Sarah, pied de nez de l’Histoire

L’hémorragie est arrêtée « , assuraient les stratèges républicains après le débat télévisé qui a opposé, jeudi 2 octobre, les deux candidats à la vice-présidence des Etats-Unis. A un mois de l’élection, la républicaine Sarah Palin a quelque peu rattrapé l’impression désastreuse qu’avaient laissée ses récents entretiens avec la star de CBS, Katie Couric. Elle s’y exprimait dans un anglais approximatif et répondait  » à côté  » des questions. Le camp républicain peut, du coup, se concentrer sur une offensive de la dernière chance. Le débat de mardi dernier – l’avant-dernier de la campagne – n’a pas permis à McCain de reprendre l’avantage sur Obama. ( lire en p. 45).

La performance honorable de Palin – même si elle a, depuis, laissé échapper quelques gaffes – n’a pas remonté le moral des féministes américaines. Celles-ci dénoncent, à juste titre, les remarques sexistes sur le physique de la candidate et les insinuations du genre :  » Il est impossible pour une jeune mère de cinq enfants d’assumer correctement un emploi très prenant.  » Sur le fond, cependant, elles savent que Palin dessert intensément leur cause. Là où Hillary Clinton misait sur ses compétences, son expérience, se plaçant donc sur le même plan que les hommes, Sarah Palin joue sur son charme et son identité de mère de famille. Un peu court aux yeux des féministes qui lui reprochent de renforcer la division traditionnelle des rôles. Sans compter que ses convictions – elle combat l’avortement et vante l’abstinence hors mariage en guise d’éducation sexuelle – menacent les droits des femmes à disposer de leur corps. Bref, par un étrange pied de nez de l’Histoire, Sarah Palin, si elle devenait la première vice-présidente des Etats-Unis, pourrait faire reculer la cause des femmes.

Plus près de nous, la Commission européenne pensait sans doute agir en faveur des femmes en proposant d’augmenter la durée du congé de maternité ( lire en p. 35). Formidable, à première vue. Sauf que les employeurs deviendraient alors encore moins enclins à embaucher des femmes et à leur confier des responsabilités. Bien sûr, un bébé a besoin de ses parents. Et encourager la natalité est, en Europe, absolument nécessaire. Pourquoi, dès lors, ne pas s’inspirer des systèmes en vigueur en Finlande et en Suède et adopter un congé parental de six mois, voire un an, partagé entre le père et la mère ? Aucun des deux parents n’aurait le droit de prendre plus de la moitié de ce congé et les semaines non prises seraient perdues. Parlez-en aux pères : ils sont enthousiastes.

Si elle veut vraiment promouvoir l’égalité des sexes, la Commission pourrait déjà proposer de supprimer, dans l’Union, la discrimination dans la transmission du nom des parents à leurs enfants. Et, par exemple, rendre obligatoire le double nom de famille. La Belgique reste accrochée au seul nom du père, ce qui lui vaut de se faire régulièrement tirer l’oreille par le Conseil de l’Europe – qui recommande l’égalité dans la transmission du nom depuis… 1978 ! Les symboles du patriarcat ont la vie dure. l

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