Que doit-on aux générations futures ?

Imaginons l’arrêt de toutes les naissances, et mesurons les conséquences…

Une des idées le plus souvent répétées, sans, en général, qu’en soit comprise la portée, est de clamer la nécessité de prendre en compte l’intérêt des générations futures. Mais, en fait, ce n’est pas ainsi que nous nous comportons : nous vivons dans l’instant, sans nous inquiéter de laisser à ceux qui nous succéderont des dettes abyssales et un environnement pourri. Nous pensons, comme l’économiste britannique John Maynard Keynes, que seul compte le présent, parce que,  » à long terme, nous sommes tous morts « . Nous sommes en vérité tout aussi d’accord avec Groucho Marx, quand il s’interroge :  » Pourquoi devrais-je me préoccuper des générations futures ? Qu’ont-elles fait pour moi ?  »

Répondre à l’humour ravageur de Groucho Marx n’est pas simple, et conduit à l’essentiel : pour comprendre ce que nous devons aux générations suivantes, il nous faut imaginer un monde où elles n’existeraient pas. C’est-à-dire un monde où, à partir de la seconde précise où vous lisez ce texte, il n’y aurait plus, sur toute la planète, la moindre naissance. Nulle part. Sinon peut-être la naissance de tous les enfants déjà conçus.

Un tel choc aura des conséquences immédiates : la fin de tout projet familial, la fin de toute projection dans l’avenir. Et, accessoirement, la fermeture de toutes les maternités. Dans vingt ans, les conséquences seront bien plus terribles : environ le quart des humains d’aujourd’hui aura disparu ; les derniers jeunes entreront sur le marché du travail, on fermera toutes les écoles, tous les collèges, tous les lycées puis toutes les universités. A partir de ce moment, le nombre de travailleurs commencera à diminuer, irrémédiablement. Pendant que le climat continuera de se dérégler, le niveau de vie général baissera, inexorablement. Le financement des pensions de tous ceux, vivants aujourd’hui, qui seront alors à la retraite ne sera plus assuré ; on ne pourra pas plus budgéter les services publics. On refusera de rembourser les dettes, au détriment des prêteurs, ou bien ces derniers l’exigeront, au détriment des emprunteurs : dans les deux cas, on ponctionnera le patrimoine des épargnants, qui n’aura d’ailleurs plus de raison d’être conservé, puisqu’il n’y aura personne à qui le transmettre.

Avec le temps, les conséquences deviendront plus noires encore, pour les derniers survivants parmi nos contemporains. On assistera à un déclin accéléré du niveau de vie des derniers humains, qui devront se battre pour survivre, dans un monde où il y aura de moins en moins de gens pour faire marcher l’économie, l’administration, le système de santé et les services publics. Puis, sur une planète de plus en plus en déshérence, où rien ne fonctionnera plus, les ultimes humains, parmi les vivants d’aujourd’hui, se battront pour être le dernier homme…

Car c’est bien cela qu’il faut réaliser : sans les générations suivantes, la vie de tous nos contemporains est condamnée à se terminer en enfer. La phrase de Groucho Marx ne peut donc convaincre que ceux qui sont victimes de la tyrannie de l’immédiat, qui ne pensent pas à ce que les générations futures leur apporteront d’essentiel dans les années à venir. Alors, par égoïsme au moins, protégeons le bien-être de nos descendants, comme la prunelle de nos yeux. Et, pour cela, innovons, éliminons le gaz carbonique de notre énergie, réduisons nos dettes, devenons harmonieux et sereins, maîtrisons nos désirs et nos folies, renforçons la politique familiale. Et, surtout, ayons des enfants et aimons-les. Comprenons que l’altruisme est l’une des dimensions les plus vitales de l’égoïsme. Et réciproquement.

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