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Compléments alimentaires : produits miracles ou arnaque?

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Vitamines, sels minéraux, oméga-3… Les compléments alimentaires ont la cote en Belgique. Mais leur utilité reste controversée. Enquête sur un marché très lucratif.

La vogue des compléments alimentaires a traversé l’Atlantique. Le marché belge, surtout, a le vent en poupe : une croissance enviable de 5,5 % l’an, supérieure à la moyenne enregistrée ces cinq dernières années (3,6 %), avec un chiffre d’affaires de 370 millions d’euros annuels. Les quelque 600 firmes belges concernées emploient, directement ou indirectement, 30 000 personnes. « En termes de recherche et de développement, c’est un secteur très dynamique, constate le Dr Philippe Mortier, directeur-général au SPF Santé publique. Les produits sont fabriqués soit par des PME spécialisées dans les compléments alimentaires, soit par des firmes pharmaceutiques qui font aussi des médicaments. Chaque année, 3 500 nouveaux compléments alimentaires sont validés par nos services, voire le double si l’on prend en compte les modifications de produits existants. Au début des années 2000, nous n’avions qu’un millier de reconnaissances par an. » Au total, quelque 30 000 vitamines, plantes et autres compléments figurent aujourd’hui dans la base de données des produits reconnus par le ministère, consultable sur le site www.sante.belgique.be/

En Belgique, les compléments alimentaires relèvent du secteur agro-alimentaire et non du secteur du médicament. Le consommateur qui pousse la porte d’une pharmacie pour acheter un complément prédosé ne s’en rend pas forcément compte. « L’étude que nous avions réalisée, fondée sur l’analyse d’une soixantaine d’échantillons achetés en 2007, avait révélé que 30 % des compléments alimentaires vendus en Belgique n’avaient pas obtenu l’autorisation officielle, dénonce le Pr Marie-Louise Scippo, professeur à l’ULg et coordinatrice d’un projet consacré aux effets des compléments alimentaires sur la santé (toxicité éventuelle, interactions possibles avec des médicaments). Des produits commercialisés chez nous échappent donc à la règle de la notification. Rien n’indique d’ailleurs, sur les emballages des compléments alimentaires, qu’ils ont été validés par les autorités. »

Des vitamines et minéraux surdosés en provenance des Etats-Unis ou des Pays-Bas sont vendus en Belgique sous le manteau. Par ailleurs, certains compléments dont le dosage dépasse les limites autorisées font l’objet de demandes de dérogation auprès du SPF Santé publique, ce que le ministère reconnaît volontiers. Autre constat : la vente en ligne de produits non garantis par les autorités sanitaires. Près de la moitié des achats se feraient désormais via Internet. D’où, des risques liés à la composition du produit et aux allégations mentionnées sur les boîtes. « Trop de gens se fient au bouche-à- oreille, à l’avis de proches qui vous disent que tel ou tel complément alimentaire lui fait du bien », se désole le Pr Marie-Louise Scippo. Un principe : ne jamais donner de compléments alimentaires à un enfant sans l’avis du médecin et, pour tous, s’abstenir d’une automédication chronique.
Selon certaines études, les antioxydants à dose quotidienne élevée augmenteraient de 5 % le risque de mortalité. Le fer consommé en grande quantité augmenterait le risque de certaines maladies cardiaques et hépatiques. Pour les fumeurs, il y a un risque accru de cancer en cas de prise de béta-carotène. Et les interactions entre compléments alimentaires et médicaments ne sont pas à négliger.

En Belgique, le complexe multivitaminé contre la fatigue ou pour donner de l’énergie en vue d’un effort prolongé était le complément alimentaire-type prescrit il y a une vingtaine d’années. Mais la tendance actuelle est plutôt aux compléments mono-composés, destinés à combler des déficits nutritionnels et fonctionnels. Aujourd’hui, le magnésium, le calcium, les oméga-3, les probiotiques et les compléments à base de plantes sont des produit-phares du marché. En pharmacie, les compléments alimentaires les plus demandés restent tout de même ceux qui visent à répondre à un état de fatigue ou à un besoin d’énergie, puis viennent les produits dits amaigrissants, sensés couper l’appétit ou brûler des graisses. Les compléments pour le confort intestinal occupent la troisième marche du podium. Suivent les anti-stress.

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine, avec :

Utiles ou non ? Un produit pour les bobos ? Le marché belge : 300 millions Les stars du marché

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