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Lésion cérébrale : quand vous ne reconnaissez plus votre partenaire

Muriel Lefevre

Que faire si vous ne reconnaissez plus votre partenaire après un traumatisme cérébral ou que ce dernier ne se souvient plus de vous ? C’est ce qui est arrivé à l’ancien coureur de la Lotto-Soudal Stig Broeckx qui a rompu avec sa petite amie après être sorti du coma. Selon le professeur Steven Laureys (UZ Liège), interviewé par De Morgen, c’est loin d’être un cas isolé.

Le 28 mai 2016, Stig Broeckx, à l’époque jeune coureur cycliste prometteur de la Lotto-Soudal, fait une terrible chute lors de la troisième étape du Tour de Belgique. Deux motards se percutent devant lui et l’entraînent dans leur chute. Il est victime d’une hémorragie cérébrale et va rester 5 mois et 22 jours dans le coma. Lorsqu’il se réveille, les médecins estiment que c’est un miraculé. Lui ne sait plus qui il est. Il ne se souvient pas de sa vie avant l’accident. Les cinq années précédant sa chute funeste ne sont qu’un immense trou noir où seuls quelques flashbacks effleurent de temps à autre sa mémoire. Il a aussi oublié la relation qu’il avait avec sa petite amie.

Stig Broeckx avant son accident
Stig Broeckx avant son accident© getty

Malgré les mois et les trésors de patience, l’amour n’est jamais revenu. Il est en effet possible qu’une lésion cérébrale efface l’amour que l’on avait pour l’autre. Un tel syndrome est d’autant plus difficile à soigner que l’amour ou la relation à l’autre n’est pas lié à une région spécifique du cerveau. Il n’existe pas de traitement standard pour faire revenir un sentiment perdu.

Selon le neurologue et spécialiste du coma Steven Laureys (UZ Liège), interviewé par De Morgen, les troubles de la mémoire sont assez classiques en traumatisme cérébral, mais varie entre chaque individu. « Parfois, ne manque que la période qui précède l’accident, parfois les lésions cérébrales sont si graves que la personne ne se rappelle même pas de son propre nom. Il arrive que ces morceaux du puzzle reviennent par morceau, mais le processus est long et aléatoire. » Il est par contre certain que cela a un impact indéniable sur les relations privées et même sociales des patients.

L’étude  » In Sickness and in Health  » de l’Iowa State University a démontré que le risque de divorce augmente de 6 % si l’un des partenaires a de graves problèmes de santé. Il ne s’agit pas seulement de lésions cérébrales, mais aussi de cancer ou d’accident vasculaire cérébral, par exemple. Les chiffres réels sont probablement plus élevés puisque ces stats ne prennent en compte que les couples mariés. Si l’on ne prend que les lésions cérébrales, et bien qu’il n’existe pas de chiffres séparés, le taux de séparation devrait être probablement encore plus élevé puisque les troubles de la mémoire s’accompagnent aussi souvent de trouble de la personnalité. « Il est frustrant de constater, et ce tant pour l’entourage que pour la personne elle-même, qu’on n’est plus le même et qu’on ne le sera peut-être plus jamais. »

Lésion cérébrale : quand vous ne reconnaissez plus votre partenaire
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Les rôles au sein des couples basculent aussi. Il se peut que celui qui était le pilier ne soit plus en état de le faire. Il est tout aussi possible que le conjoint soit cantonné au rôle du soignant. Un rôle peu propice pour raviver une flamme perdue dans l’oubli.

A cela s’ajoute aussi la pression sociale qui veut qu’on doive rester en couple malgré l’adversité. Une étude du Dutch Plus Magazine et du Helen Dowling Institute montre que 76 % des sondés ne comprennent pas comment on peut divorcer de son conjoint gravement malade.

Pourtant si la situation est jugée intenable par les deux partenaires, un divorce est encore la meilleure solution. Cette décision est d’ailleurs rarement prise dans l’immédiat. « Au début d’un tel processus, le partenaire est simplement heureux que la personne ait survécu. Vous l’avez à nouveau auprès de vous et cela vous suffit. Ce n’est qu’après que l’aspect émotionnel et social s’insinue. Parfois, il ne s’agit que de petits et très subtils changements dans une relation. « 

Un aspect du traumatisme qui ne bénéficierait à l’heure actuelle de pas encore assez de soutien psychologique déplore les experts.

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