» On veut me déstabiliser « 

Kabila l’exècre, Fortis le poursuit, le MR le pourfend. Mais le chef de la diplomatie belge reste imperturtable. Et convaincu que sa politique congolaise est la voie à suivre.

la diplomatie belge reste imperturbable. Et convaincu que sa politique congolaise est la voie à suivre.

Quelle était la raison de votre voyage à New York ?

E D’ici à la fin de l’année, il faudra renouveler le mandat de la Monuc et tout le monde semble d’accord sur la nécessité de l’adapter. Il faut aussi une discussion approfondie sur la finalité de la Monuc, huit ans après sa mise en place. C’est quand même la plus grande opération de paix dans le monde.

On ne peut que remarquer votre implication dans le dossier Congo. Vous voulez montrer que vous le gardez bien en main ?

E Je suis ministre des Affaires étrangères depuis quatre ans et demi et je me suis toujours intéressé au Congo. Je m’y suis rendu une dizaine de fois. C’est un dossier important mais aussi de nature à en décourager plus d’un. Moi, je n’ai jamais été découragé.

Certains vous accusent d’avoir torpillé les relations belgo-congolaises.

E C’est scandaleux de dire cela. Mon département a investi beaucoup de temps et d’argent dans ce dossier. Il y a un problème au Congo, et nous devons nous en occuper, comme du reste de toute la communauté internationale.

Mais le dossier ne vous a-t-il pas échappé un moment ? Au moment où ça chauffait dans le Kivu, vous étiez en Inde. L’affaire Fortis vous tombe dessus. Le ministre de la Coopération Charles Michel (MR) en profite pour rencontrer Kabila, qui, lui, ne veut plus vous recevoir…

E Je suis revenu d’Inde pour le Conseil des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne. Ma position au sujet du Congo a recueilli l’unanimité des ministres et du commissaire européen Louis Michel, qui a dit explicitement qu’il approuvait à 100 % mon analyse.

Vous, en revanche, vous avez eu des propos moins positifs à son égard…

E Je ne vais pas revenir sur ce malentendu. Un des éléments avancés est qu’on peut tout dire au président Kabila, mais en colloque singulier. Moi, j’ai tenté cela plusieurs fois et cela n’a jamais réussi. A quoi bon ces entretiens, alors ? S’il est sincère, Louis Michel doit aussi constater cela.

Quant à Charles Michel, il vient de vous asséner :  » Quand on provoque trop de problèmes, on devient le problème. « 

E Je n’ai pas envie de nourrir la polémique. Je suis convaincu qu’il y a un fossé entre la position de certains politiciens wallons et l’opinion publique dans le sud du pays.

Mais est-il possible de s’occuper efficacement de ce dossier sans rencontrer Kabila, sans aller au Congo ?

E A New York, j’ai discuté une heure et demie avec le médiateur de l’ONU, l’ancien président nigérian Obasanjo, et nous avons la même analyse. Au sein des Nations unies, je suis écouté. Mais, en Belgique, certains veulent me déstabiliser. Mais dites-moi, ai-je l’air déstabilisé ?

Non, mais peut-être entêté.

E Je ne crois pas être quelqu’un d’entêté. J’ai des convictions, et je suis prêt à changer d’avis si on parvient à me convaincre d’avoir une autre approche. Mais, dans le dossier congolais, plus je rallie des partisans, convaincus que mon analyse a toujours été très correcte, plus je suis critiqué ! Je ne vais quand même pas changer d’avis parce qu’on m’attaque.

Même si cela crée des problèmes au sein de la famille libérale ?

E C’est vous qui le dites. Charles Michel affirme que j’occupe une position très personnelle dans mon parti. Mais lors d’élections récentes au bureau de mon parti, j’ai terminé deuxième, à quelques centaines de voix de Guy Verhofstadt. Je suis loin d’être isolé !

Certains vous mettent en compétition avec Patrick Dewael pour le futur poste de commissaire européen.

E C’est complètement idiot. La décision est claire et nette dans mon parti : je suis le candidat pour le poste de commissaire, cela a été décidé lors de la formation du gouvernement. Je regrette qu’on essaie de créer un malentendu entre Patrick et moi, qui n’a jamais existé.

(Lire aussi en p. 86.)

Entretien (à New York) : François Janne d’Othée

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