Tant va la cruche à l’eau…

Vincent Genot
Vincent Genot Rédacteur en chef adjoint Newsroom

Le groupe de hackers probablement le plus actif de la scène francophone belge, The Belgian Hackers Zone (BHZ) vient de subir un sérieux revers. Un raté qui pourrait bien voir la disparition du groupe

Dans la vie du pirate informatique belge, le début du mois de décembre est généralement une période creuse. Examens obligent, le hacker francophone (du côté néerlandophone, les pirates semblent plus âgés) passe son temps à revoir la matière scolaire du premier trimestre. Une révision qui laisse généralement peu de temps à la bricole informatique… Si cette anecdote, à la limite de l’étude comportementale, paraît légère, voir péjorative pour ces pirates, elle n’en demeure pas moins vraie. Agés de 15 à 17 ans et très loin de l’image des dangereux pirates capables de paralyser le Net, la majorité des membres de la BHZ (voir Le Vif/L’Express du 23 mars 2001) suivent une scolarité plus qu’honorable dans le cycle secondaire.

C’est le cas pour Asmodeus et Flat Eric (pseudos), les deux membres fondateurs de la BHZ qui, le 7 dcembre dernier, ont eu la désagréable surprise de voir débarquer au domicile familial les membres de la Federal Computer Crime Unit (FCCU), la police spécialisée dans les délits informatiques. Une visite inattendue pour Asmodeus. En mars dernier, convaincu de son impunité, il nous expliquait que « si personne n’avait encore vu de hacker se faire arrêter, c’est parce que la FCCU ne ciblait pas les bonnes personnes ». « Une assurance fatale au groupe », explique un ex-membre de la BHZ. Un constat confirmé par la police. Elle a réussi à remonter jusqu’à Asmodeus en partant d’un message déposé par celui-ci dans un site d’enchères. « Avec ce message, nous tenions un brin de laine. En tirant dessus, nous n’avons éprouvé aucun mal à débobiner l’entièreté de la pelote », confie un enquêteur. On est donc loin, comme l’imagine Asmodeus, d’une balance qui aurait donné le groupe suite à des dissensions apparues au sein de celui-ci en mars dernier.

Motif de la descende de la FCCU? Une plainte déposée en janvier dernier par les Archives générales du royaume dont le site Internet fut défacé (néologisme inspiré de l’anglais) en début d’année 2001 par la BHZ. Cela consiste dans remplacement de la page d’accueil du site par un message signalant à son administrateur qu’il présentait des failles de sécurité ( voir illustration). Rien de dramatique donc (aucun dommage réel), mais un acte suffisamment répréhensible pour tomber sous le coup de la nouvelle loi sur la criminalité informatique. Outre la confiscation de leur matériel informatique, les deux pirates, – qui risquent également des poursuites pour des infractions commises sur des infrastructures téléphoniques -, ont dû subir un interrogatoire en bonne et due forme avant d’être remis en liberté. L’interrogatoire a permis à la FCCU de mettre la main sur la totalité des adresses des membres de la BHZ et de procéder, lundi, à une nouvelle arrestation, en la personne de Nada, l’actuel webmaster du groupe. Le reste de l’équipe (trois personnes) était simplement convoqué par la police, à la fin des examens scolaires, afin de pouvoir poursuivre certains devoirs d’enquête. Dans le pire des cas, celle-ci pourrait déboucher sur une peine d’emprisonnement de 1 à 3 ans et/ou à une amende de 1000 à 2 millions de francs. Une extrémité que l’on n’atteindra pas dans ce dossier où les parents (les pirates étant mineurs) n’échapperont toutefois pas au paiement de dommages et intérêts, pour autant que l’enquête ne révèle pas d’autres types d’infractions. Ce ne sera sans doute pas le cas, Asmodeus ayant plus le profil du passionné d’informatique à la recherche de défis techniques que du pirate vénal. Il serait donc dommage, comme nous le signalait un enquêteur de la FCCU assez impressionné par la connaissance technique d’Asmodeus,  » que le bon potentiel de ces jeunes soit brimé par de trop lourdes sanctions « . En cas de procédures plus avancées, Asmodeus pourra toujours compter sur les bons offices de son papa avocat.

Vincent Genot

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