Quand les femmes prennent le pouvoir

La femme serait-elle l’avenir du crime ? Des faubourgs de Naples à ceux de Lagos, des cartels mexicains aux gangs australiens, elles s’imposent de plus en plus dans un univers considéré – à tort – comme masculin à 100 %. Le phénomène ne doit rien à un effet de mode. Aux Amériques comme en Europe, les mafieuses montent en grade.

La Sicile elle-même n’y échappe pas. Teresa Principato, magistrate spécialisée dans la lutte anti-Mafia, n’a cessé de répéter, ces dix dernières années, qu’il fallait en finir avec le stéréotype de la femme  » victime « , réduite au rôle de veuve éplorée ou d’amante soumise.  » L’autre moitié de la Coupole « , comme elle l’appelle joliment, a longtemps bénéficié, de la part de la justice italienne, d’une forme d’indulgence. Certaines audacieuses, plus diplômées que leurs mères, ont pris des responsabilités, qu’il s’agisse du racket, de la gestion des biens immobiliers ou du blanchiment de l’argent de la drogue. Ainsi le cas de Giusy Vitale fait-il désormais référence en Italie. Avant de devenir, en février 2005, la plus célèbre repentie du pays, cette Sicilienne de 37 ans aujourd’hui fut en effet la première  » femme boss  » de Cosa Nostra. En 1998, puis en 2003, elle contrôla avec une fermeté de  » parrain  » le secteur de Partinico, près de Palerme.

Ailleurs, les exemples ne manquent pas non plus. En Calabre, les femmes restent dans l’ombre mais jouent un rôle décisif (voir page 54). A Naples, il est fréquent que l’arrestation d’un chef de clan incite sa compagne ou sa s£ur à prendre le pouvoir et, parfois, à ne plus le rendre (voir page 52). Idem au Mexique, où les cartels tombent parfois aux mains d’élégantes starisées par les médias (voir page 56)à

Cette évolution ne surprend pas les Colombiens, qui ont en mémoire une pionnière du genre : leur compatriote Griselda Blanco, alias  » la Marraine « . Cette patronne-née, portée sur le sexe, la poudre blanche et les toilettes hors de prix, régna dans les années 1970 sur le trafic de cocaïne à Miami. Trois fois mariée, trois fois veuve, emprisonnée aux Etats-Unis de 1985 à 2004, elle est aujourd’hui âgée de 64 ans et vit cachée en Colombie.

Cette marraine a fait des émules dans les organisations latino-américainesà La dernière en date ? Maria Gema Avilés, une Nicaraguayenne considérée comme une actrice clef du trafic de drogue en Amérique centrale. Recherchée par les polices de la région, elle traite d’égale à égal avec Juan Carlos Ramirez Loida, alias  » Chupeta  » (Sucette), l’un des chefs du cartel colombien du Norte del Valle. Un exploit, sur ces terres machistes. Et la preuve que le temps des mafieuses est peut-être arrivéà

P. B. dossier réalisé par Philippe Broussard, Axel Gyldén, Henri Haget, Delphine Saubaber et Boris

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