Chez 90 % des personnes qui souffrent d'hyperventilation, le problème est en effet si subtil qu'il passe complètement inaperçu pour l'entourage et même pour la personne elle-même. © ISTOCK

J’hyperventile, moi ?

Le Vif

Certaines personnes, en particulier celles qui sont très sensibles (au stress) ou perfectionnistes, développent parfois des plaintes vagues parce qu’elles ont régulièrement tendance à inspirer trop d’air sans s’en apercevoir. Oui, elles hyperventilent…

Si l’hyperventilation (le fait de respirer plus vite et plus profondément que la normale) n’est pas dangereuse en soi, elle est utile lorsqu’un danger grave et imminent impose par exemple de fuir. Prendre de grandes inspirations est en effet une manière d’assurer aux muscles un apport accru en oxygène, tandis que des expirations plus fortes évacuent plus rapidement le dioxyde de carbone produit en masse lors d’un effort extrême.

Ce mécanisme ne sert par contre à rien en l’absence de réel danger. L’organisme interprète une poussée de stress, de tension ou d’angoisse comme une menace vitale : puisque la réaction se déroule entièrement dans la tête, il n’est évidemment pas nécessaire de se gonfler à bloc en vue d’une fuite ou d’un combat physique ! Or, si la respiration s’intensifie alors que les muscles n’ont pas d’effort exceptionnel à accomplir, le taux d’oxygène sanguin augmente, le taux de CO2 diminue… et, dans des cas extrêmes, la personne peut être victime d’une crise d’hyperventilation aiguë. Elle aura alors l’impression de suffoquer et devra respirer dans un sac ou en tenant ses mains devant sa bouche pour parvenir à reprendre son souffle.

Un diagnostic d’hyperventilation chronique constitue un important signal d’alarme.

Fatigue et myalgies

 » Chez 90 % des personnes qui souffrent d’hyperventilation, de telles crises ne se produisent toutefois que rarement, voire jamais, précise la physiothérapeute Chris Lenaerts. La plupart du temps, le problème est en effet si subtil qu’il passe complètement inaperçu pour l’entourage et même pour la personne elle-même. Cette hyperventilation chronique ou sournoise qui se manifeste en réaction à des émotions difficiles n’en provoque pas moins de façon régulière une augmentation du taux d’oxygène et une baisse du taux de gaz carbonique…  »

Pour prendre le problème à la racine, il est important d'identifier ce qui alimente votre stress ou vos angoisses, si nécessaire avec l'aide d'un thérapeute.
Pour prendre le problème à la racine, il est important d’identifier ce qui alimente votre stress ou vos angoisses, si nécessaire avec l’aide d’un thérapeute.© ISTOCK

Et cela n’est pas sans conséquences.  » Le faible taux de gaz carbonique dans le sang provoque notamment un rétrécissement des vaisseaux qui peut engendrer des vertiges, des problèmes de concentration, une impression de ‘planer’, une vision floue, une sensation de boule dans la gorge, des douleurs musculaires (myalgies) et des crampes. Les globules rouges ont aussi plus de mal à délivrer aux tissus l’oxygène qu’ils transportent, ce qui peut se solder par des crampes au niveau de l’intestin, de l’oesophage, des voies respiratoires et des muscles de la nuque et des épaules. L’activité du coeur devient irrégulière, ce qui peut provoquer des douleurs lancinantes ou une sensation de compression dans la poitrine, des palpitations et une agitation. L’hyperstimulation des nerfs moteurs peut également déclencher des contractions trop rapides des muscles de la vessie ou de la paroi intestinale, des réactions de peur excessives, des problèmes de jambes sans repos ou un tremblement des paupières, tandis que celle des nerfs sensitifs peut induire des picotements ou une sensation d’anesthésie, de démangeaison ou de brûlure, le plus souvent au niveau des membres ou du visage.  »

Les personnes victimes d’hyperventilation chronique présentent toutes des plaintes récurrentes typiques qui leur sont propres, mais une fatigue généralisée et des muscles douloureux et contractés au niveau de la poitrine et/ou de la nuque sont presque toujours présents. Sachant que certaines anomalies du coeur, de la thyroïde et des voies respiratoires peuvent s’accompagner de plaintes similaires, il est toutefois important de réaliser des examens médicaux afin d’exclure un problème plus grave.

