Une criminelle  » irréprochable « 

Une année noire. 2008 se termine comme elle a commencé. Ce 8 décembre a débuté, à la cour d’assises du Brabant wallon, le procès de Geneviève Lhermitte, qui a assassiné ses cinq enfants. Elle risque la réclusion à perpétuité. Elle a fait preuve d’une perversité incroyable, avec sang-froid. En même temps, elle se présente comme une femme sous influence, victime prostrée d’un homme brutal. Même si son époux, Bouchaïb Moqadem, réfute, lui, tout fait de violence.

Geneviève a cru un temps au prince charmant, à l’amour fusionnel qui devait réparer une enfance malheureuse : une période de  » torture « , selon son témoignage. Mais elle a vite déchanté. Il y a toujours eu un tiers dans son ménage : un  » père adoptif « , le Dr Schaar, qui entretenait une famille comme d’autres une maîtresse. Elle a dû vivre d’expédients et d’arrangements peu clairs. Issue de la classe moyenne inférieure, elle n’y était pas préparée : Geneviève était enseignante de formation. Femme effacée, jusque-là sans casier judiciaire, elle voulait être une mère modèle. Mais elle n’a réussi qu’en prison à prendre ses distances avec ce mari qui lui imposait cette vie de dépendance.

Cette histoire rappelle d’autres cas, fussent-ils très différents. Voici onze mois, en janvier, paraissait le livre de Nicole Malinconi : Vous vous appelez Michelle Martin (Denoël). Le 27 mars, à Charleville-Mézières (France), comparaissait Monique Olivier, au côté de Michel Fourniret, pour complicité dans sept homicides et viols de jeunes filles. Michelle Martin a été condamnée à trente ans d’incarcération ; Monique Olivier, à la perpétuité. Si dérangeant que cela puisse paraître, on est frappé par les traits communs entre ces trois criminelles, qui présentaient, à la fois, un profil de monstre et de femme victime, battue.

C’est ce contraste entre ces femmes presque  » transparentes  » et leurs actes indescriptibles qui est sans doute le plus grave. Geneviève a dit ne pas comprendre ce qu’elle avait fait. Elle n’est pas la seule. Peu d’études ont été réalisées sur les femmes criminelles. Les experts s’étripent sur leur personnalité complexe. Par le passé, beaucoup de mères infanticides ont été jugées irresponsables de leurs actes et internées. Dans le cas de couples diaboliques, il n’est pas rare que la femme ait été écartée de la procédure ou acquittée. La société répugne à admettre que des mères, censées incarner l’amour inconditionnel, puissent reprendre la vie comme elles la donnent. Pourtant, les criminologues doivent dépasser les tabous et approfondir leurs recherches en la matière. Il faut oser aussi regarder la monstruosité féminine en face.

de dorothée klein, Rédactrice en chef

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