Paradoxe trompeur

Le récent débat entre partis flamands sur la stratégie communautaire a quelque chose de paradoxal. Les nationalistes radicaux de la N-VA n’exigent plus à tout prix une réforme de l’Etat. Et un parti traditionnel modéré, tel l’Open VLD, la revendique plus que jamais, alors qu’elle n’a jamais compté parmi ses priorités. Or ce paradoxe est trompeur. La N-VA a changé de stratégie. Elle ne veut plus forcer les partis francophones à s’asseoir autour de la table des négociations. Ce qu’elle demande, c’est l’application extensive des compétences flamandes. Le gouvernement flamand devrait, par exemple, allouer des allocations familiales complémentaires et instaurer une assurance-hospitalisation, dans le droit fil de l’assurance-assistance déjà en vigueur, fondement d’une Sécu flamande. Le gouvernement flamand doit aussi se montrer sévère à l’égard de son homologue fédéral. En aucun cas, la Flandre ne peut secourir financièrement un gouvernement fédéral nécessiteux. Et si celui-ci prend des décisions qui ne lui plaisent pas, elle n’a qu’à invoquer des conflits d’intérêts. Vu que le niveau fédéral n’intéresse les francophones que pour ses retombées financières, ceux-ci auront tôt fait de réclamer une réforme de l’Etat, argumente la N-VA. Les Flamands se trouveront alors en position de force pour négocier. Pour les autres partis, notamment le CD&V et l’Open VLD, cette perspective est funeste : ils font partie de l’équipe fédérale, que la N-VA voudrait  » affamer « . Quant au fond, la Flandre est indissociable du fédéral : celui-ci paie aussi les pensions, les allocations de chômage, etc., … des Flamands. L’analyse de la N-VA est toutefois pertinente sur un point : la situation budgétaire du fédéral ne cesse de s’aggraver. De nouveaux accords financiers et la révision de la loi de financement s’imposent. Pour ceux qui n’adoptent pas la stratégie du pourrissement, une réforme de l’Etat est donc inéluctable. Sinon, la confection du budget fédéral et la mise en £uvre d’une politique sociale et économique s’avéreront de plus en plus malaisées. C’est pourquoi les autres partis, comme l’Open VLD, désirent, d’urgence, une réforme de l’Etat. Même si, autre paradoxe, les moyens financiers pour le fédéral (et pour Bruxelles) devront surtout être apportés par le niveau flamand.

DAVE SINARDET : Politologue à l’université d’Anvers

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