Quand l’éthique entre en Bourse

On peut investir dans des fonds sans perdre son âme. C’est du moins ce que disent les promoteurs des sicav investies dans des entreprises  » citoyennes « 

Selon le dictionnaire,  » éthique  » a  » trait à la morale « . Mettons d’emblée les points sur les i. Lorsque vous achetez une sicav dite éthique, vous n’apportez pas vos économies à des initiatives dénuées d’esprit de lucre, mais vous fournissez bel et bien des fonds à des sociétés de grande dimension cotées en Bourse. En d’autres termes, vous manifestez votre adhésion au principe de base de l’économie capitaliste.

Il existe néanmoins une différence importante entre les sicav éthiques et celles qui ne revendiquent pas cette appellation. Les premières se refusent à investir dans des sociétés qui, dans leur gestion, ne respectent pas ou respectent peu quelques principes touchant à une certaine conception de la vie.

En Belgique, les premiers fonds éthiques ont fait leur apparition il y a une dizaine d’années, mais la véritable impulsion a été donnée il y a cinq ans, par le lancement de la gamme des  » Stimulus  » , de la Bacob, banque proche du Mouvement ouvrier chrétien (MOC). Depuis, elles ont fait leur petit bonhomme de chemin. Mais sans rencontrer un engouement extraordinaire, puisqu’elles n’ont récolté que 0,5 % des fonds investis dans les sicav.

Chronologiquement, les spécialistes distinguent aujourd’hui quatre générations de fonds éthiques.

La première était essentiellement basée sur des critères d’exclusion : pas question, par exemple, pour une sicav éthique d’inclure dans son portefeuille des emprunts d’Etats non démocratiques ou des actions de producteurs d’armes.

Avec la deuxième génération, un pas était fait en direction d’entreprises se distinguant sur le plan de l’emploi (création, conditions de travail…) ou sur celui de la protection de l’environnement.

La troisième génération reposait davantage encore sur la notion de développement durable : c’est toute la culture d’entreprise, envisagée dans une perspective de longue durée, qui était prise en considération.

La vision est plus globale encore avec la quatrième génération de fonds, qui prend en compte tout l’environnement de la société (les dirigeants, les actionnaires, les clients, les fournisseurs, les syndicats, les rapports avec les ONG, etc.).

Pas plus risqué, pas moins rentable

A l’heure actuelle, une bonne trentaine de sicav dites éthiques ou encore  » durables  » sont proposées aux épargnants belges. Une bonne moitié émanent de Cordius (Bacob/Artesia), les autres ont pour promoteur KBC, Fortis, Dexia, etc. On trouve parmi elles quelques sicav mixtes (européennes ou internationales), mais la plupart sont des sicav d’actions pures (également européennes ou internationales).

Un exemple de portefeuille : celui de la Cordius Allocation Sustainable Europe. Cette sicav est investie dans des titres comme Nokia, BP, Glaxo, Novartis, ING, Shell, UBS, etc. A chacun d’apprécier si ces groupes répondent ou non à l’idée qu’on peut se faire d’une entreprise  » citoyenne « . Précisons que ce fonds n’a pas reçu le label Ethibel.

On a beau avoir des scrupules, toute préoccupation financière n’est pas pour autant absente. Après tout, pourquoi ne pas joindre l’éthique à l’utile ? En d’autres termes, agit-on en bon père de famille en investissant dans des sicav éthiques ? Selon une étude de Cordius Asset Management, ce type de placement n’est ni plus risqué ni moins rentable. S’agissant du niveau de risque, on notera que ces fonds appartiennent aux classes de risque 2, 3 ou 4, dans une échelle qui va de 0 à 5. Ils ne sont donc pas plus risqués que leurs homologues  » non éthiques « . Pour ceux qui auraient encore des doutes, précisons qu’à l’heure actuelle quatre fonds à capital garanti (chez KBC, notamment) sont disponibles.

Question rentabilité, il est sans doute trop tôt pour formuler un jugement définitif. En effet, les quatre cinquièmes des fonds ont moins de cinq ans. A titre indicatif, signalons que la Bacob Stimulus European Balanced Medium a dégagé, depuis sa création, il y a cinq ans, un return annuel moyen de l’ordre de 12,5 %, contre 10,50 % pour la moyenne des sicav mixtes de type neutre.

Si, aux sicav classiques, vous préférez les fonds d’assurance, sachez qu’on trouve également, chez Ohra et Artesia BC (Bacob/LAP), notamment, des produits de la branche 23 à connotation éthique.

Une dernière précision : même si elles n’appartiennent pas formellement à la famille des sicav investissant de manière éthique, certaines sicav permettent aussi aux investisseurs de faire leur  » bonne action « . C’est le cas de Solidarity Euro Mixed, gérée par la BBL et dont les bénéfices sont versés à des organisations à vocation sociale (Child Focus, par exemple) ou encore de  » L’Evangile pour nos enfants « , gérée par Fortis et dont les revenus bénéficient à une oeuvre religieuse…

M.Ct.

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