Sculptures sur canapé

Une exposition confronte Rodin et Freud. Drôle d’idée ? Pas sûr : leurs routes se sont souvent croisées et leur passion commune pour l’art antique les aurait rapprochés. Analyse.

Sigmund Freud Les amis de l’un sont…

A Paris, Freud est l’invité des soirées du neurologue Jean-Martin Charcot, son maître, que Rodin fréquente aussi. A Vienne, le psychanalyste confie l’édition de plusieurs de ses £uvres à Hugo Heller, libraire et galeriste, qui exposa les dessins de Freud.

Le collectionneur

Passionné d’archéologie, discipline en vogue dans cette époque d’explorations, il admirait Heinrich Schliemann, qui découvrit des vestiges de Troie. Freud commence à collectionner à 40 ans. Les photos de son appartement viennois, projetées à l’exposition, montrent à quel point cette passion devint obsessionnelle. Sa bibliothèque, son bureau, son cabinet de consultation étaient envahis de statuettes et autres amulettes. Un spectacle étouffant, qui indisposait certains de ses patients. Elles influencèrent aussi ses recherches, car Freud se considérait comme le  » Schliemann de la psychanalyse « , fouillant la mémoire de ses patients, pour la faire resurgir par strates successives.

L’exposition

Buste de pharaon, stèle funéraire égyptienne, bandelette de momie, amulette romaine en forme de phallus, mais aussi vase grec et repose-pieds précolombienà une soixantaine de pièces provenant de la collection de Freud sont exposées, témoignant d’un goût éclectique certain. Sa correspondance dévoile également sa passion pour l’archéologie.

Auguste Rodin … les amis de l’autre

Le poète autrichien Rainer Maria Rilke fut le secrétaire de Rodin et consulta Freud, dont il fit la connaissance par son amie Lou Andreas-Salomé, femme de lettres et psychanalyste. L’écrivain Stefan Zweig admirait le sculpteur, qu’il voyait régulièrement, et entretenait une correspondance avec Freud.

Le collectionneur

De formation classique, Rodin commence par copier l’art gréco-romain au Louvre. Mais il ne se met à collectionner que tardivement, à 53 ans, engloutissant une grande partie de  » l’argent de la sculpture  » pour satisfaire sa passion. Il accumula quelque 6 000 pièces, qu’il répartissait entre l’hôtel Biron à Paris et sa demeure de Meudon, de l’atelier au salon, de la chambre au jardin.

L’exposition

Ephèbes, Vénus, déesses égyptiennes, fragments de statues antiquesà Rodin aime l’Antiquité telle qu’elle était transmise au xixe, c’est-à-dire morcelée. Cet esprit transparaît directement dans sa création, lorsqu’il modèle des corps tronqués, dépourvus de tête ou de bras, à l’image de cet Homme qui marche, datant de 1899. Rodin réalisa également de poétiques assemblages, alliant des coupes antiques à ses propres sculptures de corps de femmes.

La Passion à l’£uvre. Rodin et Freud collectionneurs. Musée Rodin, Paris (VIIe). Jusqu’au 22 février 2009.

Annick Colonna-Césari

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