Serge, par Yasmina Reza, Flammarion, 240 p.

Yasmina Reza?

C’est une famille dysfonctionnelle presque comme les autres, avec ses petites rancoeurs, ses non-dits, ses névroses. Une famille juive aussi, qui doit donc composer avec la mémoire encombrante de la Shoah et des traditions. A la suite du décès de leur mère, qui n’a pas supporté de passer du lit matrimonial à un lit médicalisé, Jean, Serge et Nana se retrouvent orphelins. Ils ont atteint cet âge charnière où les corps s’affaissent et le coeur balance entre souvenirs cotonneux, regrets amers et anxiété à l’approche de la mort.

« De temps en temps, je pense à mon père et me vient une sorte d’attendrissement. Il est possible que ce soit encore une de ces nostalgies de soi-même et du temps révolu », s’interroge avec lucidité et autodérision Jean, narrateur et chroniqueur de cette tragi-comédie grinçante. Comme à son habitude, l’auteure du Dieu du carnage pétrit sa pâte dans la farine de l’humour. Une manière d’échapper au pathétique de la condition humaine. De lui rendre un peu de légèreté.

Elle n’hésite pas à semer des éclats de rire là où c’est théoriquement inapproprié, voire banni. Comme à Auschwitz et Birkenau, où le trio s’est rendu de mauvaise grâce. La déception n’en est pas moins de taille. Surtout pour les deux hommes. Ils attendaient au minimum un séjour initiatique, ils découvrent un parc d’attractions macabre transformé en spot Instagram. « Une parcelle de limbes réorganisée pour le visiteur contemporain. »

Avec Serge le flambeur, le provocateur en point de mire, les scènes loufoques et parfois croustillantes s’enchaînent. Mais sans véritable liant. A croire que Yasmina Reza, toute à son étude de caractères, en a oublié d’installer l’échafaudage d’une intrigue qui ferait tenir toutes les pièces de la maison Popper ensemble.

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