La configuration géographique de Namur cause bien des difficultés en matière de trafic. © hatim kaghat

STI, trois lettres pour changer la mobilité à Namur

Pierre Jassogne
Pierre Jassogne Journaliste Le Vif/L’Express

Diminuer les embouteillages en ville grâce à un système de transport intelligent, telle est l’ambition de Namur. Une révolution pour les usagers, mais aussi pour la Wallonie, qui débarque en septembre.

Que ce soit en transports en commun, dans sa voiture ou sur son vélo, choisir le meilleur itinéraire pour traverser un centre-ville relève parfois du sacerdoce. Et Namur n’échappe pas à la règle.  » Par sa configuration géographique, la commune rencontre une série de difficultés en matière de trafic « , précise Stéphanie Scailquin, l’échevine CDH en charge de la mobilité. D’ailleurs, Namur a été classée comme la première ville wallonne la plus embouteillée – la troisième du pays, après Bruxelles et Anvers. Entre les travaux, les livraisons, les embouteillages ou les voitures garées en double file, les obstacles y sont nombreux. Le système de transport intelligent (STI) qui sera lancé le 23 septembre par la Ville devrait apporter des réponses concrètes pour faire face à ces difficultés et améliorer la mobilité sur le territoire communal. Depuis 2015, tous les acteurs concernés (police, TEC, SPW, Perex, Sofico…) ont participé à cette réflexion et à la mise en place de cet outil unique en Wallonie, qui s’inscrit dans la volonté de la ville de faire de Namur une smartcity.

Nous voulons aller plus loin que du simple routier connecté, en proposant une approche multimodale.

Avec ce système de transport intelligent, la cité mosane veut surtout être une pionnière en matière de mobilité. Il faut dire que la capitale wallonne a souvent eu une longueur d’avance.  » Dès la fin des années 1990, Namur était déjà à la pointe en matière de planification de la mobilité, avec notamment l’un des tout premiers plans communaux de mobilité de Wallonie, mais aussi un plan de stationnement et des boucles de circulation dans le centre-ville « , rappelle Michel Jehaes, chef du département des voies publiques et cheville ouvrière de ce projet au niveau communal.  » Mais vous pouvez avoir le meilleur plan de mobilité du monde, si des applications numériques vous donnent en temps réel d’autres itinéraires, cela peut vite créer des problèmes en matière de mobilité. Une ville comme Namur ne peut plus se contenter d’une vision stratégique à dix ans. Nous nous sommes rendu compte qu’il fallait d’autres mesures d’accompagnement des usagers dans leur quotidien. Raison pour laquelle nous avons investi dans cette mobilité connectée « , continue-t-il. Coût de l’opération : trois millions d’euros, financés dans le cadre du Fonds européen de développement régional.

Les principaux axes de pénétration de la ville ont été équipés de dispositifs de récolte de données de circulation.
Les principaux axes de pénétration de la ville ont été équipés de dispositifs de récolte de données de circulation.© dr

Prendre l’usager par la main

Les principaux axes de pénétration de la ville ont été équipés des dispositifs de récolte de données de circulation : des caméras avec reconnaissance des plaques, des panneaux d’information fixes ou mobiles, des capteurs de places de parking. En tout, ce sont 17 caméras de surveillance, 32 caméras de reconnaissance de plaques pour calculer le temps de parcours, 27 capteurs de parking… Toutes ces données seront centralisées et traitées par les services mobilité de la ville afin de donner une information fiable en temps réel aux usagers : temps de parcours d’un point A à un point B, incident entraînant un ralentissement de la circulation, places de parkings disponibles, calcul d’un itinéraire bis et recommandations de roulage, temps d’attente pour le prochain bus.

Ces informations seront alors affichées sur des panneaux installés aux endroits stratégiques : avant les sorties d’autoroutes, sur les voiries régionales et les boulevards ceinturant le centre-ville, et à chaque étape du parcours où l’info est pertinente. Les panneaux indiqueront en temps réel des informations relatives à la circulation ou au stationnement avec, par exemple, la disponibilité de places de parkings à proximité. L’automobiliste pourra ainsi choisir son itinéraire en fonction des conditions de trafic, l’adapter ou prendre un autre mode de transport que la voiture (bus ou vélo).

 » Si les capteurs décèlent un ralentissement chaussée de Louvain, le panneau placé avant la sortie d’autoroute relaie l’information automatiquement. Ce panneau pourra suggérer de laisser sa voiture au futur P+R de Bouge et descendre en ville en bus, ou encore de se reporter sur la chaussée de Hannut. Ce système permettra de prendre l’usager de la route par la main de A à Z « , explique encore Michel Jehaes. Une centaine de scénarios (Fêtes de Wallonie, Manifestation au parlement wallon, etc.) ont été imaginés pour le système afin de répondre au mieux aux besoins de la circulation locale.  » Nous voulons aller plus loin que du simple routier connecté, en proposant une approche multimodale « , continue le chef de département. Le but de ce système est en effet d’encourager les bonnes pratiques en matière de mobilité et les changements de comportement en privilégiant les transports en commun et les modes de déplacement doux.

Les arrêts de bus bénéficient d'une soixantaine de nouveaux écrans.
Les arrêts de bus bénéficient d’une soixantaine de nouveaux écrans.© dr

Alternatives crédibles à l’automobile

 » C’est un moyen de conscientiser les citoyens sur les alternatives à la voiture, en leur donnant toutes les clés possibles pour atteindre le plus facilement le centre-ville en bus ou en vélo, souligne Stéphanie Scailquin. Mais soyons clairs : l’objectif n’est pas d’empêcher les usagers de se rendre au centre-ville en voiture, mais bien de rendre le trafic plus fluide.  » Pour que ce système de transport intelligent prônant la multimodalité fonctionne , il sera accompagné d’infrastructures offrant des alternatives crédibles aux déplacements automobiles, notamment des parkings P+R situés sur les grands axes menant au centre Le P+R Saint-Nicolas sera ainsi bientôt rejoint par plusieurs autres parkings de dissuasion, notamment à Bouge et Erpent.  » Ils seront stratégiquement implantés en entrée de ville, à proximité des sorties d’autoroute ou d’autres axes majeurs « , ajoute Stéphanie Scailquin.

La Ville a aussi investi dans une soixantaine de nouveaux écrans aux arrêts de bus. Ils indiqueront en temps réel le temps d’arrivée d’un bus. Le système inclut également un relais de l’information sur le Web, permettant à l’usager de comparer le temps de parcours selon le mode de transport. A côté de la mobilité, ce système intelligent permettra de mesurer la qualité de l’air. Des microcapteurs placés en différents endroits en lien avec une station de contrôle de la qualité de l’air permanente permettront d’objectiver les résultats et de connaître la qualité de l’air en temps réel. Greenpeace avait d’ailleurs épinglé Namur parmi les villes dans lesquelles a été mesurée le plus haut taux de dioxyde d’azote. Avec le STI, la situation devrait bientôt s’améliorer.

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