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La santé des hommes joue aussi un rôle dans les fausses couches à répétition

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Plusieurs fausses couches répétées semblent indiquer un problème médical chez la mère, mais ce n’est pas nécessairement toujours le cas. Le sperme des hommes, confrontés à ce problème, présente un ADN deux fois plus endommagé que celui des autres pères. C’est la conclusion d’une étude réalisée par des chercheurs de l’Imperial College de Londres relayée par De Morgen.

« Traditionnellement, les médecins cherchent la cause des fausses couches successives dans la santé des femmes », explique dans le journal De Morgen Channa Jayasena, experte en fertilité et auteure principale de cette nouvelle étude réalisée par l »Imperial College de Londres. « C’est, pour ainsi dire, la faute de la femme. Il y a beaucoup de recherches à ce sujet et il y a, en effet, quelques maladies comme les infections et les problèmes du système immunitaire chez les femmes qui mènent à des fausses couches. La santé de l’homme et de son sperme n’est généralement pas prise en compte. Nos recherches montrent cependant que l’état des spermatozoïdes peut aussi jouer un rôle. »

La recherche de Jayasena est réalisée à petite échelle et en est encore à sa phase initiale, mais elle s’inscrit dans la lignée d’autres études récentes qui vont dans le même sens. Elle a également montré que la qualité du sperme est déterminante pour la formation du placenta, qui apporte oxygène et nutriments au foetus.

L’équipe de l’Imperial College de Londres a analysé la qualité du sperme d’une cinquantaine d’hommes dont la partenaire a fait trois fausses couches consécutives ou plus. Le sperme des hommes a été comparé à celui de 60 hommes qui n’ont jamais été confrontés à une fausse couche avec leur partenaire. Les chercheurs écrivent dans la revue Clinical Chemistry que cela montre que le sperme de ces hommes présente deux fois plus d’anomalies dans son ADN que celui du groupe témoin.

Concentrations trop élevées de radicaux libres

« C’est une bonne chose que les chercheurs se penchent sur la question », avance Veva Desopper de Levensadem, une organisation flamande qui vient en soutien aux personnes ayant vécu une fausse couche. « On ne voit presque jamais d’hommes. Et les femmes remplies de chagrin qui viennent nous voir parlent en effet facilement d’un sentiment de culpabilité, surtout après des fausses couches répétées. ‘J’ai une anomalie’ , nous disent-elles. Si nous pouvons nuancer leurs propos par de nouvelles recherches en disant que cela peut aussi être en partie la responsabilité de l’homme, cela les aiderait sur le plan psychologique. Maintenant que nous savons que le problème n’est pas seulement un problème de femmes, nous pouvons, espérons-le, mieux nous y attaquer. »

Selon les chercheurs, les coupables sont les radicaux libres, molécules spécifiques du liquide séminal qui protègent les spermatozoïdes contre les bactéries et les infections, mais qui peuvent aussi les endommager gravement en concentration excessive. Il s’avère que le sperme des hommes incriminés contient quatre fois plus de ces molécules potentiellement nocives que celui des hommes du groupe témoin.

Dans une deuxième phase, l’équipe de Jayasena cherche maintenant la cause de ces concentrations élevées. « Les hommes n’avaient pas d’infection comme la chlamydia, qui, nous le savons, peut affecter la qualité des spermatozoïdes « , dit la spécialiste. « Mais il est possible que d’autres bactéries provenant d’infections antérieures soient encore présentes dans la glande prostatique qui produit le sperme. Cela entraînera peut-être une augmentation permanente des concentrations de ces molécules. »

Il est également de plus en plus évident que l’obésité peut déclencher la production des molécules suspectées. C’est pourquoi les scientifiques étudient le poids, le taux de cholestérol et le métabolisme des cinquante hommes qui ont déjà été impliqués dans plusieurs fausses couches. Ils semblent être davantage en un surplus de poids que les hommes du groupe témoin.

« Bien qu’il s’agisse d’une petite étude, elle nous donne des indices sur ce que nous devons approfondir« , déclare Jayasena. « Si d’autres recherches montrent que des concentrations élevées de ces molécules dans le sperme augmentent le risque, nous pouvons essayer de mettre au point des médicaments pour y remédier. Il a fallu beaucoup de temps à la médecine pour comprendre que la qualité du sperme joue un rôle dans les fausses couches répétées et que le problème ne concerne pas uniquement les femmes. Maintenant que nous avons connaissance de ce problème, nous pouvons espérer mieux le traiter. »

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