Prendre le mal à la racine

Si les symptômes eux-mêmes sont sans gravité, un diagnostic d’hyperventilation chronique constitue malgré tout un important signal d’alarme :  » C’est une manière, pour votre corps, de vous avertir que vous êtes en train d’épuiser ses ressources – parce que vous en faites trop, parce que vous voulez toujours que tout soit parfait, parce que vous n’avez pas encore digéré un traumatisme, parce que vous êtes hypersensible ou hyperanxieux, parce que vous avez du mal à supporter ou à exprimer les émotions difficiles, parce que vous êtes exposé à un stress émotionnel ou environnemental persistant, etc.  »

L’hyperventilation est donc le signe qu’il est temps de changer de cap si vous ne voulez pas sombrer dans le burnout ou la dépression, voire développer une maladie somatique parce que vos défenses immunitaires sont épuisées. Pour prendre le problème à la racine, il est important d’identifier ce qui alimente votre stress ou vos angoisses, si nécessaire avec l’aide d’un thérapeute.  » Il n’est pas rare qu’une foule de facteurs remontent alors à la surface « , explique Chris Lenaerts, impliquée depuis de nombreuses années dans la prise en charge de personnes souffrant d’hyperventilation chronique.  » Sachez aussi que des mesures toutes simples telles qu’un bon sommeil, une alimentation saine et variée et suffisamment d’exercice peuvent déjà suffire à renforcer votre résistance.  »

J'hyperventile, moi ?

Respirez par le ventre

Pendant que vous analysez le terreau qui alimente votre hyperventilation chronique pour tenter d’y remédier, il peut également être utile d’apprendre à respirer doucement et avec plus de parcimonie. Pas besoin pour cela de faire attention à votre respiration elle-même… et fort heureusement, car celle-ci relève d’un processus inconscient qui risque d’être d’autant plus perturbé que vous vous efforcez de le contrôler.  » Soyez d’abord attentif à vos épaules, conseille la spécialiste. Lorsque vous êtes tendu(e), vous allez automatiquement hausser la ceinture pectorale, ce qui favorise une respiration ‘haute’ (thoracique), plus rapide et par la bouche. Si vous relâchez vos épaules, vous allez au contraire avoir spontanément tendance à respirer par le ventre et à mobiliser votre diaphragme, le plus important des muscles respiratoires. C’est la manière la moins fatigante et la plus bénéfique de respirer… et, si vous veillez en outre à le faire par le nez plutôt que par la bouche, vous obtiendrez une respiration paisible et économique.  »

Des exercices respiratoires peuvent être indiqués à petites doses.  » Il est par exemple utile de prendre régulièrement le temps de s’entraîner à la respiration par le ventre. Cette approche s’avère très efficace pour prendre conscience de son corps et trouver un certain apaisement : l’attention détournée, les ruminations font place aux sensations, ce qui explique sans doute pourquoi cet exercice est aussi un moyen très efficace et très sain pour trouver facilement le sommeil.  »

Reconnaître des signaux subtils

Un thérapeute pourra également vous aider à vivre de façon consciente les subtils premiers signes de l’hyperventilation.  » Mettons que vous ayez l’impression que les situations stressantes vous donnent surtout des palpitations. En réalité, celles-ci sont vraisemblablement précédées d’autres signes physiques beaucoup plus subtils : une vision qui se trouble, la tête qui tourne, la gorge serrée, etc. Si vous apprenez à repérer vous-même ces indices, vous pourrez immédiatement y réagir en relâchant les épaules et en respirant par le nez. Une autre possibilité est de vous retenir un instant avant chaque inspiration ou de bouger pour accroître plus rapidement votre taux sanguin de gaz carbonique – marcher plus rapidement, faire des moulinets avec les bras, etc. Avec un peu de chance, vous parviendrez alors à éviter la survenue des palpitations.  »

Apprendre à ramener la paix dans votre respiration et dans votre esprit peut donc faire toute la différence.

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