POLITIQUE

Le sort des accords dits de la « Saint-Polycarpe » dépend plus que jamais des négociations bruxelloises. Dénouement pour Pâques?

Le gouvernement a déjà fait savoir le peu de cas qu’il ferait de l’avis du Conseil d’Etat sur la régionalisation de la loi communale (lire aussi en p.19). Il ne tiendra sans doute pas davantage compte des réticences des juristes concernant l’autre projet de loi spéciale, traitant du refinancement des Communautés et de l’extension des compétences fiscales des Régions. Tout au plus toilettera-t-on un brin les textes – c’est en tout cas le souhait du PRL – pour éviter les pièges juridiques. En clair, pour compliquer au maximum la tâche de ceux qui envisageraient d’introduire des recours à la Cour d’arbitrage, après le vote des lois spéciales au Parlement. Dans le but, aussi, de calmer autant que possible les inquiétudes du FDF et de la Volksunie, tous deux aux abois pour des raisons opposées.

Le danger, dans l’immédiat en tout cas, réside moins dans les rebondissements juridiques autour des accords baptisés de la « Saint-Polycarpe » (à tort, d’ailleurs: ils ont été conclus en date du 23 janvier, alors que le désormais célèbre saint est fêté le 23… février!) que dans l’évolution des négociations au sein de la « Conférence » institutionnelle bruxelloise, à présent emmenée par Daniel Ducarme, le président du PRL en personne. Pourquoi? Parce que la VU a conditionné son soutien (indispensable) à la dernière réforme de l’Etat – de laquelle dépend, notamment, le refinancement de l’enseignement francophone – à des avancées flamandes sur le terrain bruxellois. Au menu des négociations: une meilleure représentation flamande au Parlement régional bruxellois et un refinancement des commissions communautaires francophone et néerlandophone, chargées des matières personnalisables (culturelles et sociales) et traditionnellement exsangues.

Ces deux points ne devraient guère poser de problème. La meilleure représentation flamande au Parlement régional peut, en effet, se justifier par la nécessité de diluer la présence du Vlaams Blok (4 sièges au Parlement bruxellois, pour 7 aux partis démocratiques flamands) et d’empêcher un éventuel blocage des institutions bruxelloises par la formation d’extrême droite. Quant au refinancement des Communautés à Bruxelles, il paraît d’autant plus légitime que les accords en suspens au niveau fédéral négligent totalement le caractère particulier de la Région bruxelloise et de ses missions (c’est-à-dire de ses besoins!) spécifiques en tant que capitale belge et européenne. Et, puisque la concrétisation de la dernière réforme de l’Etat dépend désormais de la bonne volonté des responsables politiques bruxellois, ces derniers auraient tort de ne pas profiter au maximum de leur position de force.

Mais la grande inconnue réside, une fois de plus, dans les états d’âme de la VU: celle-ci se contentera-t-elle de ce menu ou s’entêtera-t-elle à réclamer, en sus, une représentation garantie pour les Flamands au sein des conseils communaux et des collèges échevinaux des 19 communes bruxelloises? Les francophones ont déjà fait savoir tout le mal qu’ils pensaient de pareille revendication. Ceux-ci se disent, tout au plus, prêts à faire preuve de bonne volonté dans d’autres dossiers, annexes certes, mais néanmoins sensibles aux yeux des Flamands, tel un accueil réellement bilingue dans les hôpitaux bruxellois. Rien ne dit que la VU, déchirée entre courants antagonistes et poussée à l’intransigeance par le CVP (aux affaires à Bruxelles, mais dans l’opposition en Flandre et au niveau fédéral) et le Vlaams Blok, montrera finalement sa bonne volonté.

Quoi qu’il en soit, Daniel Ducarme s’est lancé dans une mission à hauts risques. Le président du PRL joue rien de moins que sa crédibilité. Et, s’il retarde de jour en jour la date de la réunion officielle et plénière de la « Conférence » bruxelloise (laquelle a été reportée de début mars à la mi-mars), ce n’est sans doute que pour tenter d’obtenir, dans l’intimité d’échanges en tête à tête, des garanties qu’il lui serait sans nul doute plus difficile de décrocher sous les feux médiatiques. Mais le temps presse: Ducarme s’est fixé comme échéance les vacances de Pâques…

Isabelle Philippon

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