© Getty Images/iStockphoto

Bientôt de la « viande de laboratoire » dans nos assiettes?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Les États-Unis ouvrent la voie à la commercialisation d’aliments  » de laboratoire « , dont de la viande. Présentés comme alternative à l’élevage industriel, ces produits artificiels représentent-ils l’avenir de l’alimentation ?

De nombreuses start-up, notamment américaines, se sont lancées récemment dans la production d’aliments « de laboratoire ». Un cas particulier : la viande conçue à partir de cellules animales. Concrètement, ces cellules sont prélevées sur des bovins ou des volailles au stade de la différenciation cellulaire et développées ensuite hors de l’animal afin de pouvoir être introduites dans le processus de production.

Peut-on encore parler de « viande » ?

« Avoir de la viande sans tuer d’animaux » : voilà comment les entreprises présentent leurs produits. Mais pourquoi produire de la viande en laboratoire ? Présentée comme une source de nourriture alternative, cette nouvelle technologie alimentaire pourrait changer durablement le système de production de la viande. Selon les chiffres de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), environ 60 milliards d’animaux ont été tués pour leur viande en 2016. Avec la demande croissante, le chiffre est estimé à 110 milliards par an d’ici 2050. Les partisans de cette technique jugent en outre que cela permettra de limiter les gaz à effets de serre et l’utilisation de ressources naturelles, ainsi que d’éviter la souffrance animale. De plus, si les coûts parviennent à être réduits et accessibles, cela nourrira une population de plus en plus nombreuse.

Bientôt de la
© Getty Images/iStockphoto

Des plats de viande fabriqués à partir de cellules devraient donc bientôt rejoindre le circuit alimentaire. Mais le produit peut-il encore être considéré comme de la « viande » et se faire appeler comme telle ? L’administration américaine reste encore floue sur ce point qui divise certaines associations représentant les agriculteurs et les partisans de produits alternatifs. L’Association des éleveurs bovins américains (USCA) notamment se bat pour que le mot « viande » soit réservé à la chair d’un animal né, élevé et abattu de façon traditionnelle.

Quel contrôle pour ces produits issus de laboratoires ?

Les entreprises, américaines, israéliennes ou encore néerlandaises, qui produisent ces aliments s’affairent désormais à en abaisser les coûts de production. Ce dernier reste en effet très élevé, rendant une commercialisation immédiate et grand public encore impossible pour l’instant. Certaines start-up sont en outre soutenues financièrement par des géants de l’industrie agroalimentaire.

Bientôt de la
© Getty Images/iStockphoto

Pour que cette future commercialisation soit possible après réduction des coûts, l’administration américaine a dévoilé un cadre réglementaire qui ouvre la voie à la vente de ces aliments « artificiels ». Si les États-Unis n’ont jamais envisagé de ne pas ouvrir le marché à ce type de produits, ils devaient surtout déterminer qui allait les contrôler : le ministère de l’Agriculture ou l’agence en charge de la sécurité alimentaire ? Les deux agences se partageront finalement sa supervision, après une conférence publique le mois dernier sur « la régulation nécessaire pour à la fois encourager ces produits alimentaires innovants et maintenir les normes de santé publique les plus strictes ». L’administration n’a en outre pas estimé que cela nécessitait une loi spécifique.

Les consommateurs sont-ils prêts, même chez nous ?

Dans un article de 2015 publié par Sciences et Avenir, Jean-François Hoquette, directeur de recherche sur les herbivores à l’Inra de Clermont-Ferrand, jugeait les consommateurs encore peu réceptifs à ces produits : « d’après des études d’acceptabilité que nous avons menées en France, en partenariat avec la Belgique et l’Australie, la réaction des consommateurs vis-à-vis de ce type de produit est pour l’heure majoritairement de l’ordre de la répulsion en raison de son artificialité. Il faudra donc probablement plusieurs générations pour que la viande artificielle s’impose réellement sur le marché ».

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire