète sans gluten est « monotone » et « peu nutritive » ne correspond pas forcément à la réalité. Un tel régime conduit à être plus créatif dans ses achats alimentaires et fait découvrir ou redécouvrir une variété de produits parfois oubliés ou peu connus du grand public. Un message sur lequel tous les médecins et spécialistes en nutrition s’accordent : manger le plus varié possible est le gage d’une bonne santé.

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

Vincent Castronovo (ULG) : « Il y a plusieurs degrés d’intensité dans l’intolérance au gluten » Catherine Wanty : « La sensibilité au gluten n’est pas scientifiquement prouvée » Les aliments qui contiennent du gluten Le marketing du sans gluten L’abécédaire du sans gluten

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