Nés dans le chocolat

Surprise : le n° 1 des pralines belges a des racines suisses !

 » Frédéric Neuhaus, mon arrière-grand-père, raconte Pierre de Gavre, avait suivi quelques années de médecine, avant de se rendre compte qu’il ne supportait pas la vue du sang : il tombait en syncope pendant les opérations.  » L’ex-étudiant suisse émigre alors à Bruxelles. Il y recycle ses connaissances en pharmacologie, en se lançant dans la confection de sirops et de gommes thérapeutiques. Bientôt lassé par les jus de limace et l’odeur de l’eucalyptus, il passe, en 1895, de la confiserie pharmaceutique à la confiserie de luxe et il se spécialise dans… les chocolats.

C’est à son fils Jean, né dans l’historique boutique des galeries Saint-Hubert, que l’on doit l’invention de la praline – modèle réduit des encombrantes bouchées que l’on vendait alors -, et du ballotin, l’emballage qui allait permettre de transporter sans dommage ces friandises d’un genre nouveau.  » Jean Neuhaus était un homme d’une bonté extraordinaire, se souvient son petit-fils. Il était tellement généreux qu’il ne fit jamais respecter le brevet déposé pour son ballotin, au grand désespoir de son épouse, Louise Agostini. Si cela avait été le cas, les finances de la famille auraient été bien différentes ! « 

Du noir au blanc

Pierre de Gavre, fils d’Adelson de Gavre et de Suzanne Neuhaus, est entré dans l’usine de la chocolaterie familiale à 18 ans, après la Seconde Guerre mondiale.  » Mon père m’a d’abord mis au charbon, au sens littéral du terme. Après avoir passé la journée à alimenter les chaudières, j’étais tout noir. Puis j’ai travaillé à l’amidon, une substance que l’on utilise beaucoup en confiserie. Quand je sortais de l’atelier, j’étais blanc de la tête au pied. Je suis le dernier patron de l’entreprise à connaître le métier de A à Z. « 

Aujourd’hui, les chocolats Neuhaus n’appartiennent plus aux descendants de la famille du créateur de friandises. Pierre de Gavre a jeté le gant au moment où l’entreprise devait passer à l’échelle de l’exportation.  » Il est impossible de produire de vraies pralines à la crème capables de tenir pendant trois mois pour être vendues à Bangkok, affirme-t-il. Je suis un perfectionniste et je ne voulais pas modifier la qualité qui avait fait la réputation de la marque portant le nom de la famille. En 1969, j’ai vendu.  » Il produisait alors jusqu’à 1 200 kilos de pralines chaque jour. Actuellement, les usines Neuhaus de Leeuw-Saint-Pierre fabriquent quotidiennement 25 tonnes de chocolats.

Reconverti dans l’immobilier et à présent retraité, Pierre de Gavre a tourné la page Neuhaus. Mais il garde encore en tête, avec un brin de nostalgie, la musique cadencée des machines de l’usine.

E.S.

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