TÉMOIGNAGE

« Je ne suis pas contre l’adoption. Mais il faut cesser de l’idéaliser et apporter un soutien aux parents adoptants. »

Christian Demortier, auteur de Adopté dans le vide (éd. Le Sarment, chez Fayard), arrive en Belgique, en 1968, à l’âge de deux ans et demi. Il est originaire de Pondichéry, en Inde. Ses parents adoptifs travaillaient bénévolement dans un organisme d’adoption, ce qui avait permis d’accélérer leurs démarches. Fervents catholiques, ils désiraient faire, selon Christian, une bonne action. Ils avaient déjà un garçon.

A l’arrivée du petit adopté, le climat familial se dégrade rapidement. L’enfant débarque d’Inde quasi mourant. Certes, sa mère le soigne avec attention. Mais elle est débordée par ses problèmes. Elle est battue par un mari infidèle qu’elle soutiendra pourtant même lorsqu’il sera malade. Atteint de sclérose en plaques, le père mourra finalement d’un infarctus. Mais, auparavant, il se sera livré à des attouchements sexuels sur Christian, dès l’âge de 5 ans.

Dans ce contexte, l’enfant supporte mal des réflexions comme: « Tu as de la chance », ou « N’oublie pas qu’on t’a sauvé la vie. » Christian se réfugie dans les études. A l’école, il est toutefois brocardé pour des attitudes un peu féminines à l’égard de ses compagnons. A l’adolescence, il essuie, en outre, de plus en plus d’insultes racistes.

Christian commence alors à se passionner pour son pays d’origine. A 26 ans, une licence en communication et sciences sociales en poche, il s’y rend pour enseigner le français. Il retrouve la crèche où il a été recueilli, ainsi qu’une religieuse et une puéricultrice qui s’étaient occupées de lui. Le choc. « J’ai retrouvé une partie de mes racines: les odeurs, les rires, les sensations, les caresses… Bref, cette tendresse qui m’avait tellement manqué pendant mon enfance. J’ai été ébloui par la beauté, la grâce et le raffinement des Indiens, par tout ce qu’on m’avait « volé » en m’adoptant. Mais je n’étais plus indien. » Tiraillé entre deux cultures, Christian est finalement rentré en Belgique. Mais son sentiment de « vide identaire » est-il vraiment à mettre sur le compte de son passé d’enfant adopté, comme il le répète ou sur celui d’un jeune maltraité, comme peuvent l’être aussi des fils et filles biologiques?

D.K.

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