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L’e-cigarette, danger pour les voies respiratoires et le système immunitaire

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Les vapeurs de cigarettes électroniques peuvent tuer les cellules qui protègent les poumons et endommager le système immunitaire, conclut une nouvelle étude. Une recherche qui fait écho à des cas de plus en plus nombreux concernant une maladie pulmonaire mystérieuse liée au vapotage.

Les cigarettes électroniques et la vapeur qu’elles produisent ne doivent plus être considérées comme des alternatives essentiellement inoffensives aux cigarettes traditionnelles, ont conclu les auteurs d’une nouvelle étude, rapportée par The Independent.

E-liquides

La vapeur des e-cigarettes peut tuer les cellules qui tapissent les voies respiratoires, selon de nouvelles recherches, menées par des scientifiques de l’Université d’Adélaïde (Australie). Les chercheurs révèlent que les vapeurs de trois types de liquide pouvaient détruire les cellules épithéliales bronchiques. Ces cellules tapissent notre système respiratoire et sont importantes pour purifier les poumons et les voies respiratoires.

Les chercheurs ont également découvert que la vapeur pouvait interférer avec le système immunitaire, notamment en perturbant les macrophages – les globules blancs qui digèrent et stockent les cellules malsaines et les corps étrangers.

Pour les chercheurs, une réglementation plus stricte est nécessaire, notamment en ce qui concerne les e-liquides, utilisés pour aromatiser la vapeur produite par la cigarette électronique. Ainsi, des e-liquides produisant la même saveur peuvent, selon les fabricants, être conçus avec des ingrédients différents, ou des concentrations différentes de mêmes ingrédients. « C’est cela qui influence la manière dont un e-liquide peut être dangereux ou non », précisent les chercheurs.

L’e-cigarette dans la tourmente

La vapotage attire beaucoup d’attention ces derniers mois après que des centaines de personnes sont tombées malades, principalement aux États-Unis. Plusieurs d’entre elles sont d’ailleurs décédées de maladies pulmonaires jugées mystérieuses et qui semblent être liées à l’utilisation de la cigarette électronique. Le nombre total de personnes malades est de 530 cas confirmés et probables. La plupart des personnes concernées sont des adolescents ou des jeunes adultes. Les autorités canadiennes ont également annoncé l’hospitalisation temporaire d’une personne souffrant d’une maladie pulmonaire liée au vapotage.

L'e-cigarette, danger pour les voies respiratoires et le système immunitaire
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Les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), qui surveillent la propagation de cette maladie aux États-Unis, ont déclaré qu’ils n’avaient pas encore été en mesure d’identifier les produits chimiques ou les substances particulières qui auraient pu déclencher ces morts violentes. Mais leur enquête a révélé que de nombreuses victimes avaient des poches d’huile qui obstruent les cellules responsables de l’élimination des impuretés dans les poumons.

Bien qu’aucune conclusion ferme n’ait encore été tirée, l’American Medical Association a déjà demandé aux vapoteurs de cesser d’utiliser les e-cigarettes jusqu’à ce que la cause soit identifiée. Certains États et l’administration Trump ont lancé l’idée d’interdire les e-cigarettes aromatisées, qui ont gagné en popularité, en particulier parmi les jeunes Américains. La semaine dernière, le géant américain de la grande distribution Walmart a annoncé qu’il ne vendrait plus de cigarettes électroniques.

Les enquêteurs sont très prudents sur la cause possible des maladies, que ce soit une marque, un produit, ou un circuit de vente. Dans de nombreux cas, les recharges impliquées contenaient du THC, le principe psychoactif du cannabis. Ces recharges sont achetées la plupart du temps à des dealers dans la rue ou sur internet, puisque le cannabis reste illégal dans une partie des États-Unis. Il peut aussi y avoir des recharges de contrefaçon, aux ingrédients mal identifiés.

Concrètement, que dit la science ?

Outre la nouvelle étude, menée indépendamment des cas de maladies pulmonaires aux États-Unis, que pense la science de la cigarette électronique ? Difficile d’apporter une réponse tranchée.

Composition. Le vapotage consiste à inhaler des vapeurs créées par le chauffage à haute température d’un liquide à l’intérieur de la cigarette électronique. Les liquides contiennent, la plupart du temps, de la nicotine. Cette substance fortement addictive également présente dans le tabac peut affecter le développement du cerveau avant 25 ans et, selon certaines études, avoir un effet néfaste sur celui des adultes.

En revanche, les liquides vapotés n’incluent pas de nombreuses substances dangereuses que l’on trouve lorsque l’on fume du tabac, comme le goudron ou le monoxyde de carbone. Mais la vapeur contient des particules fines qui pénètrent les poumons. Il y a de « nombreuses substances potentiellement toxiques », a conclu un rapport des Académies américaines des sciences. Parmi elles, des métaux (nickel, plomb…), et des additifs considérés sûrs dans l’industrie agroalimentaire, mais liés à des maladies pulmonaires ou non étudiés sous leur forme vaporisée.

Moins nocif que le tabac ? Pour les personnes qui fument déjà, un consensus scientifique existe sur le fait qu’il est moins nocif de vapoter que de fumer du tabac: la nicotine reste, mais les substances cancérigènes présentes dans les cigarettes ne sont plus inhalées. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) se montre plus prudente, les considérant comme « probablement moins toxiques que les cigarettes » sans pour autant avoir « assez de preuves pour quantifier le niveau précis de risque ».

Aide pour arrêter de fumer ? Une étude britannique a observé que les e-cigarettes étaient plus efficaces que les patchs, gommes et autres produits de substitution. Mais on n’a pas encore assez de preuves. La possibilité que les e-cigarettes jouent un rôle dans l’aide au sevrage tabagique « n’est pas claire » et diffère probablement selon les types d’e-cigarettes, conclut l’OMS. Pour toutes ces raisons, elle ne fait pas figurer ce dispositif parmi l’arsenal recommandé pour arrêter le tabac et juge qu’il ne doit pas être promu comme tel tant qu’on ne dispose pas de plus de données.

Jeunes consommateurs. L’une des questions que pose la cigarette électronique concerne les jeunes qui ne fumaient pas au départ et se mettent au vapotage, encouragés par le marketing agressif dont ils sont la cible de la part des marques. Outre la dépendance à la nicotine, des études ont montré qu’ils étaient plus susceptibles de se mettre à fumer du tabac. Aux États-Unis, les autorités parlent d’épidémie dans les lycées, avec une domination des arômes fruités, menthe et menthol. (avec AFP)

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