Prématurés bichonnés

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Depuis les années 1990, le taux de survie des mini-bébés est de 60 à 90 %. Mais ils sont davantage sujets à des handicaps. D’où l’importance d’un suivi, long et coûteux. Cap 48 – soutenu par Le Vif/L’Express – finance un programme de dépistage des handicaps. Visite dans un service de néonatologie très en pointe.

On ne s’en rend pas compte tout de suite. Les bruits sont comme assourdis, molletonnés. Aucune lumière n’est aveuglante. Bienvenue dans un cocon reconstitué, un ventre de coton, qui accueille les mini-bébés venus si vite au monde, dont une partie de très grands prématurés, nés après vingt-six, voire vingt-cinq semaines de gestation. Les couloirs paisibles donnent sur 27 chambres individuelles.  » Cette architecture protège les nouveau-nés des nuisances sonores et lumineuses habituelles dans ce type de service. Ils sont alors moins stressés et leur état clinique s’en trouve stabilisé « , détaille Dominique Haumont, chef de service. Sur les murs de celle de Fanny, plongée dans une semi-obscurité, des recommandations toutes particulières.  » Gardez sa porte toujours fermée, même durant les soins.  »  » Offrez-lui des temps de récupération en faisant des pauses.  » Penchée sur la couveuse, l’infirmière replace le cache en tissu matelassé destiné à obstruer la lumière. Fanny, née à 28 semaines, pesant aujourd’hui 1 200 grammes, se fatigue plus vite que d’autres bébés plume.  » Par ses petits malaises et ses pauses respiratoires, Fanny nous a montré que les soins étaient durs à supporter pour elle « , chuchote la jeune dame. Pour les soins les plus difficiles, l’infirmière attendra l’arrivée des parents.

Cette enfant bénéficie pourtant du même régime de faveur que les autres prématurés de l’étage. Dans ce service de néonatologie d’avant-garde, les parents accèdent librement aux chambres, à toute heure du jour et de la nuit. Ils partagent leurs observations sur le comportement de leur nourrisson avec l’équipe. Les soins, enfin, sont prodigués en commun, quelles que soient les contraintes médicales ou techniques.

Réduction des troubles de l’apprentissage

Le CHU Saint-Pierre, à Bruxelles, fut le premier à adopter le programme Nidcap, venu des Etats-Unis et des pays scandinaves. Il vise à adapter les soins et l’environnement au rythme et aux capacités de chaque bébé.  » Ce n’est pas un ensemble de recettes, mais une philosophie que nous appliquons dans nos pratiques. Par exemple, pour deux bébés de 34 semaines, nous ne décrétons pas qu’ils doivent se nourrir parce qu’ils ont atteint 34 semaines : le premier le fera très bien parce qu’il en a déjà les compétences ; le second, plus vulnérable, continuera d’être gavé « , explique Delphine Druart, l’infirmière pédiatrique et formatrice Nidcap. Depuis 2007, Saint-Pierre est aussi le premier centre de formation agréé Nidcap en Belgique. Ainsi le service de néonatologie de Cochin Port-Royal (Paris), l’un des plus grands de France, est en cours de formation Nidcap, sous la houlette de l’équipe du CHU Saint-Pierre.

Hormis la formation et la nécessaire réorganisation du service, le programme n’affiche pas un coût insurmontable.  » Le Nidcap ne représente pas plus de travail pour le personnel, mais c’est une autre organisation. Au final, on est moins stressé et moins fatigué, car il y a nettement moins de bruit, moins de pleurs « , souligne Delphine Druart. En tout cas, les bienfaits de cette révolution culturelle sont déjà visibles, selon ses initiateurs.  » Les durées de ventilation et d’alimentation artificielles sont réduites, estime le Pr Dominique Haumont. La durée moyenne de séjour a été diminuée. Et les bébés prennent du poids plus rapidement.  » Selon des études, le Nidcap réduit également les troubles de l’apprentissage,  » séquelles  » qui concerneraient environ 15 % des prématurés nés en Belgique. Enfin, il améliore la qualité de la relation avec leurs parents.

Ces parents, justement. Savent-ils rester à leur place ? Ne sont-ils pas trop envahissants ? Chaque année, des couples formulent des exigences incompatibles avec le fonctionnement du service. Mais, la plupart du temps, tout se règle à l’amiable. L’équipe s’est ainsi habituée à voir débarquer des pères à… 1 heure du matin, après leur travail.

Grande soirée de clôture de l’opération Cap 48, le 11 octobreau cirque Bouglione, diffuséeen direct sur la RTBF (la Uneet la Première).

SORAYA GHALI

nidcap adapte les soins au rythme de chaque bébé plume

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