Pourquoi les élèves flamands sont meilleurs

Aux tests PISA, les Flamands  » écrasent  » les francophones. En épluchant les résultats, les différences s’avèrent moins nettes. Sauf dans les filières techniques et professionnelles, mieux valorisées en Flandre.

Les résultats aux tests PISA, organisés tous les trois ans dans 32 pays, sont cruels et sans appel : les élèves flamands obtiennent systématiquement de meilleurs scores que leurs camarades francophones. Les Flamands sont-ils plus malins ? Ou bénéficient-ils d’une meilleure conjoncture ? La Flandre a-t-elle trouvé la recette miracle pour optimiser son enseignement ?

Difficile de s’y retrouver : en consultant ces enquêtes au long cours, on est noyé sous une avalanche de chiffres. Le département de pédagogie de l’université de Liège (ULg) a décortiqué les résultats des études PISA (la dernière date de 2006).  » On peut affirmer que la Flandre est plus performante que la Communauté française, commente Dominique Lafontaine, professeur en sciences de l’éducation à l’ULg. Quel que soit le domaine, la Flandre devance d’environ 50 points la Communauté française. « 

Compte rendu du match Nord-Sud. En sciences, la Flandre obtient 529 points, contre 486 à la Communauté française ; en mathématiques, 543 contre 490 ; en lecture, 522 contre 473. Une claque ! L’écart a même tendance à s’accroître entre les deux Régions : si le score de la Communauté française se tasse lentement, celui de la Flandre a bondi en quelques dizaines d’années. Pourtant, dans les années 1970-1980, les performances des deux Communautés étaient encore relativement proches… Que s’est-il passé ?

1. Un contexte économique favorable

Première constatation : la montée en puissance des résultats flamands coïncide avec une période faste pour la Flandre en termes de santé économique. Au même moment, la Wallonie et Bruxelles décrochent.  » Or, dans les tests PISA, les pays les plus avancés sur le plan économique réalisent, la plupart du temps, de meilleurs scores que les autres « , souligne Dominique Lafontaine. En comparant les chiffres par province, la chercheuse a pu vérifier les effets de la prospérité sur les résultats scolaires. Il en va de même dans les Communautés. En comparant les résultats du Brabant wallon à ceux du Hainaut, lors du test PISA 2003 en mathématiques, les Hennuyers réalisent un score de 483 ; les Brabançons, 531. Un écart de quelque 50 points, la différence moyenne de résultats entre la Communauté française et la Communauté flamande ! Une disparité qui pourrait s’expliquer par les difficultés socio-économiques, qui marquent davantage le Hainaut que le Brabant wallon.

Cette explication n’est toutefois pas absolue. Une autre donnée retient l’attention : le taux de redoublement des élèves est de loin plus élevé en Communauté française. Près de la moitié des élèves (49 %) évalués lors de la dernière enquête PISA affichent un retard scolaire d’au moins un an. En Communauté flamande, la proportion est presque deux fois moindre (27 %).  » Le taux de redoublement a incontestablement une incidence sur les performances aux tests PISA « , poursuit Dominique Lafontaine. La Finlande, qui ignore les redoublements, ne fait que cartonner dans les enquêtes internationales.

Si le taux de redoublement baissait en Communauté française, Dominique Lafontaine estime que le retard avec la Flandre pourrait être partiellement rattrapé.  » Si, comme la Flandre, la Communauté française ne comptait que 27 % d’élèves en retard, la différence de résultats entre les deux Communautés pourrait être réduite d’un tiers « , précise-t-elle.

2. Technique : 12 % des élèves de 4e n’ont jamais redoublé

Plus interpellant : les filières techniques et professionnelles, déconsidérées en Communauté française, semblent plus valorisées en Flandre. Dans l’enseignement technique de qualification, le taux de redoublement est, en tout cas, beaucoup moins important au Nord. En 4e de qualification, 33 % des élèves n’y ont jamais redoublé. En Communauté française, au même niveau d’études, à peine 12 % des élèves sont  » à l’heure « .

L’orientation des élèves vers le technique ou le professionnel semble aussi plus efficace et mieux acceptée en Flandre : 53 % des élèves fréquentent l’enseignement de qualification (contre 36 % en Communauté française). Mais c’est peut-être lors de l’orientation que tout se joue.  » Lorsque le conseil de classe propose de réorienter un élève, le choix se portera en priorité sur une autre filière, plutôt que sur un redoublement dans la même section « , affirme Inge De Meyer, du département pédagogique de l’université de Gand. En Communauté française, les élèves de l’enseignement général redoublent souvent pour demeurer, coûte que coûte, dans une filière plus  » réputée « .  » Cette attitude s’observe surtout dans les milieux plus favorisés. Les parents font le forcing pour maintenir leur enfant dans la filière générale « , confirme Dominique Lafontaine.

3. L’enseignement de qualification flamand plus performant

Autre enseignement : si l’on compare finement les résultats obtenus aux tests PISA par les Communautés, on remarque aussi que les différences sont surtout significatives dans l’enseignement de qualification. En tenant compte de caractéristiques individuelles propres aux élèves (profession des parents, nombre de livres à la maison, filière fréquentée…) et de caractéristiques propres aux écoles (profil social des élèves, nombre de retards scolaires…), les chiffres  » bruts  » avancés par l’enquête internationale peuvent être affinés. Si les élèves et les écoles étaient comparables selon ces critères, l’écart entre les Communautés flamande et française se réduirait comme peau de chagrin… dans l’enseignement général et dans l’enseignement technique de transition. En revanche, dans l’enseignement de qualification (technique et professionnel), la différence entre les deux Communautés reste significative. A la défaveur de la Communauté française…

Gilles Quoistiaux

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