Par ici les fonctionnaires !

Namur espère bien obtenir sa part du gâteau en matière de transfert de compétences vers les entités fédérées. Les projets de développement d’espaces de bureaux sont nombreux. Au total, 52 500 mètres carrés sont disponibles.

Nul ne sait encore combien ils seront. Ni même… s’ils viendront. Mais Namur compte bien user et abuser de son statut de capitale wallonne pour tenter d’attirer les futurs fonctionnaires délocalisés suite à la réforme de l’Etat. Transférer des compétences aux entités fédérées, cela n’est pas qu’une question d’empoignades politiques ou de gros sous. Mais aussi, très concrètement, de déménagement de services et d’infrastructures publiques, voire sans doute de sociétés privées ou d’organisations qui souhaiteraient se rapprocher du pouvoir de décision.

Chaque ville du sud du pays serait probablement ravie d’attirer à elle ces mannes d’emplois et d’activités économiques. Aucun accord officiel n’a toutefois encore été signé en haut lieu.  » La 6e réforme de l’Etat n’a été bou-clée qu’à la mi-juillet dernier, rappelle Sophie Paczkowski, porte-parole du ministre-président wallon Rudy Demotte (PS). Les premières rencontres pour discuter du sujet doivent se dérouler à partir de la rentrée.  »

Malgré l’incertitude, Namur a décidé de prendre les devants, forte de la présence du parlement et de l’Elysette.  » Nous sommes prêts et demandeurs ! lance le bourgmestre Maxime Prévot (CDH). Cela serait tout à fait conforme à notre profil de ville de services.  »

Dernier décompte : 52 500 m2

Cela fait d’ailleurs plus d’un an et demi déjà que les forces vives namuroises – Province, communes, bureau économique, etc., réunis dans le groupe Axud – ont élaboré un cadastre de toutes les surfaces disponibles, immeubles de bureaux ou terrains à bâtir.  » Nous avons réalisé des fiches qui reprennent le nombre de mètres carrés, le type d’équipements disponibles, le prix…, énumère Ingrid Bertrand, responsable de la communication du Bureau Economique de la Province (BEP). Nous avons remis ce document au gouvernement wallon. Les investisseurs privés peuvent se le procurer. Nous mettons la liste à jour tous les six mois.  »

La dernière mouture, actualisée en juin dernier, mentionne 88 sites potentiels, à vendre ou à louer. Des plus petits (13 m² à Saint-Servais) aux plus grands (5 500 m² à Lives-sur-Meuse). Soit un total de quelque 52 500 mètres carrés.

 » Namur dispose de toute la capacité d’accueil nécessaire, commente le notaire Etienne de Francquen. Qui plus est dans des zones stratégiquement situées : au carrefour d’axes autoroutiers, proches d’une gare, desservies par les transports en commun… Les prix sont aussi plus abordables que dans la capitale.  » Sans oublier sa situation centrale sur la carte de la Wallonie et sa proximité avec Bruxelles.

Les pouvoirs politiques locaux ne seraient d’ailleurs pas les seuls à avoir anticipé le déménagement. Les investisseurs privés commenceraient eux aussi à montrer le bout de leur nez. Car même si le transfert de compétences ne se concrétisera pas du jour au lendemain et s’il s’échelonnera probablement sur plusieurs années, il n’est jamais trop tôt pour entreprendre les démarches nécessaires et tomber à pic lorsque la demande se fera pressante.

Regain d’intérêt

 » On sent qu’il y a un regain d’intérêt, confirme Pierre Closon, administrateur délégué du groupe immobilier Trevi Namur. Les promoteurs sont en train d’anticiper, il y a de la demande.  »  » L’effet secondaire est que les entreprises privées cherchent aussi à se rapprocher de la région, avance Paul de Sauvage, responsable de la société immobilière Actibel. J’ai récemment eu une réunion avec l’une d’entre elles, qui était à la recherche de 10 000 mètres carrés de bureaux. Il y a des contacts, même si nos interlocuteurs préfèrent rester discrets pour l’instant.  »

Certaines organisations parastatales envisageraient elles aussi de se rapprocher ou de s’étendre en terres namuroises.  » Par exemple, les mutualités chrétiennes veulent investir sur le plateau de Bouge, tout comme la CSC « , mentionne Arnaud Gavroy, échevin Ecolo de l’Aménagement du territoire.

Les chantiers et les projets de futurs complexes ne manquent pas. Dans l’hyper centre, les autorités ambitionnent de construire dans la zone dite de la  » courgette  » (longeant la ligne ferroviaire derrière la gare, boulevard Mélot, et s’étendant jusqu’au parc Louise- Marie) un centre de conférences de 1 000 places, un hôtel et des bureaux.

Il y a aussi les coups de pelleteuses actuellement donnés avenue Prince de Liège à Jambes pour la construction du complexe GreenPark. Un ensemble de trois immeubles disposant respectivement de 2 600 m². Hobeco y a investi 22 millions d’euros. Non négligeable. Pourtant, elle prend des risques en construisant  » à blanc  » (comprenez : sans qu’aucun client n’ait encore signé de bail), mais est persuadée que la demande suivra.

On pourrait encore citer le projet Eaglestone à Jambes (21 000 m² de bureaux, mais aussi des appartements et des maisons), un projet boulevard Cauchy de près de 15 000 m² porté par Thomas & Piron et BAM, un projet de 3 000 m² boulevard Mélot soutenu par Actibel, les surfaces à louer du côté du Burogest Office Park de Loyers… Pas mal, pour une ville où certains agents immobiliers avaient coutume de dire que le marché était désespérément plat !

Gare aux parkings

 » Il ne faudra pas oublier la question de la mobilité, juge Eliane Tillieux, ministre wallonne de la Santé et cheffe de file de l’opposition socialiste. L’une des réponses sera d’augmenter drastiquement l’offre de parkings. Tant du côté de la gare que dans le bas de la ville. Car les parkings relais actuels ont démontré leurs limites. Il existe des opportunités pour en construire (centre commercial, Grognon, palais de justice, courgette…). Ne les laissons pas passer.  »

Selon Pierre Closon, à la question du parking s’ajouterait également celle des transports publics.  » La difficulté dans certaines zones, c’est qu’elles sont mal desservies. L’accessibilité de l’Office Park de Loyers, par exemple, n’est pas bonne. Cela peut repousser les entreprises.  »

Bref, le défi de la réforme de l’Etat n’est pas mince pour la ville et ses environs. Reste maintenant à la capitale wallonne d’obtenir ce qu’elle réclame ardemment.  » Il ne faut pas non plus surestimer l’ampleur du transfert de compétences « , avance Arnaud Gavroy, citant le chiffre de 1 000 fonctionnaires à relocaliser.  » C’est ce qui avait été avancé durant les négociations « , assure-t-il. D’autres estimations parlent de 2 000 personnes. Qui dit mieux ?

Par Mélanie Geelkens

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