Plaidoyer pour la sieste

Souvent mal considérée, la petite sieste est pourtant un excellent

moyen de relancer son tonus et sa productivité… Avis à tous les patrons !

Une sieste est définie comme une courte période de sommeil, de durée inférieure à 50 % d’un cycle de sommeil normal.  » Elle a longtemps été considérée comme une forme indésirable de sommeil, déclare Myriam Kerkhofs, qui dirige le laboratoire de sommeil de l’hôpital Vésale à Charleroi. Et pourtant, loin d’être une exclusivité humaine, elle existe chez la plupart des espèces animales et est sous-tendue par les variations de notre rythme biologique.  » Ainsi, plus de 85 % des mammifères font, d’une façon ou d’une autre, une sieste.

Dormir augmente vigilance et efficacité

 » Les avantages d’une petite sieste sont de moins en moins mis en doute, notamment sur la vigilance et la productivité « , continue Myriam Kerkhofs. Le petit roupillon de dix à trente minutes est le plus régénérant. Il rend plus alerte, met de bonne humeur, aiguise les processus d’apprentissage et la mémoire, et augmente la précision des gestes.

Une sieste doit normalement s’arrêter avant que le dormeur n’entre dans un cycle de sommeil complet, car le réveil à partir d’un stade de sommeil profond rendrait au contraire encore plus  » vaseux « . C’est pourquoi certains siesteurs pressés vont même jusqu’à s’allonger avec une clé en main : quand les muscles se relâchent, signe de profonde détente et de début de sommeil, l’objet tombe et les réveille. Même ces siestes ultracourtes – appelées en anglais  » power nap  » – seraient suffisantes pour relancer le tonus intellectuel.

En revanche, les siestes qui durent plusieurs heures sont moins recommandées, car elles mènent le dormeur dans son sommeil profond, dont il émergera alors complètement groggy et désorienté. De plus, les longues siestes perturbent la structure du sommeil de la nuit qui suit et sont donc déconseillées aux mauvais dormeurs.

Quel est le moment le plus propice à la petite sieste ? C’est notre rythme circadien qui en décide. Il provoque un petit accès de somnolence entre 13 et 15 heures… ce qui tombe bien puisque c’est le moment où la plupart d’entre nous digèrent le repas de midi. On a d’ailleurs longtemps cru que c’étaient les variations du taux de sucre sanguin suite au repas qui provoquaient cette irrépressible envie de dormir, mais ce n’est pas la seule explication. En effet, le fléchissement de l’attention se manifeste également en l’absence de repas. Ce rythme de sieste de début d’après-midi semble donc véritablement inscrit dans notre cycle biologique.

Sieste au travail

A quand des entreprises qui encouragent la sieste chez leurs employés, dans un souci de productivité et de créativité ?  » Je n’en ai pas souvent entendu parler chez nous, regrette Myriam Kerkhofs. En revanche, cette coutume semble se répandre dans les pays anglophones et scandinaves.  » Certains fabricants ont même profité de la tendance pour concevoir des fauteuils spéciaux, équipés d’une sorte de  » bulle « , qui permettent au candidat à la  » socquette  » de s’abstraire temporairement du monde en toute quiétude (1).

Dans le cas du travail de nuit notamment, des études ont montré qu’il y avait deux sortes de siestes à conseiller : la sieste anticipative, que l’on fait juste avant de prendre la pause de nuit, et la courte sieste pendant les heures de travail de nuit, autorisée par quelques entreprises pionnières, qui ont pu vérifier que la vigilance des travailleurs et la qualité du travail presté s’en trouvaient améliorées. Ceux dont les journées de travail débutent à l’aube, comme les boulangers et les postiers, ont également tout intérêt à couper leur journée par une brève sieste, encore une fois pas plus de 30 minutes pour ne pas empiéter sur le capital sommeil de la nuit qui suit.

Bonne pour le c£ur

La petite sieste semble aussi bénéfique pour le c£ur. Myriam Kerkhofs se plaît à citer cette étude menée par des chercheurs grecs qui ont démontré, en étudiant plus de 23 000 personnes sur plus de six ans, que le nombre de décès par maladies cardio-vasculaires est de 37 % moindre chez les hommes qui font régulièrement la sieste. Une explication résiderait dans le fait que la sieste aide à évacuer les excès de stress, et donc à diminuer les taux de cortisol sanguin. Il semble donc que l’on puisse bel et bien conseiller à tous les cardiaques de s’offrir un petit somme récupérateur au milieu de la journée.  » Et pas seulement aux cardiaques ! conclut Myriam Kerkhofs. Il faudrait faire passer à tous le message que la sieste est un sommeil physiologique, normal, et que, quand on en ressent le besoin, il ne faut surtout pas s’en priver ! « 

(1) www.metronaps.com

Jan Etienne, Karin Rondia

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