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Respirez tranquilles !

Le gazon synthétique utilisé pour les terrains de sport est beaucoup plus résistant que le gazon naturel… et les craintes quant aux éventuels effets sur la santé des granulés utilisés dans ces revêtements semblent infondées, comme l’ont démontré plusieurs rapports.

Alors que sur un terrain naturel, la pelouse est inexistante par endroits et compte de nombreux trous et bosses, le gazon artificiel, lui, offre une surface optimale quel que soit le temps. Sa grande régularité permet en outre une meilleure circulation du ballon et donc un rythme de jeu plus soutenu ! Seul bémol, la pelouse artificielle  » colle  » davantage aux crampons des chaussures, ce qui accroît la charge sur les genoux et les chevilles lors des mouvements de rotation. La crainte des brûlures de frottement en cas de dérapage semble par contre infondée et la régularité de la surface limite le danger de trébucher. Dans l’ensemble, le risque de lésion est donc plus faible sur gazon artificiel.

Émanations chimiques ?

Le gazon artificiel se prête bien à la pratique de sports comme le football ou le rugby, par exemple. Sur certains terrains, le revêtement se compose de longues fibres synthétiques et d’un matériau de remplissage – généralement des granulés de pneus recyclés, qui permettent de se rapprocher le plus possible de la qualité d’une pelouse naturelle. Un seul terrain contient environ 42 tonnes de ces petits morceaux de caoutchouc, soit l’équivalent de 7 000 pneus usés. Il existe bien des alternatives naturelles, comme le liège ou la fibre de coco, mais elles sont beaucoup moins utilisées.

Le 5 octobre 2016, une chaîne de télévision néerlandaise diffusait l’émission  » Gevaarlijk spel  » ( » Jeu dangereux « )1, qui épinglait le lien entre des cancers comme la leucémie et le carcinome thyroïdien et des substances nocives comme le zinc, le plomb, le benzène et les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) – des carcinogènes connus qui seraient notamment libérés par les fameux granulés de caoutchouc.

Aucune étude n'a jamais démontré le moindre lien entre les granulés et un éventuel risque de cancer.
Aucune étude n’a jamais démontré le moindre lien entre les granulés et un éventuel risque de cancer.© zembla.bnnvara.nl

Deux jours plus tard, l’institut de santé publique néerlandais RIVM s’est vu chargé d’investiguer la question. Il parvient toutefois rapidement à la conclusion (provisoire) que le gazon synthétique à granulés n’est pas dangereux pour la santé des joueurs2,3, les quantités de produits nocifs libérées étant très limitées : l’exposition aux HAP, par exemple, est environ 40 fois plus faible que celle qui est associée aux apports alimentaires. Une substance cancérigène comme le benzène ne se retrouve même pas du tout dans les granulés et aucune étude n’a jamais démontré le moindre lien entre ces derniers et un éventuel risque de cancer.

L’inquiétude des parents

Le 15 février 2017 est diffusée une seconde émission où Jacob de Boer, professeur à l’université libre d’Amsterdam, dévoile les résultats d’essais sur des poissons-zèbres et des embryons exposés à l’eau de rinçage des granulés fabriqués à partir de vieux pneus – un traitement qui semble avoir provoqué la mort des embryons et déclenché des changements de comportement chez les poissons4. L’expert recommande par conséquent de ne pas faire de sport sur des terrains artificiels contenant des granulés de caoutchouc, suscitant une vague d’inquiétude parmi les parents des petits footballeurs.

Suite à ce nouveau rebondissement, le RIVM a pris immédiatement contact avec le Pr de Boer. Il s’avère toutefois rapidement que ses allégations ne sont sous-tendues par aucune étude sérieuse publiée dans la presse scientifique (ce n’est d’ailleurs toujours pas le cas aujourd’hui) et que les tests limités qui ont effectivement été réalisés ne disent rien d’un éventuel risque chez l’homme5. Le 23 mars 2017, le RIVM publiait son rapport définitif, qui confirme ses conclusions préliminaires6.

La Belgique en émoi

Entre-temps, le dossier a fait des remous jusque dans notre pays et Philippe Muyters, le ministre flamand des Sports, a chargé ses services administratifs d’examiner la problématique7. Le 10 mars 2017 est ainsi formulé un premier avis belge – reposant sur les résultats d’une étude réalisée à la demande du quotidien flamand Het Belang Van Limburg – qui qualifie le risque de santé de  » négligeable « 8. Un peu moins d’un an plus tard, c’est au tour de Sport Vlaanderen de publier un rapport assez maladroit reprenant les recommandations du RIVM, étayées par des travaux complémentaires en provenance notamment de l’agence européenne des produits chimiques (ECHA), de la société publique des déchets en Région flamande (OVAM) et des universités flamandes9,10.

Dans son émission  » On n’est pas des pigeons  » du 31 octobre 2018, la RTBF remet sur la table tous les arguments déjà évoqués sur un ton sensationnaliste11. Quelques jours plus tard, un nouveau rapport rassurant est publié cette fois par l’Anses, l’agence nationale française de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail12.

Que peut-on retenir de tous ces rapports ? S’ils réaffirment la sécurité des gazons synthétiques, ils suggèrent néanmoins d’appliquer à l’avenir aux granulés de caoutchouc les normes de sécurité européennes pour les produits de consommation, qui sont de 100 à 1000 fois plus sévères que celles qui sont utilisées aujourd’hui… mais auxquelles environ 95 % des granulés présents sur les terrains de sport européen répondent déjà !

références www.bodytalk.be

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