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L’alimentation contre l’angoisse et la dépression: « Tout commence dans les intestins »

Si vous donnez de la bonne nourriture à vos bactéries intestinales, vous courrez moins de risques de souffrir d’une dépression ou de troubles anxieux. C’est ce qu’affirment le journaliste scientifique suédois Henrik Ennart et le chef étoilé Niklas Ekstedt dans leur best-seller ‘Happy Food’.

En 2017, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a calculé que la dépression était la deuxième cause de dysfonctionnement de santé dans le monde. Si nous ne faisons rien, d’ici 2030, la dépression sera la maladie la plus répandue au monde. En Belgique aussi, le nombre de patients à qui l’on prescrit des antidépresseurs monte en flèche. Mais il faudrait peut-être commencer par jeter un coup d’oeil à notre garde-manger.

Ces dernières années, le journaliste scientifique et d’investigation de Svenska Dagbladet, Henrik Ennart a étudié la littérature scientifique sur le phénomène et a découvert que notre santé mentale est fortement influencée par ce que nous ingurgitons. « Beaucoup de gens seront probablement étonnés d’apprendre qu’un grand nombre de maladies mentales sont liées à notre alimentation », écrit-il. « La même nourriture riche en sucre, produite industriellement, qui a provoqué une épidémie d’obésité et de diabète en Occident et qui a entraîné une augmentation exponentielle du nombre de personnes souffrant d’intolérance au gluten et de maladies gastro-intestinales, contribue également à l’augmentation actuelle des troubles mentaux tels que la dépression et les troubles anxieux. »

Tout est lié à notre flore intestinale, explique Ennart, qui a interviewé des chercheurs du monde entier et a lu des centaines de rapports scientifiques. Il est essentiel que l’écosystème de nos intestins soit aussi varié que possible, car ces millions de petits habitants exercent non seulement une influence sur le poids corporel, mais aussi sur les maladies intestinales, le diabète, les maladies cardiovasculaires, Alzheimer, mais déterminent aussi nos émotions. Ce n’est pas pour rien si l’on parle de « papillons dans le ventre » quand on est amoureux et de « noeud dans l’estomac » quand on a du chagrin.

Ce que l’on ressent intuitivement depuis des siècles est à présent reconnu scientifiquement : la flore intestinale est un prolongement de notre cerveau. C’est fou que nous ayons négligé cela jusqu’à présent, dit Ennart. La flore intestinale pèse pourtant environ 1,4 kilo, soit à peu près le même poids que le cerveau. En outre, les millions de petites créatures sont en contact direct avec le cerveau. Elles communiquent par l’intermédiaire de cellules nerveuses reliées au nerf vague, l’une des plus grandes voies nerveuses de l’organisme. Mais il existe d’autres voies de communication. Ainsi, les bactéries intestinales peuvent alerter notre système immunitaire, donner des ordres et influencer nos hormones. Jusqu’à 95 % des hormones qui contrôlent les processus de notre corps sont produites par les bactéries intestinales, y compris les substances importantes qui régulent nos émotions, telles que la dopamine, la noradrénaline et la sérotonine.

L'alimentation contre l'angoisse et la dépression:
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Si les aliments sucrés et faibles en fibres ont un tel impact sur le corps, pouvons-nous l’améliorer en donnant à nos bactéries intestinales la bonne nutrition ? Oui, comme le montrent les études scientifiques. La nutrition ne peut pas chasser les papillons ou le noeud dans votre estomac, mais peut améliorer votre humeur et vous rendre plus vif et résistant au stress.

La nourriture pourrait même être utilisée pour combattre l’anxiété et la dépression grave. C’est une conclusion qui a bouleversé la psychiatrie traditionnelle ces dernières années, écrit Ennart. L’étude SMILES 2017 de l’Université australienne Deakin de Melbourne, en Australie, montre que pour environ un tiers des patients les effets des conseils diététiques l’emportent de loin sur ceux d’un traitement basé uniquement sur les médicaments et le dialogue. Les patients mangeaient une variante du régime méditerranéen, avec moins de viande et plus de légumes, ainsi que des haricots, des céréales complètes, des fruits et de l’huile d’olive.

Cela ne signifie pas pour autant que les personnes souffrant de dépression doivent jeter leurs médicaments et leur thérapie aux orties, mais une consultation auprès d’un diététicien n’est pas une mauvaise idée, affirment les chercheurs.

