Olivier Pintelon

« Hourra, le vieillissement est résolu ! »

Olivier Pintelon Rédacteur pour le think tank Poliargus

« Personne ne peut encore prétendre que les pensions légales sont intrinsèquement impayables », écrit Olivier Pintelon. Il analyse les constatations de la Commission d’étude pour le vieillissement.

Généralement, le Comité d’Étude sur le Vieillissement choisit le début de l’été pour publier ses pronostics. Et pour la deuxième année consécutive, il esquisse un tableau favorable. Tout compte fait, le coût du vieillissement semble maîtrisé en Belgique, ce qui m’oblige à sortir une phrase audacieuse et polémique : hourra, le vieillissement est résolu !

Voilà, j’ai attiré votre attention. Il est grand temps de formuler quelques réserves. Tout d’abord, la baisse du coût du vieillissement est due notamment à une opération d’économie : la suppression du bonus pension. Deuxièmement, on ne peut continuer à prétendre qu’il faut des économies poussées pour compenser le coût du vieillissement. Il est donc grand temps de clarifier les véritables enjeux du débat.

Que nous coûte le vieillissement exactement? En Belgique, la Commission d’étude pour le Vieillissement représente la principale source d’information. Celle-ci a été fondée en 2001 par le gouvernement arc-en-ciel de l’époque afin d’étudier les conséquences sociales et budgétaires du vieillissement. Ces 15 dernières années, ses pronostics ont été présentés au début de l’été. Généralement, le coût du vieillissement était estimé à environ 4% du PIB d’ici 2060. Un coût significatif, mais qui augmente lentement au cours d’une période plus longue. Le vieillissement n’est donc pas un tsunami, mais un flux qui enfle lentement.

Hourra, le vieillissement est résolu!

L’été dernier, les nouvelles étaient même encore meilleures. D’ici 2060, le surcoût du vieillissement ne s’élèverait qu’à 2,1% du PIB. Comme nous avons 44 ans pour assumer ce coût, cela reviendrait à un effort budgétaire tout à fait faisable. Le dernier rapport – publié le 13 juillet 2016 – fait état d’un surcoût de 2,3% du PIB. En fait, le coût du vieillissement semble même maîtrisé. Hourra, le vieillissement est résolu !

Ce qu’on ne raconte pas

Cependant, les simulations récentes du Comité d’Étude sur le Vieillissement soulèvent trois observations. Tout d’abord, ce ne sont que des simulations. Il s’agit de l’estimation d’un coût qui se situe dans 45 ans. 45 ans! Pour le dire avec les mots de l’économiste Keynes : « in the long run, we are all dead ».

Deuxièmement, le comité d’étude part du principe que les employés – suite à l’âge de la retraite plus élevé – travailleront effectivement deux ans de plus. Cette hypothèse soulève de nombreux points d’interrogation. Les employés âgés ont-ils vraiment leur chance sur le marché du travail. Et n’assisterons-nous pas – à l’instar des Pays-Bas – à une explosion du nombre de personnes en incapacité de travail ?

Et enfin, nous devrons travailler plus longtemps pour moins de pension puisqu’on économise sur les montants de pension. La suppression du bonus pension exerce une influence décisive. Le Pension Adequacy Report européen 2015 a calculé que même pour les carrières plus longues les montants de pension baisseront. Le gouvernement actuel se targue de son trajet de réforme, mais sur ce sujet il est muet comme une tombe.

Le véritable enjeu

Ce qu’on passe sous silence, c’est que le véritable enjeu du débat sur les pensions reste caché. Voulons-nous un système de pension solidaire et adéquat ? Ou préférons-nous laisser cette responsabilité au marché ou à l’individu ? Le vieillissement n’est pas un complot. Il est prouvé scientifiquement que le nombre de personnes âgées va augmenter dans notre société. Cependant, certains acteurs politiques et sociétaux ont intérêt à citer chaque fois le contexte contraignant du vieillissement. Tous les jeunes employés se voient submerger de propositions d’épargne-pension. On écoule ces formules, qui sans stimulus financier n’ont aucune justification économique, sous le prétexte « ne comptez pas sur l’état pour votre pension ».

On exploite le vieillissement pour miner le système de répartition légal. Avec les simulations récentes, cet argument disparaît définitivement. Personne ne peut encore prétendre que les pensions légales sont intrinsèquement impayables, ce qui est incontestablement positif pour le débat sur les pensions.

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