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A la fin de sa vie, on est souvent gavé de pilules

Muriel Lefevre

Les résidents des maisons de repos avalent jusqu’à 18 comprimés par jour, soit 126 par semaine. Un gavage souvent inutile puisque la plupart de ces médicaments servent simplement à contrecarrer les effets secondaires d’autres médicaments.

Quelle quantité de médicaments les gens prennent-ils à la fin de leur vie ? Kristel Paque, de l’unité de recherche pour les soins palliatifs de la VUB-UGent et de l’Institut Heymans de pharmacologie s’est penchée sur la question en étudiant l’utilisation des médicaments dans des centaines de maisons de repos. « Nous avons examiné dans quelle mesure la consommation de médicament augmente ou diminue en fin de la vie, quels sont les médicaments effectivement prescrits et si leur utilisation n’était pas inappropriée », dit-elle dans De Morgen.

La première conclusion est que les résidents des maisons de repos sont trop souvent gavés de médicaments. Ils peuvent prendre jusqu’à 18 comprimés par jour (avec une moyenne de 8 à 9), ce qui représente jusqu’à 126 par semaine. Pour elle, c’est beaucoup trop. « Surtout quand on sait que certains ne servent qu’à supprimer les effets secondaires d’autres médicaments ». Pour compléter son étude, elle s’est également penchée sur les patients qui étaient en phase terminale d’un cancer. Son étude montre que les patients atteints de cancer prennent jusqu’à 13 comprimés par jour (7 en moyenne), soit jusqu’à 91 comprimés par semaine.

La forte dose, même quand cela ne sert plus à rien

Plus déroutant encore, elle a constaté que, dans les deux cas, on ne baisse pas le nombre de médicaments une fois qu’il est clair qu’une personne n’a plus longtemps à vivre. Ce serait même plutôt le contraire. Forte de ce constat, Paque lance un appel aux médecins pour qu’ils osent bousculer leurs habitudes. Avant de prescrire aveuglément, ils devraient pouvoir se demander s’il est, par exemple, utile d’imposer encore une lourde chimiothérapie avec de très désagréables effets secondaires à quelqu’un qui est en fin de vie. Selon elle, les médecins devraient davantage mettre l’accent sur le confort plutôt que sur la « guérison et les bienfaits à long terme ». Soit ajuster la pharmacopée pour distinguer le nécessaire du superflu et la limiter aux médicaments strictement nécessaires pour que les patients se sentent mieux et puissent profiter au maximum des mois ou des semaines qui leur restent.

Une démarche plus compliquée qu’il n’y paraît

Le vrai problème, c’est qu’il n’existe pas suffisamment d’étude sur l’action des médicaments sur les personnes en fin de vie et c’est donc souvent le flou qui domine. Le processus décisionnel est encore compliqué par le fait qu’il est pratiquement impossible de déterminer avec exactitude combien de temps une personne vivra tant chaque patient est différent. Eliminer, ou non, un médicament est dès lors une décision difficile pour les médecins qui naviguent à vue.

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