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L’alcool provoque le cancer. Mais de quelle façon exactement ?

Il existe un lien indéniable entre alcool et cancer. Mais ce qu’on ne savait pas encore, c’était comment l’un entrainait l’autre. Ceux qui rougissent rapidement après avoir bu un verre devraient d’ailleurs se méfier.

Au cours de la dernière décennie, les preuves montrant qu’il existe un lien entre certains cancers et la consommation d’alcool n’ont cessé de s’accumuler. L’alcool serait même la cause directe de sept cancers: cancer de la bouche et de la gorge, cancer du larynx, cancer de l’oesophage, cancer du foie, cancer colorectal, cancer du côlon et cancer du sein. Or ceux qui ont une consommation excessive ne devraient pas être les seuls à se méfier. Les consommateurs occasionnels ne sont pas à l’abri, puisqu’un verre de temps à autre peut suffire, disent les scientifiques.

Là aussi, rien de bien neuf. Par contre, on ignorait encore de quelle façon l’alcool provoque ses cancers.Dans une étude britannique, qui a été publiée dans le magazine Nature, il ressort que l’alcool provoque des dommages génétiques irréparables à certaines cellules souches comme les hématopoïétiques, celles chargées de constamment renouveler le sang. Des dommages qui peuvent conduire à des mutations mortelles.

C’est la première fois qu’une telle étude a été réalisée sur des souris tests. Des études antérieures avaient déjà démontré que l’éthanal, aussi appelé acétaldéhyde, un produit qui sert au corps à digérer l’alcool et qui serait également responsable des symptômes typiques de la gueule de bois comme maux de tête, nausées, vomissements, douleurs abdominales, visage rouge et fatigue, endommageait l’ADN des cellules. Mais ces études étaient basées sur des concentrations extrêmement élevées d’éthanal et les tests avaient seulement été effectués dans des boîtes de Pétri, et pas sur le corps humain.

Dans cette nouvelle étude, les scientifiques ont découvert que l’éthanal mélange les chromosomes et change l’ADN des cellules de façon permanente s’il n’est pas neutralisé. Il existe deux mécanismes de défense naturels pour cela. L’un évite que l’ADN ne soit détruit et l’autre le répare en cas de dégâts. Le premier est l’enzyme « aldéhyde déshydrogénase 2 » (ALDH2) qui transforme cette toxine en acétate, une source d’énergie pour nos cellules. Sauf qu’environ huit pour cent de la population mondiale, en particulier en Asie du Sud-Est, présente une déficience héréditaire de cette enzyme. Cela pourrait expliquer le grand nombre de cas de cancer de l’oesophage dans des pays comme la Chine. Si, par exemple, vous rougissez très fort ou si vous avez mal à la tête après un verre d’alcool, il est possible que vous ayez une carence ou même aucun ALDH2. Une bonne raison de se méfier de l’alcool, car les souris présentant un manque en ALDH2 présentaient quatre fois plus de dommages à l’ADN dans leurs cellules.

Le deuxième est une protéine, la FANCD2 qui restaure l’ADN. Mais celle-ci n’est pas infaillible et certaines personnes montrant des mutations génétiques comme celles qui sont porteuses de l' »anémie de Fanconi » ne peuvent remettre leur ADN à neuf.

En éliminant génétiquement ces deux mécanismes chez les souris de laboratoire, les scientifiques ont pu démontrer que les dommages de l’ADN s’accumulaient jusqu’à mettre les cellules à l’arrêt. « L’étude montre que ceux qui sont incapables de « traiter » correctement l’alcool risquent davantage de voir leur ADN endommagé et donc d’attraper certains cancers », explique Ketan Patel, professeur de biologie moléculaire et auteur principal de l’étude.

« Plus inquiétant encore, même chez les personnes dont les mécanismes de défense sont intacts, l’alcool peut provoquer (les mécanismes de défense n’étant pas infaillibles) un cancer en endommageant l’ADN », souligne-t-il.

Patel veut maintenant étudier avec son équipe pourquoi l’alcool ne provoquerait « que » les sept cancers mentionnés plus haut. Il est, par exemple, illogique que les lésions provoquées par l’alcool à l’ADN des cellules souches lié au sang ne provoquent pas plus de cancers du sang. L’une des pistes étudiées est que les mécanismes de défense de l’organisme contre l’éthanal soient plus faibles dans certains tissus que dans d’autres.

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