© Getty Images/iStockphoto

Comment l’anxiété trompe nos relations sociales

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Quand nous sommes anxieux, nous avons plus de difficultés à lire et comprendre les émotions de nos interlocuteurs, affirment des chercheurs qui publient leurs résultats dans la revue Royal Society Open Science.

Les difficultés d’interprétation des expressions faciales ont déjà été liées à un certain nombre de troubles psychiatriques. De même que les personnes anxieuses ont plus tendance à être sensibles à des visages qui représentent un sentiment de peur. Cependant, il n’était pas clair si de tels effets existaient chez les personnes qui vivent une situation qui déclenche l’anxiété. « Nous avons essayé de répondre à cette question : comment notre niveau actuel d’anxiété influence notre manière de voir le monde, en particulier les émotions sur les visages ?« , explique Marcus Munafò, professeur de psychologie biologique à l’université de Bristol et co-auteur de l’étude repérée par The Guardian.

Anxiété induite et inquiétude naturelle

Pour répondre à cette question complexe, les scientifiques ont analysé l’impact d’une situation induisant l’anxiété sur les participants. Ces derniers devaient tenter d’interpréter les expressions faciales d’autres personnes. Concernant le profil des sujets, ils n’avaient pas de trouble anxieux sérieux, mais une tendance générale, comme beaucoup d’entre nous, à s’inquiéter pour des situations variées. Pour cette expérience, ils avaient un masque sur le visage, diffusant tantôt de l’air normal, tantôt de l’air enrichi en dioxyde de carbone : cette technique permet d’induire l’inquiétude et la tension, ainsi que d’augmenter les pulsations cardiaques et la pression artérielle.

L’expérience s’est menée en deux étapes. Dans la première, les participants devaient deviner sur les visages six émotions : la colère, la tristesse, la surprise, le dégoût, la peur et le bonheur. Dans la deuxième, on leur a montré des images d’émotions entre les deux extrêmes (colère et bonheur) et on leur a demandé de juger l’expression faciale.

Absorption des ressources cognitives

Après avoir ajusté les facteurs (âge, sexe, niveau général d’anxiété…), les chercheurs ont pu dégager le résultat suivant : lorsque les participants ont inhalé de l’air riche en dioxyde de carbone, ils identifiaient moins précisément (-8%) l’émotion du visage. Un résultat peu étonnant pour Munafò : « Nous savons que l’anxiété peut absorber les ressources cognitives et il n’est donc pas surprenant que nous observions ce type de déficit général« . Les participants étaient également plus enclins à trouver de la colère que du bonheur sur le visage de leurs interlocuteurs lorsqu’ils étaient soumis au sentiment d’anxiété.

Sur un questionnaire en ligne destiné à un panel plus large, le résultat était similaire : plus le niveau d’anxiété était élevé, moins les sujets étaient attentifs à la reconnaissance des émotions faciales. Cependant, il se pourrait que l’anxiété induite puisse être liée de manière différente à l’interprétation des émotions que l’anxiété naturelle, déclare Munafò avec prudence, arguant que la découverte doit être reproduite et poursuivie pour prolonger les premiers résultats de l’étude.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire