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Manger de la viande favorise-t-il vraiment le cancer ?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

L’OMS a classé la viande transformée dans la catégorie des agents « cancérogènes pour l’homme », et les viandes rouges dans la liste « probablement cancérogènes ». Les réactions affluent de toutes parts concernant cette étude. La viande cause-t-elle vraiment le cancer ? Des nuances sont à apporter.

En se basant sur plus de 800 études, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), l’agence cancer de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a classé lundi la viande transformée, essentiellement la charcuterie, dans la catégorie des agents « cancérogènes pour l’homme« , tandis que les viandes rouges – qui, selon le CIRC, incluent le porc et le veau – ont été classées comme « probablement cancérogènes ».

Des « données triturées » ?

Cette étude a déclenché un flot de réactions, parmi lesquelles celles de professionnels qui ne sont pas du tout d’accord avec les résultats, allant même jusqu’à douter des méthodes utilisées.

Chez les producteurs de viande notamment, l’étude fait grincer des dents. De la France aux Etats-Unis en passant par le Brésil, la levée de boucliers est générale chez les professionnels de la viande des grands pays producteurs.

« Il est clair » que de « nombreux » auteurs de l’évaluation « ont trituré les données pour obtenir un résultat bien précis » a réagi l’Institut nord-américain de la viande (NAMI) qui représente l’interprofession du secteur.

Pour le Pr Tim Key, épidémiologiste au centre britannique de recherche sur le cancer, « cela ne signifie pas que vous devez arrêter de manger de la viande rouge ou transformée. Mais si vous en mangez beaucoup, vous devriez peut-être penser à réduire ».

L’Australie, un des plus grands exportateurs de viande au monde, a également réfuté le rapport, jugeant « grotesque » de comparer saucisses et cigarettes. « Cesser de consommer tout ce qui est décrit comme cancérogène par l’OMS reviendrait à retourner dans sa grotte », a déclaré le ministre australien de l’Agriculture, Barnaby Joyce.

Moins de 500 grammes de viandes rouges par semaine

« Il est inapproprié d’attribuer n’importe quel facteur unique à un risque accru de cancer. C’est un sujet très complexe qui peut dépendre d’une combinaison de bien d’autres facteurs comme l’âge, la génétique, le régime alimentaire, l’environnement et le style de vie », a jugé le Centre de liaison des industries transformatrices de viande de l’UE.

Selon le Fonds mondial de recherche contre le cancer, basé à Londres, manger moins de 500 grammes de viandes rouges par semaine serait recommandé, « et très peu, voire pas du tout » s’il s’agit de produits transformés (saucisson, salami, pâté et autres charcuteries… ).

Toutefois, l’idéal serait de ne pas manger plus de 300 g de viandes rouges par semaine.

Pour le Dr Dominique Bessette de l’INCa , la consommation de viandes ne doit pas non plus dépasser 500 grammes par semaine, avec des portions ne dépassant pas 70 à 100g.

Les associations végétariennes sont, quant à elles, satisfaites de cette étude, affirmant que « les protéines animales ne sont pas bonnes » pour l’homme.

Un « buzz toxique »

Le sociologue Francesco Panese s’étonne de la communication de l’agence onusienne et du manque de recul des médias. Interrogé dans le Journal du matin, le professeur d’études sociales de la médecine et des sciences à l’Université de Lausanne relativise les conclusions des chercheurs sans contester la validité de la méthode utilisée. « Cet événement est totalement disproportionné par rapport à la valeur intrinsèque des résultats », estime-t-il.

« On s’est adressé directement au lecteur, à l’auditeur, au consommateur, bref au citoyen-mangeur, pour finalement l’alarmer. Et ça, c’est une dérive », a-t-il dénoncé sur les ondes de la RTS. « On est dans un système où on alarme les gens, on crée un buzz assez important qui peut avoir lui-même une certaine toxicité », affirme le professeur.

Il évoque une « société de l’inquiétude qui ne perd pas une occasion pour se mettre fantasmatiquement en danger. Et « l’hygiène alimentaire occupe un niveau extrêmement haut dans les inquiétudes ordinaires des gens », ajoute-t-il.

Relativiser les études

Presque tous les jours, de nouvelles études sont publiées, que ce soit sur la viande, l’alcool ou encore le café. Le plus souvent, ces études se contredisent entre elles. Sur le graphique ci-dessous, Vox reprend les différentes études sur nos aliments, selon que ceux-ci préviennent du cancer ou le favorisent. Chaque point rouge représente une étude différente.

Selon les études, un même aliment peut prévenir du cancer ou le provoquer.
Selon les études, un même aliment peut prévenir du cancer ou le provoquer.© Capture d’écran Vox

Tous les spécialistes s’accordent à dire qu’il convient de manger varié et équilibré, ce qui suppose de manger des fruits et des légumes et des céréales complètes qui apportent aussi des fibres bonnes pour l’intestin.

La règle générale reste d’avoir une alimentation variée et équilibrée comportant des fruits, des légumes et des fibres (céréales complètes) et de faire l’exercice physique (marche…).

Avec AFP

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