Ennart admet que la recherche sur les bactéries intestinales est encore à petite échelle et en encore à ses débuts, mais il est déjà clair que le lien entre les intestins et le cerveau est beaucoup plus fort que nous ne l’avons jamais pensé. Les résultats d’une étude Moodfood beaucoup plus vaste, parrainée par la Commission européenne, sont attendus sous peu.

Bien sûr, de nombreux facteurs déterminent la dépression, mais il est déjà évident qu’il existe une corrélation entre la qualité des aliments que nous mangeons et notre état émotionnel. Même les anciens Grecs savaient déjà qu’il y avait un lien entre l’estomac et le psychisme, mais dans la médecine moderne, cette pensée est un peu passée au second plan.

Ainsi, le régime méditerranéen, associé aux antidépresseurs et à la psychothérapie, semble être le premier régime antidépresseur prouvé au monde. Contrairement aux médicaments, il n’a pas d’effets secondaires, il est moins cher et il est possible de changer sa flore intestinale en 24 heures. Bien sûr, tout le monde n’a pas besoin d’une alimentation méditerranéenne pour être en bonne santé. L’alimentation scandinave qui comporte beaucoup de poisson et de légumes frais, et la nourriture traditionnelle japonaise ont été associées dans d’importantes études à la santé mentale et au bien-être. Bref : si la nourriture est à la fois bonne et colorée, elle est également bonne pour la santé.

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Le tryptophane

La sérotonine, communément appelée « hormone du bonheur », se trouve dans les bananes, les kiwis, les prunes, les tomates et les noix. Pouvons-nous tout simplement consommer davantage de ces produits ? Malheureusement non. La sérotonine que nous mangeons n’est pas due à la « barrière hémato-encéphalique » qui protège le cerveau. Mais on peut aussi manger des aliments qui contiennent du tryptophane. Cet acide aminé est un précurseur de la sérotonine et peut finir dans le cerveau, où il se transforme en hormone du bonheur. Les aliments contenant beaucoup de tryptophanes sont les épinards, le pak-choï, le chou frisé, le brocoli, les haricots, les lentilles, le poisson, les mollusques, le son, les flocons d’avoine et la moutarde.

L’oméga 3

Des études récentes identifient les acides gras oméga-3 (la graisse contenue dans le poisson, en particulier dans les espèces grasses comme le saumon, le hareng et le maquereau) comme l’un des antidépresseurs naturels les plus actifs.

L’huile d’olive

Une source importante des effets positifs de l’huile d’olive sur la dépression est l’oléocanthal , qui agit de la même manière que l’antidouleur ibuprofène. Si vous n’aimez pas l’huile d’olive, prenez une huile fraîche et peu transformée, telle que l’huile de colza pressée à froid.

Le céleri

Le céleri est riche en quercétine et en kaempférol, considérés comme une protection contre la dépression due au stress.

Les pois chiches

Les personnes dépressives manquent souvent de vitamine B6, B12 et d’acide folique. Les pois chiches contiennent beaucoup d’acide folique et de vitamine B6. Si vous ajoutez du foie, des huîtres ou des moules, vous consommerez également suffisamment de B12.

Le miel

Le miel était déjà utilisé par les Romains pour remonter le moral des gens. Il contient un certain nombre de substances associées à une meilleure santé mentale. Outre le tryptophane qui contribue aussi à un bon sommeil nocturne, le miel contient également des quantités saines de kaempférol et de quercétine.

Le chou frisé

Il n’est pas surprenant que ces dernières années la tendance du chou frisé ait conquis le monde. Si le chou frisé était un comprimé multivitaminique, il répondrait à presque tous les besoins quotidiens. La teneur en vitamine C et K, par exemple, donne un coup de pouce anti-inflammatoire qui aiderait à prévenir la dépression.

Le curcuma

C’est une découverte très discutée dans le monde de l’alimentation. Une étude spécifique a montré que le curcuma serait aussi efficace contre la dépression que la fluoxétine ISRS (prozac), bien qu’il faudra le confirmer par d’autres études.

