Mutinerie au Labour ?

Le Premier ministre britannique, Gordon Brown, est de plus en plus contesté au sein du Parti travailliste. Où le quadra blairiste David Miliband pourrait incarner la relève.

C’est le dernier pari en vogue dans les pubs londoniens : deviner la date du putsch qui éjectera Gordon Brown du 10 Downing Street. A quelques jours de la conférence annuelle du Parti travailliste, qui se tiendra à Manchester du 20 au 24 septembre, les man£uvres ont repris de plus belle en vue de déstabiliser l’actuel Premier ministre, empêtré dans l’impopularité. La tradition parlementaire britannique oblige, en effet, le chef de gouvernement à s’assurer de la loyauté de sa formation politique. Si celle-ci vient à lui manquer, il s’en va immédiatement. Ainsi en fut-il de Margaret Thatcher qui, mise en ballottage dans le parti en novembre 1990, dut s’effacer au profit du pâle John Major. Or des députés travaillistes remettent désormais ouvertement en question la légitimité de Gordon Brown. Une dizaine d’entre eux ont ainsi tenté de lancer, le week-end dernier, une procédure destinée à contester l’actuel leadership.

Les déroutes aux récentes élections partielles et le brutal ralentissement de l’économie britannique, particulièrement exposée aux aléas de la crise financière mondiale, n’expliquent pas tout. Celui qui fut l’habile et intègre chancelier de l’Echiquier, une décennie durant, au côté de Tony Blair déçoit à la fois l’aile gauche, qui espérait une inflexion de la politique libérale, et échoue à se gagner le c£ur des blairistes. D’autant que ces derniers pensent avoir trouvé leur champion en David Miliband, l’actuel ministre des Affaires étrangères.

Miliband préconise  » un vrai changement « 

Né de parents juifs polonais réfugiés, ce fringant et jeune (43 ans) intellectuel, athée, passé par Oxford et apparatchik du New Labour, avait été intronisé par Blair comme l’espoir le plus brillant de la nouvelle génération. Bien qu’il nie publiquement vouloir défier Brown à la tête de la formation travailliste, Miliband a publié, cet été, dans le quotidien The Guardian, un article qui a fait grand bruit : il préconisait pour le New Labour un  » vrai changement, pas seulement de programme mais dans la manière de faire de la politique « , condition indispensable, selon lui, à une quatrième victoire électorale consécutive. Comment mieux dire son opposition ?

Le grand oral de Gordon Brown à la conférence de Manchester pourrait bien être l’ultime chance de ce dernier. S’il échoue à se réconcilier avec le parti et l’opinion, la tentation, pour les mutins, sera plus forte que jamais de le débarquer avant l’hiver, au lieu d’attendre le printemps comme envisagé initialement. Car dix-huit mois ne seront pas de trop pour permettre au Labour de remonter la pente avant les élections générales prévues, au plus tard, au printemps 2010.

Jean-Michel Demetz

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