Une coûteuse opération

Grâce à Laurette Onkelinx et à son plan B, la Flandre dispose maintenant d’une version de Bye-bye Belgium. On peut en tirer les leçons suivantes. La scission du pays est certes possible, mais : 1. Elle coûtera beaucoup d’argent ; 2. Cela prendra beaucoup de temps ; 3. Elle ne sera viable que pour la seule Flandre. Peuplée de 6 millions d’habitants, la Flandre a suffisamment de densité pour mener une existence indépendante. La Wallonie connaîtrait beaucoup plus de difficultés et Bruxelles ne s’en sortirait pratiquement pas. J’admets que Bruxelles souhaite devenir un petit pays, avec son million d’habitants vivant sur un territoire trop exigu. Mais elle serait forcée de s’associer à un partenaire plus fort qu’elle pour assurer la sécurité sociale à ses ressortissants.

Ceux qui pensent qu’on pourrait scinder le pays par une simple déclaration, suivie du partage des biens et des dettes, sont passablement naïfs. Des dizaines de traités devront être conclus entre les nouvelles républiques (ou nouveaux royaumes). Les Tchèques et les Slovaques ont dû produire 22 000 pages de textes légaux et ils ne furent même pas confrontés à un phénomène aussi compliqué que Bruxelles, l’unique c£ur de jumeaux siamois, la Flandre et la Wallonie. Nous devrons nous préparer à des négociations plus difficiles et plus longues que celles susceptibles de déboucher sur une réforme de l’Etat. Il faudra compter facilement cinq à dix années de palabres (comme en 1830, jusqu’en 1839).

Vu que toute séparation coûte de l’argent, celle-ci sera inévitablement très onéreuse. La riche Flandre n’y échapperait pas. Les Flamands estiment que les 6 à 7 milliards de transferts vers le Sud s’évaporeraient et que la Flandre disposerait ainsi de moyens plus importants. C’est une erreur. Les transferts sont pour une large part des allocations individuelles, la Flandre devrait donc obtenir un accord sur la fixation d’une période de transition progressive. Celle-ci sera longue : dix, quinze années, même plus. Les frais augmenteraient en même temps. Le Pr De Grauwe de la KULeuven avance le chiffre de 2 milliards de dépenses supplémentaires que la République de Flandre devrait assumer en charges d’intérêts. En effet, le taux d’intérêt appliqué pour financer la dette publique serait plus élevé. Si, en plus, la République bruxelloise se mettait à imposer les dizaines de milliers de navetteurs flamands, la Flandre recevrait encore 1 milliard d’euros en moins. Au total, cela ferait 3 milliards sur un budget flamand de quelque 30 milliards – après la réalisation de la réforme de l’Etat. Les ménages flamands seraient alors mis à contribution pour trouver ces 10 % du budget. Une opération coûteuse. Mieux vaudrait réfléchir à deux reprises avant de s’y lancer.

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LUC VAN DER KELEN

En cas de scission, il faut compter facilement cinq à dix années de palabres

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