Le gingembre

Le battage médiatique est certainement justifié. Mais à dose légèrement plus élevée, l’un des super aliments les plus appréciés peut justement favoriser la dépression. Le gingembre est utilisé en médecine orientale depuis au moins 4700 ans et est très important dans l’ayurveda indien. Utilisé pour favoriser la digestion et traiter les plaies, le gingembre a également un effet anti-inflammatoire, ce qui pourrait prévenir les problèmes psychiques.

Le poivre noir

L’ingrédient actif est la pipérine. Selon la recherche, ce serait un remède contre la dépression tout aussi puissant que les médicaments habituels, et ce déjà à raison d’un demi-gramme par jour. L’absorption de l’ingrédient actif dans le curcuma est de 2000% supérieurs lorsqu’il est combiné avec du poivre noir. Le piment et le poivre de Cayenne peuvent également réduire l’anxiété et l’inquiétude, mais l’effet est moins fort que celui du poivre noir ordinaire.

La cannelle

Gorgée d’antioxydants, la cannelle a un fort effet anti-inflammatoire. Sa capacité à influencer la sensibilité à l’insuline, et donc à contrer la prise de poids et le diabète de type 2, fait son intérêt. Cet effet protège probablement aussi le cerveau et nos facultés mentales.

L’infusion

Toutes sortes d’infusions sont bénéfiques pour la santé. Le millepertuis agit sur les hormones sérotonine, dopamine et noradrénaline et, selon la recherche, a un effet tout aussi positif que les antidépresseurs « normaux ». D’autres études ont montré que les infusions à la camomille peuvent également être une bonne alternative aux médicaments standards contre l’anxiété et la dépression. Une étude a récemment montré que les buveurs de tisane voient leur risque de dépression réduit de près de 40%.

Les huîtres

Selon beaucoup, l’un des plus grands plaisirs – également selon les experts de la santé. C’est l’alternative aventureuse à un comprimé multi-vitaminé antidépresseur.

Le chocolat noir

Choisissez un chocolat dont la teneur en cacao est d’au moins 70 %. Le cacao contient un grand nombre de flavonoïdes et d’autres substances associées à une meilleure fonction cérébrale et à un sentiment de bien-être. L’effet exact n’est pas encore clair, mais le cacao peut contribuer à l’augmentation de la sérotonine et de la dopamine, l’agent de signalisation et l’hormone qui régulent le bonheur et la satisfaction. Un régime au chocolat noir n’est pas recommandé, mais les avantages d’une tablette de chocolat (maximum 40g par jour) semblent l’emporter sur les inconvénients.

Pépins de potiron

Ils sont gorgés de tryptophane. Ils sont aussi la meilleure source de magnésium (après les sels minéraux, dont on ne peut pas vraiment manger beaucoup). De nombreuses personnes souffrent d’une carence en magnésium, qui est fortement associée à la dépression. De plus, ils sont une très bonne source de zinc – l’autre minéral dont la carence est associée à la dépression.

Qu’en est-il des aliments réconfortants?

Les gens mangent quand ils ne se sentent pas heureux, surtout les gâteaux et autres aliments réconfortants. Les sucreries et les collations grasses sont un peu comme la médecine réparatrice, dit Ennart. Ils résolvent le problème provisoirement, mais au bout d’un certain temps, la situation s’aggrave. Tenez-vous à quelques friandises sucrées soigneusement sélectionnées en cas d’urgence pour vous remonter le moral. Mais seulement dans les cas vraiment urgents. Rares. À long terme, il faut éviter le sucre.

Conseils

– Mangez varié et des légumes tous les jours à chaque repas, de préférence des légumes verts et des tomates.

– Mangez plus de fibres: des produits complets, en fonction de votre activité.

– Mangez une petite poignée de noix tous les jours

– Bannissez les aliments suivants de votre alimentation : sucre, farine blanche, additifs chimiques, oméga 6, aliments frits, aliments transformés, graisses raffinées telles que l’huile de palme et l’excès d’alcool.

– Ne supprimez jamais de groupes d’aliments complets de votre alimentation (le jeûne périodique est permis).

– Manger de petites quantités de viande rouge provenant d’animaux herbivores est mieux que de ne pas manger de viande du tout.

– Mettez-vous au défi et achetez au moins un ingrédient par semaine que vous ne mangez pas habituellement.

– N’abusez pas des désinfectants

– Évitez les antibiotiques

– Bougez. Toute forme d’activité physique peut aider à prévenir la dépression.

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