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Les secrets pour être un « bon père »

Muriel Lefevre

Souvent délaissés par les études, les pères jouent pourtant un rôle crucial dans le comportement, le bonheur et même les aptitudes cognitives de leur enfant. Longtemps sacralisé, il n’y a pas que la seule relation avec sa mère qui compte dans le développement de l’enfant.

Aujourd’hui, de nombreux pères sont célébrés pour leur sensibilité, leur bienveillance et leur sens pratique, dit la BBC qui consacre un long article à ce sujet. Pourtant, et jusqu’aux années 1970, on mettait souvent en avant leur rôle de soutien économique à la mère. Une mère qui était, elle, chargée de l’ancrage émotionnel de l’enfant. Rejetant ainsi l’importance de la relation père-enfant à un second rôle.

Pourtant, et bien que longtemps pratiquement sacralisé, il n’y a pas que la seule relation mère-enfant qui compte dans le développement de celui-ci. On se rend aujourd’hui compte que le monde social des enfants est beaucoup plus riche et complexe qu’on ne le pensait auparavant. D’ailleurs, il n’y a pas que les pères qui ont leur importance. C’est étudiant les grands-parents, les parents de même sexe, les beaux-parents et les parents seuls que les chercheurs sont parvenus à comprendre ce qui fait vraiment grandir un enfant. Ce n’est pas une personne en particulier, mais bien plusieurs qui jouent un rôle dans son développement. De quoi ressortir le vieil argument qu’il faut un village pour élever un enfant.

En remettant en question les idées conventionnelles sur la parentalité et le genre, on transforme notre compréhension de la façon dont les pères peuvent façonner la vie de leurs enfants dès leur naissance. L’implication émotionnelle et donc affective d’un père a toute son importance. Les bébés qui ont un père engagé affectivement seraient ainsi moins susceptibles d’avoir des problèmes de comportement plus tard.

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En réalité, les rôles parentaux peuvent être flexibles. « Les facteurs qui mènent à l’établissement de relations sont exactement les mêmes pour la mère et le père « , précise Lamb, psychologue à l’Université de Cambridge qui étudie les pères depuis les années 1970. « C’est vraiment une question de disponibilité émotionnelle, de reconnaissance des besoins de l’enfant, de réponse à ces besoins, de réconfort et de soutien dont l’enfant a besoin. » La psychologue Ruth Feldman, de l’Université Bar-Ilan d’Israël, a, elle, découvert que, tout comme les mères, les pères ressentent une stimulation hormonale lorsqu’ils s’occupent de leur bébé, ce qui facilite le processus d’attachement. Lorsque les pères sont les principaux dispensateurs de soins, leur cerveau s’adapte à la tâche.

Des recherches antérieures ont révélé que les mères et les pères ont tendance à interagir différemment avec les jeunes enfants : les mères se lient davantage en s’occupant des enfants en douceur, tandis que les pères se lient généralement par le jeu. Mais, pour Lamb, cela a moins à voir avec le genre qu’avec la personne qui garde les enfants. En effet, c’est le parent qui travaille pendant la journée, et qui ne rentre à la maison que le soir, qui aura tendance à jouer à des jeux plus sauvages. Le parent qui s’occupe du bébé toute la journée va par contre interagir plus calmement avec ce dernier.

Or, dans nos sociétés, il se trouve que dans la plupart des cas c’est encore la femme qui reste avec les enfants. La faute à la pauvreté de l’offre de congés de paternités, celui qui veut faire valoir ses droits a tout d’un pionnier dans ce domaine, mais aussi à l’écart salarial qui persiste entre les hommes et les femmes. Ce dernier point fait qu’il est souvent plus intéressant pour les revenus du ménage que l’homme continue de travailler. Du coup, même si l’on voit fleurir sur internet des activités et conseils pour les relations père-enfant, dans les faits, c’est encore trop souvent les femmes qui s’occupent de l’éducation. On estime ainsi que, dans le monde, les femmes consacrent jusqu’à dix fois plus de temps que les hommes à des tâches non rémunérées – y compris la garde des enfants.

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Le jeu, c’est déjà un bon début

Mais que ce constat ne décourage pas les pères. Car, si par la force des choses, ils ne s’investissent pas autant qu’ils le voudraient durant la journée, la participation accrue des pères dès la naissance par le jeu peut avoir de nombreux avantages. En effet, le jeu, qu’il soit calme ou bruyant, est particulièrement bénéfique pour le développement des enfants. « Le jeu est le langage de l’enfance : c’est la façon dont les enfants explorent le monde, c’est la façon dont ils construisent des relations avec les autres enfants « , dit Paul Ramchandani, qui étudie le jeu en éducation, développement et apprentissage à l’Université de Cambridge. Il a constaté que jouer avec son enfant dès la naissance, soit avant qu’il ne parle ou ne rampe, s’est révélé beaucoup plus important qu’on le croyait jusqu’alors. Les études ont démontré que ces bébés présentaient moins de troubles du comportement à l’âge d’un an et qu’ils obtenaient de meilleurs résultats aux tests cognitifs à deux ans. Des résultats qui étaient indépendants de la relation de la mère avec l’enfant.

Nul besoin de jeux compliqués, « jouer » peut être aussi simple que d’asseoir le bébé sur ses genoux, de le regarder dans le blanc des yeux et d’observer ce qu’il aime. Le principal étant de s’impliquer. Cela nécessite néanmoins un peu de patience, car c’est rarement naturel et demande de la pratique.

Pas de modèle de père idéal

L’autre conclusion des dernières études sur le sujet relève un autre point fondamental: « il n’y a pas de recettes pour savoir ce que le père doit faire où quel genre de comportement il doit imiter « , dit Lamb. Il existe donc d’innombrables façons d’être un bon parent, l’essentiel étant d’être disponible sur le plan affectif et de répondre aux besoins de l’enfant. La manière dont on s’y prend varie pour chacun.

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