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Des microplastiques détectés dans des selles humaines

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Une étude à petite échelle suggère que les minuscules particules de plastique se répandent dans la chaine alimentaire humaine… et donc dans notre organisme.

Pour la première fois, des microplastiques ont été détectés dans des selles humaines. Les chercheurs ont demandé à huit adultes originaires d’Autriche, de Grande-Bretagne, de Finlande, d’Italie, des Pays-Bas, de Pologne, de Russie et du Japon de tenir un carnet de bord alimentaire durant une semaine. Ils ont ensuite prélevé une partie de leurs selles. Toutes les personnes engagées dans le test ont mangé des produits conditionnés dans des emballages en plastique et des boissons dans des bouteilles en plastique. Aucun d’entre eux n’était végétarien.

Résultat : jusqu’à neuf plastiques différents ont été trouvés, dans des particules allant de 50 à 500 micromètres. Le polypropylène et le polytéréphtalate d’éthylène étaient les plastiques les plus fréquemment présents. En moyenne, 20 particules de microplastique ont été trouvées dans chacun des 10g d’excréments. L’équipe n’a pas pu relier les particules plastiques au type d’aliments que les sujets ont ingurgité.

Ce qu’on considère comme des « microplastiques » sont des particules de moins de 5mm, dont certaines sont créées pour être utilisées dans des produits comme les cosmétiques. D’autres sont obtenues par la décomposition de plus gros morceaux de plastiques, souvent dans un milieu marin.

« Préoccupant »

L’Agence autrichienne pour l’Environnement a effectué les tests en utilisant un nouveau procédé qui, selon les chercheurs, jette un nouvel éclairage sur la présence et l’étendue des microplastiques dans la chaine alimentaire. « Il s’agit de la première étude de ce type et elle confirme ce que nous soupçonnons depuis longtemps, à savoir que les plastiques finissent par atteindre l’intestin humain. Ce que cela implique pour nous, et en particulier pour les patients souffrant de maladies gastro-intestinales, est particulièrement préoccupant », insiste Philipp Schwabl, chercheur à l’université de médecine de Vienne et meneur de l’étude.

Des microplastiques détectés dans des selles humaines
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Sur base de cette étude, les auteurs estiment que « plus de 50% de la population mondiale pourrait avoir des microplastiques dans ses selles ». Ils soulignent cependant la nécessité d’études à plus grande échelle pour confirmer cette estimation. « Les plus petites particules microplastiques sont capables de pénétrer dans la circulation sanguine, le système lymphatique et peuvent même atteindre le foie. Maintenant que nous avons les premières preuves de microplastiques à l’intérieur de l’être humain, nous avons besoin de davantage de recherches pour comprendre ce que cela signifie pour la santé humaine », poursuit Schwabl. Les particules de plastique présentes dans l’intestin pourraient affecter la réponse immunitaire du système digestif ou faciliter la transmission de substances chimiques toxiques et d’agents pathogènes, craignent les chercheurs.

Plastique omniprésent

Ce n’est pas la première étude qui tire la sonnette d’alarme sur les conséquences de l’utilisation massive des plastiques, rappelle The Guardian. De précédentes études sur les poissons ont identifié des plastiques dans l’intestin. Des microplastiques ont également été trouvés dans l’eau de robinets partout dans le monde, dans les océans et dans l’organisme de certains insectes volants. Une récente enquête menée en Italie a aussi relevé la présence de microplastiques dans les boissons gazeuses. Chez les oiseaux, on a constaté que l’ingestion de plastique perturbait l’absorption de fer et augmentait le stress sur le foie…

Des microplastiques détectés dans des selles humaines
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L’utilisation du plastique est si répandue dans la vie moderne qu’il serait extrêmement difficile de l’éliminer complètement de la chaine alimentaire. Selon The Guardian, un million de bouteilles en plastique sont achetées dans le monde chaque minute. Et ce chiffre devrait encore augmenter de 20% d’ici 2021. Les auteurs de la nouvelle étude soulignent la nécessité de réduire l’utilisation du plastique, d’accroitre le recyclage et d’améliorer son élimination quand le cas se présente. La pression, notamment politique, ne cesse de croitre en ce sens. Début de l’année, le Parlement européen a voté en faveur d’une interdiction des microplastiques dans les cosmétiques à l’échelle européenne. La Commission européenne a également proposé d’interdire les produits en plastique à usage unique (paille, coton-tige…). De nombreux pays ont par ailleurs interdit complètement les sacs en plastique. Les critiques trouvent cependant que ces mesures sont trop tardives et insuffisantes pour faire face à un problème de cette ampleur.

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