L'Echelle de Jacob, par Ludmila Oulitskaïa, trad. du russe par Sophie Benech, Gallimard, 624 p.

xxe siècle russe

Ceci n’est pas (seulement) un roman. Objet sans genre littéraire assigné, à mi-chemin de l’autofiction et de l’autobiographie familiale, le nouveau livre de Ludmila Oulitskaïa, L’Echelle de Jacob, s’empare, comme tous les précédents ouvrages de l’auteure, d’une question à la fois redoutable et inesquivable : celle de l’identité russe au xxe siècle. Dans la malle laissée par sa grand-mère Maroussia, féministe avant la révolution de 1917, danseuse et communiste ardente, Nora – alias de l’auteure – a exhumé les 500 lettres que celle-ci a échangées, avant la Première Guerre mondiale, avec Jacob, son futur mari, envoyé en Sibérie sous l’accusation de sabotage. Ludmila Oulitskaïa s’empare de ces reliques et reconstitue le puzzle de la vie de son grand-père Jacob Ossetski. Il est juif, d’extraction plutôt modeste et furieusement idéaliste. Il est l’un de ces innombrables militants qui porteront sur la scène du monde les utopies de 1917. Jacob aime – follement – Maroussia. Néanmoins, cet amour, enflammé et fugace, ne survivra pas aux épreuves. Pourquoi Jacob a-t-il finalement rompu avec la femme qu’il a aimée ? Glissant d’une époque à une autre, de leur vie révolutionnaire à sa vie à elle, narrant comment elle a envoyé son propre fils en Amérique pour le soustraire à la guerre en Tchétchénie, dans les années 1990, Oulitskaïa, dans sa quête mémorielle, convoque page après page les grandes étapes de l’histoire de la Russie au xxe siècle, une Russie à la fois égarée, invincible et terriblement attachante. Un chef-d’oeuvre d’intelligence et de sensibilité – dans la veine  » tchékhovienne  » qu’on connaît à Ludmila Oulitskaïa.

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