» NE PAS VOTER PS, C’EST TRAHIR « 

Pourquoi le PS d’Elio Di Rupo a-t-il sauvé la mise ? L’analyse du sociologue Alain Eraly, professeur à l’ULB.

1. Les sondages ont été surdéterminés par l’affaire Donfut ( NDLR : cet ex-ministre socialiste obligé de démissionner, le 12 mai, après des révélations sur ses lucratives missions parallèles de consultance). Passé le moment d’indignation, de ras-le-bol, voire de rage, les électeurs historiques du PS ont pu observer que la mise à l’écart du ministre wallon avait été bien gérée. Le président Elio Di Rupo n’a pas traîné, pour une fois. Des personnalités de la nouvelle génération ont condamné l’attitude de Donfut. Les électeurs socialistes ont pu avoir l’impression qu’un nouveau PS émergeait enfin. Ils ont voulu soutenir ces Rudy Demotte ou Paul Magnette.

2. Passé l’émotion liée à ces affaires à répétition, le PS a pu imposer un discours à nouveau audible sur la crise économique et financière, particulièrement mal vécue par les chômeurs et même les salariés de la classe moyenne. Il s’est profilé tel un rempart contre l’exclusion. Or les gens hésitent parfois à sanctionner pareil parti de pouvoir, parce qu’ils craignent que cela les affaiblira personnellement. Dans certains coins de Wallonie, ne pas voter PS correspond même à une trahison personnelle et sociale : un geste qu’on n’ose même pas justifier devant les copains, au bistrot. L’erreur historique du MR, dont le président Didier Reynders a pourtant été plongé corps et âme dans la crise  » Fortis « , c’est d’avoir négligé ces questions : que peut apporter le libéralisme en temps de crise ? Comment répondre aux inquiétudes de la population ? Depuis un bon bout de temps, le MR n’a plus réfléchi à sa propre doctrine, misant tout sur les tactiques et la stratégie.

3. Les attaques virulentes de Didier Reynders contre le PS  » infréquentable  » ont été mal vécues par les cadres et les militants socialistes. L’irrespect collectif est rarement payant en politique : on l’a souvent souligné dans la lutte contre l’extrême droite ; il vaut mieux écouter ses électeurs plutôt que de les stigmatiser. C’est triste à dire, mais Reynders, s’il choisissait cette logique, aurait dû jouer l’homme plutôt que le parti.

4. L’annonce très ferme d’Elio Di Rupo, à la RTBF, le 27 mai, indiquant qu’il ne gouvernerait pas en Wallonie et à Bruxelles avec le MR, apparaît aujourd’hui comme un coup de maître. Di Rupo a inversé le schéma : les  » infréquentables  » passaient d’un coup dans l’autre camp. Le PS ranimait ainsi le grand clivage gauche/droite. Avec les médias, il a mis en scène l’affrontement majeur, et le MR n’a jamais trouvé la parade.  »

Entretien : Ph.E.

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